Chimène Badi : Avoir 40 ans, l'amour, sa vie dans le Sud, Piaf... interview EXCLU

Chimène Badi le reconnaît elle-même : elle n'a jamais été aussi bien dans sa tête et dans son corps. Heureuse de consacrer un album à Edith Piaf, la chanteuse a en commun avec son idole de ne pas se laisser dicter ses choix et d'écouter son cœur ! Nous avons rencontré cette passionnée qui a des étoiles dans les yeux quand elle évoque la môme Piaf. Interview exclu.

Chimène Badi : Avoir 40 ans, l'amour, sa vie dans le Sud, Piaf... interview EXCLU
© Lionel GUERICOLAS /MPP/SIPA

Le 22 janvier dernier a été une date importante dans la vie de Chimène Badi. C'est le jour où elle a retrouvé la scène mythique de l'Olympia pour présenter à son public son nouvel album baptisé Chimène chante Piaf et consacré à l'immense Edith Piaf. Une artiste mythique qui a beaucoup inspiré Chimène Badi qui a souhaité rendre hommage en chansons à cette grande amoureuse. Les deux femmes ont en commun leur caractère bien trempé, une liberté de ton et une volonté d'assumer leurs choix même s'ils ne correspondent pas aux codes établis. Nous avons échangé avec Chimène Badi quelques jours avant ce concert tant attendu et qui a été à la hauteur de ses promesses ! Interview exclusive.

© Album Chimène chante Piaf

 

Vous connaissez bien Edith Piaf car vous n'aviez que 4 ans lorsque vous avez entendu pour la première fois sa chanson Mon Dieu.

Chimène Badi. Effectivement je ne comprenais pas ce que voulait vraiment dire le texte car j'étais trop jeune mais j'ai été véritablement bouleversée. Au-delà de sa voix, Edith Piaf m'a inspirée et m'a emportée avec elle dans ses chansons et dans son histoire. J'ai ensuite grandi avec elle et je savais qu'un jour je lui rendrai hommage.

C'est donc un choix logique mais pourquoi maintenant ?

Chimène Badi. Je l'ai beaucoup réécoutée pendant le premier confinement. Un matin, j'ai appelé mes producteurs de spectacle et je leur ai dit que je voulais que mon prochain spectacle soit un hommage à Edith Piaf. Ils m'ont dit oui tout de suite et l'histoire a commencé comme cela.

"Il n'y a qu'une seule Edith Piaf"

Vous avez rencontré Charles Dumont, compositeur de Non je ne regrette rien et de Mon dieu et vous avez été très marquée par votre entrevue.

Chimène Badi. J'ai eu de la chance de le rencontrer au printemps dernier. Cela a été un moment hors du temps qui m'a bouleversée. Je suis entrée dans son appartement et avant même de le voir, les larmes se sont mises à couler. Charles Dumont m'a dit qu'il m'avait beaucoup écoutée et regardée et m'a confortée dans mon choix de réinterpréter les chansons d'Edith Piaf.

Comment chanter Piaf ?

Chimène Badi. Elle a une interprétation bien à elle et je n'ai jamais souhaité faire du Édith Piaf. Je voulais chanter l'artiste qui m'a fait rêver mais avec ma propre voix et ma propre interprétation. Il n'y a qu'une seule Edith Piaf : nous n'avons pas du tout le même grain de voix et le même vibrato. Nous sommes très différentes mais nous nous retrouvons sur plein de points.

Edith Piaf nous a quittés il y a 60 ans. Est-ce que des éléments dans son histoire trouvent écho dans la vôtre ?

Chimène Badi. C'était une femme avec beaucoup de caractère. Je l'ai vue sur des photos entourée d'hommes et on sent que c'est elle qui mène la barque. Même si elle a eu beaucoup de drames dans sa vie, cela ne l'a jamais empêchée d'être là où elle avait envie d'être. Je me retrouve aussi dans sa générosité et dans le fait de partager avec les autres et de ne pas tout garder pour elle. J'aime également sa façon de donner la main à d'autres artistes. C'était aussi une femme avant-gardiste et une passionnée. Je me suis beaucoup documentée sur elle : je sais qu'elle pouvait être dure mais elle était authentique et c'est ça qui me plait.

Edith Piaf a grandi quasiment dans la rue avec des parents défaillants. Ce n'est pas du tout votre cas car vous avez eu des parents structurants mais sévères ?

Chimène Badi. Mon père pouvait être très strict. Ma mère aussi mais elle avait aussi pour rôle d'apaiser la situation. Pour être honnête, je suis très heureuse d'avoir eu cette éducation et cet équilibre qui construit une personne. C'est bien d'avoir des limites et d'être cadrée.

Edith Piaf était une grande amoureuse. Partagez-vous cette conception ?

Chimène Badi. Je la comprends et cela me parle. Je suis comme elle : quand j'aime, j'aime à fond et il n'y a pas de limites. Pour moi l'amour au sens large est un moteur. Sans amour, je suis éteinte. Je peux comprendre que l'amour était pour elle viscéral. Elle ne savait qu'aimer à la démesure mais elle ne s'est privée de rien.

