Athena Strates (A PERFECT ENEMY) : "Prendre soin de soi est primordial"

La débutante Athena Strates s'offre un rôle principal à la hauteur de ses ambitions avec "A Perfect Enemy". Elle est l'hypnotisante et diabolique Texel Textor dans l'adaptation de "Cosmétique de l'ennemi" d'Amélie Nothomb par Kilke Maillo, au cinéma le 29 décembre. C'est elle qui catalyse le suspense, l'intrigue et même l'effroyable versant de ce thriller inquiétant. Interview.

Athena Strates (A PERFECT ENEMY) : "Prendre soin de soi est primordial"
© Susanna Sáez/EFE/SIPA

C'est un premier premier rôle pour Athena Strates. Dans A Perfect Enemy, la jeune actrice sud-africaine aperçue dans la série Genius sur Pablo Picasso et dans L'Art du mensonge (avec Helen Mirren et Ian McKellen) campe le personnage principal du film, avec Tomasz Kot. Elle est l'insupportable, mais captivante Texel Textor, cet être pervers qui harcèle l'architecte à peine rencontré dans le hall d'un aéroport. Ce personnage est issu de l'adaptation du roman Cosmétique de l'ennemi d'Amélie Nothomb par Kike Maillo. Le cinéaste espagnol a pris la liberté de faire de ce nuisible humain une femme, quand l'autrice belge l'avait façonné sous les traits d'un homme. Le réalisateur y voit quelque part une justicière, celle qui oblige son interlocuteur à se confronter à ses propres démons, tout en restant une sociopathe. Une sorte d'antagoniste ambigü, admirablement incarné par la jeune femme. Son interprétation a d'ailleurs totalement séduit Amélie Nothomb, restée "sidérée" devant sa prestation. Le meilleur des encouragements pour la suite, non ? Rencontre, par écrans interposés.

Qu'est ce qui vous a plu dans A Perfect Enemy ?
Athena Strates : J'ai tout de suite été saisie par l'histoire, par ce rôle si intéressant pour moi. Quand j'ai découvert le twist, je ne croyais pas ce que je venais de lire. J'ai dû relire le scénario. Je ne m'y attendais absolument pas. C'était brillamment écrit. M'imaginer jouer un personnage aussi libre a fini de me persuader que je devais le faire.

Que pouvez-vous dire de Texel Textor ?
Athena Strates : À chaque fois que je pense à elle, je perçois d'autres facettes de sa personnalité. Elle est surprenante. Vous pensez avoir une idée de ce qu'elle pourrait dire, faire ou penser et elle débarque avec une énorme surprise à chaque fois. Elle est spontanée, elle cherche l'attention et rien ne l'arrêtera dans cette quête.

"J'ai basé mes recherches sur des criminelles, des tueuses en série"

Dans le livre, Textor Texel est un homme. Avez-vous pris cela en compte pour travailler le personnage ?
Athena Strates
 : Je n'ai pas laissé le livre m'influencer. D'ailleurs, j'ai appris que le personnage de base était un homme à la moitié du tournage. J'en suis contente car ça ne m'a pas influencée du tout. J'ai basé mes recherches sur des criminelles, des tueuses en série. J'ai regardé un tas de choses sur les femmes en prison et ce qui motive les psychopathes. Cela m'a permis de ne jamais juger mon personnage. Tout ce que je faisais me semblait justifié, faisait sens. Au moment des répétitions, je savais que j'avais toutes les informations nécessaires. Il ne me restait plus qu'à les laisser infuser sans qu'elles ne prennent trop de place dans mon esprit.

Avez-vous éprouvé du plaisir à jouer quelqu'un d'aussi critiquable ?
Athena Strates
 : C'était génial. C'est ce que j'aime avec mon métier. Tu touches à des endroits de ta personnalité que tu ne peux atteindre au quotidien. Chaque impulsion que je pouvais avoir en incarnant Texel était très libératrice.

Les femmes psychopathes sont des personnages qu'on voit peu souvent. Est-ce important pour vous qui êtes en début de carrière, de briser les préjugés ?
Athena Strates
 : En tant que jeune femme dans cette industrie, je ne peux m'empêcher de voir les stéréotypes existant. Pour mon premier rôle principal, avoir une telle opportunité de déjouer les idées reçues, de dépasser les limites pré-établies, c'était un départ incroyablement fort. Je veux que la suite de ma carrière suive cette impulsion. Les rôles que j'aime jouer sont audacieux. J'aime pousser et voir jusqu'où je peux aller.

