Audrey Lamy : "Les actrices ont aussi envie de buter des gens au ciné"
Dès le 13 mars, Audrey Lamy joue les badass, aux côtés de Cécile de France et Yolande Moreau, dans la comédie "Rebelles". Entretien cash avec l'une des comédiennes les plus spontanées du cinéma français.
Elle a cette gouaille et cette gentillesse qui la rendent irrésistible et si populaire auprès du public. Audrey Lamy, toujours à l'affiche du film Les Invisibles –carton en salles avec plus d'1.3 millions d'entrées–, compose un joli tourbillon d'humour dans Rebelles, la première réalisation solo d'Allan Mauduit. Elle y incarne Marilyn, une ouvrière pétulante et excessive d'une conserverie qui est complice, avec ses deux collègues (Cécile de France et Yolande Moreau), de la mort de son prédateur sexuel de patron. Avec humour et bonne humeur, la comédienne est revenue pour le Journal des Femmes sur cette comédie trash à l'américaine et sur l'empowerment féminin qui en suinte.
Quelques semaines après Les Invisibles, vous êtes de nouveau à l'affiche d'une comédie sur fond social. Est-ce un hasard ?
Audrey Lamy : Complètement. C'est le hasard de la vie qui fait ça. Je tournais Ma Reum en Belgique quand j'ai reçu le scénario de Rebelles. J'étais un peu fatiguée, j'avais eu une longue journée et j'espérais que la lecture du script me détendrait. Je n'ai pas pu m'arrêter. Il n'y a rien de plus génial que de plonger dans une histoire qui vous passionne et qui développe votre imagination. Mon personnage m'a inspirée d'emblée. Rebelles est une comédie rock'n'roll, tranchante, 100% girl power.
Et détonante par rapport à ce qu'on voit habituellement en France…
Audrey Lamy : C'est ça ! Allan Mauduit est gonflé, culotté. Il propose des choses que les Américains réussissent, mais dont la France est un peu frileuse. J'aime ceux qui prennent des risques. Et, ce qui est chouette avec Rebelles, c'est son décentrement. On sort de la bourgeoisie parisienne où ça peut être trop lisse. C'est hyper intéressant d'utiliser la classe prolétaire, populaire, ouvrière et de l'embarquer dans cette aventure complètement folle. Ces trois ouvrières de la conserverie ont du caractère, de la personnalité… Le cinéma dépeint d'ailleurs souvent le prolétariat par le prisme de films dramatiques alors que tout n'y est pas triste 7 jours sur 7 et 24h sur 24. Allan Mauduit, le réalisateur, vient justement de la classe ouvrière et il voulait qu'on se marre avec de tels personnages, généralement rattachés à des drames sociaux.
Du coup, vous êtes en passe de devenir la porte-parole des opprimés, non ?
Audrey Lamy : (Eclat de rire) Tant mieux ! Pourquoi pas ? C'est bien de parler de cette France avec un côté positif. Les héroïnes en question sont lumineuses. Elles sont baignées de vie, elles ont envie de rire, de réaliser des choses complètement démentes… Pour revenir au scénario, j'ai été emballée par le mélange des genres proposé : western, polar, glamour, trash, avec une embardée dans un milieu de mafieux. Ici, on attribue aux femmes des caractéristiques ordinairement dédiées aux hommes. Quel plaisir d'avoir enfin un réalisateur qui donne des armes aux femmes et pas qu'aux hommes, qui ont presque toujours le pouvoir de les manier. Les actrices ont aussi envie de buter des gens au ciné, d'avoir les mains dans la terre, dans le sang, de trancher des têtes, de participer à des bastons, à des cascades, à des fusillades… (rires)
Partagez-vous le côté rebelle de votre personnage ?
Audrey Lamy : Oui même si je crois qu'elle l'est beaucoup plus que moi. Je ne prends pas de speed. Je n'en ai pas besoin, d'ailleurs (rires). Ce qui est bien, c'est que rien n'est gratuit dans ce film. On s'identifie à ces femmes qui saisissent leur chance pour tenter une vie meilleure. Leurs aventures vont les aider à se libérer et à faire des choix. Ce n'est ni une satire, ni une caricature. Tous les personnages, même les plus antipathiques, à l'image de celui de Cécile de France, sont défendus.
"Les hommes et les femmes font le monde ensemble."
Castrer les hommes, c'est la meilleure méthode pour lutter contre le machisme ?
Audrey Lamy : (Rires) Ce n'est pas la solution qu'on impose au public. On ne leur dit pas : "Coupez des teubs et vous verrez, la vie sera plus belle ! " C'est un accident dans le film et c'est pour ça qu'on leur pardonne. Les ouvrières sont victimes de leur patron libidineux et odieux.
Le monde est-il trop machiste ?
Audrey Lamy : Je vais réfléchir avant de dire une bêtise car je suis parfois trop spontanée. Il faut que je sois plus cérébrale. Disons qu'il ne faut pas se répéter qu'il l'est. Car plus on se le dit, plus ça prend de la place dans notre esprit. Si on se martèle les choses, on y croit fort. Alors oui, nous sommes dans un monde machiste qui me dérange par moment. Mais à côté, on a des femmes qui prennent de plus en plus la place, le pouvoir… Et c'est génial. Vous savez, il n'y a pas si longtemps, ma grand-mère demandait encore à son mari l'autorisation de travailler.
Avez-vous déjà vécu de mauvaises expériences dans le cinéma ?
Audrey Lamy : Je n'ai pas été victime de machisme dans ce domaine. D'autres comédiennes ou comédiens pourront peut-être vous le dire mais à titre personnel, je n'ai rien ressenti de tel. J'essaye de m'entourer de gens sympathiques et ouverts. Si quelque chose de désagréable venait toutefois à arriver, j'ai désormais la solution qui consiste évidemment à couper des teubs (rires).
Vous dites que le film est féminin mais pas féministe. Le second mot serait-il, selon vous, employé à tort et à travers ?
Audrey Lamy : Oui… Il me fait un peu peur ce mot. Il y a des gens très bien qui l'utilisent de manière positive. Et d'autres non. L'important, c'est de remettre l'humain au centre de tout. Les hommes et les femmes font le monde ensemble. On n'a peut-être pas toujours les mêmes désirs mais on partage la volonté de vivre. Et je n'ai pas envie que les hommes perdent ce côté viril qu'on apprécie toutes, les nanas. Faut se l'avouer, on aime les mecs couillus.