"Je n'ai pas besoin d'être validée dans le regard de quelqu'un d'autre"

Vous avez confié récemment que vous étiez célibataire et que vous n'aviez plus besoin de vous voir dans le regard de l'autre : avez-vous effectué un travail pour en arriver là ?

Chimène Badi. Avec les années, on se comprend, on s'analyse et on se dit que finalement on n'a pas besoin de certaines choses. J'ai réalisé que j'avais juste envie de me regarder et de m'aimer moi. Je n'ai pas besoin d'être validée dans le regard de quelqu'un d'autre. L'amour ce n'est pas se voir dans le regard de l'autre. C'est beaucoup plus profond que cela et beaucoup plus porteur.

Vous avez été victime de harcèlement scolaire : est-ce que c'est un sujet qui est aujourd'hui suffisamment pris en compte par les autorités ?

Chimène Badi. C'est un sujet qui me préoccupe beaucoup. Si j'avais un enfant aujourd'hui, je serais très inquiète. Même si des efforts ont été faits, qu'on essaie d'en parler plus, je pense qu'on est encore loin de ce qu'il faut faire pour aider ces enfants. J'ai eu la chance d'avoir ce caractère qui me permet de ne pas supporter qu'on me fasse du mal et qui m'a permis de me défendre. Mais à l'époque, il n'y avait pas les réseaux sociaux et c'était déjà très compliqué quand je rentrais chez moi. Heureusement que je pouvais chanter pour oublier la journée. Aujourd'hui, le harcèlement a pris des proportions beaucoup plus importantes car quand on sort de l'école les réseaux sociaux prennent le relais et cela ne s'arrête jamais. On ne peut pas accepter ce phénomène en France et en 2023.

© Thomas Braut

Vous venez d'avoir 40 ans et vous semblez plus épanouie que jamais aussi bien physiquement que psychologiquement.

Chimène Badi. Effectivement car je trouve ça génial d'avoir 40 ans (rires). Le fait de vieillir n'a jamais été un souci pour moi. Je n'ai pas de problème avec le fait que le temps marque mon visage parce que c'est bien de voir qu'il a du vécu et une histoire. Un visage lissé est un visage qui ne raconte rien. Je me sens bien dans mes pompes et à ma place à l'endroit où je dois être, dans ma personnalité, dans ma façon d'être. Je me sens flex comme dirait Gad Elmaleh (rires).

Avez-vous une hygiène de vie particulière ?

Chimène Badi. J'écoute ce que je ressens mais j'ai une vie plutôt calme. J'ai besoin de paix et de sérénité car je suis speed naturellement. Mon rythme de vie n'aide pas à être plus calme mais quand je rentre chez moi dans le sud-ouest, je ne me couche pas trop tard. J'ai appris à le faire récemment car avant je vivais la nuit. Ce sont peut-être les 40 ans qui font ça (rires). Mais force est de reconnaître que je n'ai jamais été attirée par la fête et l'alcool et je suis assez sage. J'aime beaucoup me promener et marcher en forêt. Je suis une fille de la nature. C'est ce qui m'apaise et me détend.

"Les femmes sont conscientes du pouvoir qu'elles ont"

Comme Édith Piaf, vous n'aimez pas qu'on vous impose les choses. Pourquoi avoir voulu vous confier sur la maternité, une expérience que vous n'avez pas eu envie de connaître ?

Chimène Badi. J'ai évoqué ce sujet dans le titre Juste une Femme qui figurait dans l'album Chimène mais ce n'était pas du tout prévu. Cette chanson est née d'une rencontre avec un auteur lors d'un séminaire. Au détour d'une conversation, il m'a demandé si j'avais des enfants. Je lui expliqué que non et pourquoi et le lendemain un autre auteur m'a dit que cela l'avait beaucoup touché et qu'il avait imaginé dans la nuit une chanson sur ce thème. J'ai voulu que cette chanson, que j'ai légèrement modifiée, soit dans l'album car je me suis dit que beaucoup de femmes devaient se poser les mêmes questions que moi et que ce titre pouvait les aider. Quand l'album est sorti, c'était important pour moi de dire aux femmes qui ne voulaient pas être mères que ce n'était pas grave et que cela ne les empêchait pas d'être des femmes à part entière et accomplies.

La société est-elle trop exigeante avec les femmes ?

Chimène Badi. Elle est encore dure avec nous mais je trouve que les femmes se bagarrent bien. Elles sont conscientes du pouvoir qu'elles ont, de ce qu'elles sont capables d'accomplir et de défendre. Elles ont confiance en elles et c'est à nous de continuer à nous battre pour nous imposer. On avance !

Vous allez commencer une tournée de 50 dates qui commence par l'Olympia. Aimez-vous rencontrer votre public ?

Chimène Badi. J'ai beaucoup de chance avec mon public qui me soutient, m'accompagne et qui se montre doux et généreux. J'ai peut-être perdu des fans en cours de route et d'autres sont venus mais les fidèles sont toujours là. Le public est l'une de mes plus belles histoires d'amour et il m'a terriblement manqué pendant la pandémie. J'aime aller en studio mais la rencontre avec lui est l'ultime récompense : c'est la parenthèse enchantée et c'est ce qui me permet de me sentir remplie.