Athena Strates et Tomasz Kot dans "A Perfect Enemy" © Aritz Lekuona - Alba Films

Comment s'est passée la rencontre avec Tomasz Kot ?
Athena Strates
 : C'était super de jouer avec lui. Il me manque d'ailleurs beaucoup. Nous nous sommes énormément amusés pendant le tournage. Ma relation avec Tomasz était si fiable, si authentique, que ça m'a aidée à surmonter mon challenge, qui était d'interpréter quelque chose bien au-delà de tout ce que j'avais pu jouer avant. Je me sentais tellement en confiance que j'ai pu tout donner. Son défi à lui était l'anglais et j'ai l'impression qu'on était là pour se rattraper, se soutenir. Nous avons construit une belle amitié grâce à ce film.

Quel souvenir gardez-vous du tournage ?
Athena Strates
 : On a tourné le plus gros en Espagne. C'est là que je jouais la partie du film basée sur les dialogues, le storytelling. Ensuite, j'ai dû me rendre dans des lieux différents pour tourner les flashbacks. J'étais dans un nouvel état d'esprit. Mes capacités émotionnelles dans ces endroits étaient autres. Ce dont je me souviens surtout, c'est de comment je me sentais pendant le tournage à Paris, à Francfort, en Espagne. Cela correspond à mon voyage émotionnel auprès de Texel.

Quelle relation entretenez-vous avec les aéroports ?
Athena Strates : Je ne les verrais plus jamais de la même manière. Quand j'y suis, que j'entends les sons, les appels et que je vois les passagers, le film me manque ! Ce qui est cool, parce que tant que je fréquenterais les aéroports, je me reconnecterai à ce sentiment spécial.

Qu'avez-vous appris grâce à A Perfect Enemy ?
Athena Strates
 : C'était mon premier rôle principal, c'était énorme. J'ai toujours eu assez confiance en moi pour savoir que je pouvais atteindre ces émotions enfouies, mais j'ai appris à m'y connecter pendant un tournage. C'est une chose de se lever tous les jours et de mettre du cœur à l'ouvrage pour atteindre ces endroits sombres et c'est aussi important de rentrer chez soi et de redescendre, de trouver sa routine pour pouvoir continuer à le faire pendant quelques mois. Ma principale leçon est qu'il est très important de prendre du recul en dehors du plateau. Dormir, prendre soin de soi, c'est primordial.

"J'aimerais continuer à raconter des histoires auxquelles les gens s'identifient, faire évoluer les mentalités"

Pourquoi être devenue actrice ?
Athena Strates
 : Ça a toujours été en moi. Depuis petite, je demande à ma famille de me regarder danser, chanter ou autre. Je n'ai pourtant pas étudié le jeu, j'ai étudié l'architecture d'intérieur. En réalité, c'est moi l'architecte du film (rires) ! J'ai fait ce choix tout en sachant que jouer la comédie était ma passion. Je ne m'imagine pas ailleurs.

Que pensez-vous de l'affiche du film, sur laquelle on vous voit dénudée ?
Athena Strates 
: C'est tellement cool (rires) ! J'adore cette affiche, elle est très audacieuse. C'est à la fois super bizarre. Je me suis demandé si les gens me reconnaissaient dessus. Une part de moi voudrait être plus identifiable parce que je suis très fière du travail accompli, mais c'est peut-être une bonne chose si on ne fait pas le lien avec moi. 

Quelles sont vos envies pour la suite ?
Athena Strates
 : J'aimerais continuer à raconter des histoires auxquelles les gens s'identifient, faire évoluer les mentalités pour déjouer les jugements que l'on peut avoir sur certaines personnes. J'espère que mes prochains rôles continueront d'inciter les gens à se sentir bien avec eux-mêmes. Texel met en lumière le côté sombre qu'ont certains en eux et pour lequel ils se sentent coupables. J'aimerais que les gens embrassent leurs défauts et c'est pour cela que je veux continuer à jouer des rôles authentiques, inspirants. Pour moi-même, j'aimerais juste continuer à incarner des personnages forts.