Comme LE JEUNE AHMED, 5 films glaçants sur la radicalisation

En salles le 22 mai, "Le Jeune Ahmed" des frères Dardenne dresse le portrait chaotique d'un adolescent fanatisé. Ces dernières années, le cinéma s'est largement emparé de ce sujet explosif. Exemples à l'appui.

Comme LE JEUNE AHMED, 5 films glaçants sur la radicalisation
© Diaphana Distribution

Avec Le Jeune Ahmed, les frères Jean-Pierre et Luc Dardenne sont en lice pour leur troisième Palme d'Or au Festival de Cannes après Rosetta et L'Enfant. Dans ce drame choc et ultra réaliste, dont l'action se déroule en Belgique, ils racontent le destin contrarié et obscurci d'un adolescent qui répond aux sirènes de l'intégrisme et aux prêches de son imam, tout en étant ponctuellement rattrapé par l'innocence sommeillant en lui. Face à la montée du radicalisme qui a secoué le monde cette dernière décennie, le cinéma scanne de plus en plus les mécanismes pernicieux qui précipitent des humains vers la folie pure. Le Journal des Femmes vous propose un retour sur cinq œuvres qui vont dans ce sens.

"Le jeune Ahmed"

La Désintégration de Philippe Faucon (2012)

Son sacre aux César pour le formidable Fatima, en 2016, était le couronnement logique d'une filmographie exemplaire, qui ausculte la société avec une précision déroutante. Quatre ans avant, pour La désintégration, Philippe Faucon avait investi une cité de l'agglomération lilloise pour nous amener à la rencontre d'Ali, Nasser et Hamza, trois jeunes hommes à l'avenir incertain, perdus et socialement désorientés. Quand un aîné ultra religieux exploite leurs failles et leurs désillusions, ils mutent bientôt au rythme des manipulations, s'enfonçant vers les ténèbres. Mise en scène épurée jusqu'à sa moelle, sens formidable de l'ellipse, direction parfaite des acteurs : le cinéaste signe là une œuvre choc.   

Les Chevaux de Dieu de Nabil Ayouch (2013)

Creuser là où ça fait mal. Toujours. C'est son dada. Un peu moins de deux ans avant d'avoir créé la sensation avec Much Loved, saisissant portrait d'un quatuor de prostituées de Marrakech (qui a valu à son actrice, Loubna Abidar, des agressions et des menaces de mort), Nabil Ayouch a dépeint avec force et âpreté l'enrôlement de jeunes marocains dans Les chevaux de Dieu. Ici, les cibles, criblées de troubles familiaux et en proie à une désillusion précoce, sont recrutées dès leur plus jeune âge. Elles n'en sont que plus malléables. Le réalisateur y rappelle, dans une approche documentaire et terriblement lucide, combien les sociétés malades dans leurs fondations sont un engrais pour les extrémismes.     

Made in France de Nicolas Boukhrief (2016)

C'est l'un des films les plus horriblement prémonitoires de l'Histoire. Sa sortie, prévue le 18 novembre 2015, a été repoussée en raison des attentats du Bataclan, des terrasses parisiennes et du Stade de France. Son affiche, avec une kalachnikov à la place de la Tour Eiffel, avait aussi été retirée. Et pour cause, Made in France de Nicolas Boukhrief centre son intrigue sur un journaliste qui infiltre des mosquées clandestines de la banlieue parisienne et gagne la confiance d'un groupe de jeunes djihadistes sur le point de commettre des horreurs dans Paris. Aussi dérangeant dans le fond qu'efficace dans la forme, le résultat nous redit l'insupportable simplicité avec laquelle l'embrigadement peut s'opérer.  

Le Ciel Attendra de Marie-Castille Mention-Schaar (2016) 

Le tournage du Ciel Attendra de Marie-Castille Mention-Schaar a débuté dans la douleur le 19 novembre 2015, trois jours seulement après les attaques qui ont endeuillés Paris, la France et le monde. Ironie du sort, le quatrième long métrage de la cinéaste dépeint le processus d'enrôlement de deux jeunes filles par des islamistes. D'un côté, Mélanie, une ado violoncelliste ciblée par un recruteur sur Facebook. De l'autre, Sonia, une victime en voie de déradicalisation. Deux parcours qui se croisent, comme un miroir inversé où les reflets des actrices Noémie Merlant et Naomi Amarger crèvent l'écran. Il y a ici de la justesse dans le ton, les dialogues et le jeu ; une précision qui coupe la route à tout excès de didactisme.

L'Adieu à la Nuit d'André Téchiné (2019)

L'intégrisme ne naît pas exclusivement dans les grandes villes et leurs environs. Avec L'Adieu à la nNuit, André Téchiné installe son histoire dans un centre équestre en pleine campagne. Une ruralité qui appuie encore plus fortement les changements de comportement du jeune protagoniste (Kacey Mottet Klein), Alex, qui vient passer quelques jours chez sa grand-mère (Catherine Deneuve) avant d'aller faire ses études au Canada. Le cinéaste français veut montrer ici que le passage du côté obscur n'est pas toujours une affaire de religion ou de politique, mais qu'il nait d'une volonté de donner un sens à une vie qui n'en a aucun. En cela, son approche diffère des autres longs-métrages généralement consacrés au sujet.