Femme aspergée à l'acide par son ex-compagnon : l'État condamné pour "faute lourde"

Dans une décision révélée par Le Monde, le tribunal de Paris a condamné l'État français pour "faute lourde" dans une affaire de violences conjugales. Celui-ci aurait fait preuve d'inaptitude pour protéger la victime, aspergée à l'acide par son ex-compagnon en 2018, et contre qui elle avait déjà déposé de nombreuses plaintes...

Femme aspergée à l'acide par son ex-compagnon : l'État condamné pour "faute lourde"
© Jeanne Accorsini/SIPA

L'État français a été condamné pour "faute lourde" par le tribunal de Paris dans une affaire de violences conjugales pour son "inaptitude" à protéger une femme victime de violences conjugales, a appris lundi l'AFP, confirmant une information révélée par le journal Le Monde vendredi. Celle-ci avait été attaquée à l'acide, en pleine rue, par son ex-compagnon en 2018. Elle avait auparavant déposé sept plaintes contre lui.

Les nombreuses failles dans la protection de cette victime

Le 12 juin 2018, Karim Bouembassa, 41 ans, avait aspergé d'acide sulfurique son ex-compagne dans une rue de Marseille. La victime, qui était également la mère des deux enfants de cet homme, était menacée depuis plusieurs mois au moment des faits. Elle a assigné l'État en justice, estimant qu'elle n'avait pas été suffisamment protégée. Karim Bouembassa avait en effet été condamné plusieurs fois pour violences conjugales envers sa compagne et était sous le coup d'un contrôle judiciaire. Mesure qu'il a violée à plusieurs reprises, en se rendant notamment à proximité du domicile de son ex-compagne les 18 avril et 6 juin 2018. Interpellé et placé en garde à vue le 6 juin, Karim Bouembassa avait été remis en liberté deux jours plus tard, le 8 juin, le jour même où un mandat d'arrêt avait pourtant été émis à son encontre. Quatre jours plus tard, il interpelle sa victime dans la rue et l'asperge d'acide, tout en lui écartant les bras avec lesquels elle tente de se protéger le visage. Cette agression a valu à Karim Bouembassa une condamnation à 18 ans de prison en juillet 2019, peine réduite à 15 ans par la cour d'appel d'Aix-en-Provence en juin 2020.

L'État condamné à réparer financièrement les préjudices moraux

"Ces circonstances caractérisent l'inaptitude du service public de la justice à remplir la mission dont il est investi, laquelle a fait perdre une chance" à la victime "de ne pas subir cette agression", a estimé le tribunal judiciaire de Paris dans sa décision du 16 novembre, révélée vendredi par Le Monde. Par ce jugement, l'État est condamné à verser 10.000 euros de dommages et intérêts à la victime, en réparation de son préjudice moral, ainsi que 3000 euros pour ses frais de justice. Le tribunal a aussi condamné l'État à verser 3000 euros à la victime pour le préjudice moral de chacun de ses deux enfants.