Grâce à Dieu et Euforia sont nos coups de cœur du 20 février et l'on a détesté...

Cette semaine, entrez dans l'intimité dévastatrice des victimes de pédophilie, découvrez une relation touchante entre deux frères que tout oppose... "Grâce à Dieu" et "Euforia" sont nos conseils ciné de la semaine alors que c'est un coup de massue pour "Paradise Beach".

Grâce à Dieu et Euforia sont nos coups de cœur du 20 février et l'on a détesté...
© MARS Films
  • Coups de cœur pour...

Grâce à Dieu de François Ozon

Et si nous tenions déjà l'un des sommets cinématographiques de l'année 2019 ? Avec Grâce à Dieu, le réalisateur François Ozon nous plonge dans la glaçante intimité des victimes d'actes de pédophilie au sein de l'Eglise. Il a plus précisément investi l'affaire du père lyonnais Preynat, mis en examen en 2016 et placé sous contrôle judiciaire pour des agressions sexuelles remontant jusqu'à 1986. Dans ce long-métrage choc, les enfants abusés sont immortalisés à l'âge adulte et incarnés par Melvil Poupaud, Denis Menochet et Swann Arlaud, tous étourdissants. Bien qu'il s'exprime de différentes façons, leur traumatisme demeure si vivace et poisseux que le trio lance l'association " La Parole Libérée " visant à recueillir d'autres témoignages -similaires aux leurs-, à rétablir la justice suite à ce passé dévastateur et à mettre l'Eglise face à ses responsabilité. Ces trois lanceurs d'alerte, Ozon les filme avec un mélange de pudeur, de distance et de grâce qui font éclore une émotion constante, et jamais forcée. L'intelligence de l'écriture et la discrétion mesurée d'une mise en scène dévouée au propos permettent par ailleurs une immersion totale au cœur de leurs cicatrices ruisselantes. Sans pour autant être anticlérical ni porter de gros sabots dans sa rage contenue, l'ensemble multiplie judicieusement les points de vue et, avec eux, les émotions d'un public promis à une sidération. Mehdi Omaïs  

Avec Melvil Poupaud, Denis Menochet, Swann Arlaud (2h17)

"GRÂCE À DIEU // VF"

Euforia de Valeria Golino

© Paname Distribution
"EUFORIA // VOST"

Sélectionné l'an dernier dans la catégorie Un Certain Regard au Festival de Cannes, Euforia marque la deuxième réalisation de l'actrice Valeria Golino, après l'engageant Miele (2013). Ce nouvel opus s'articule sur une thématique très prisée dans le cinéma, et l'art en général : les liens de sang. Ici, c'est aux frères que la belle italienne s'intéresse avec une sincérité palpable. D'un côté : Matteo, un architecte extraverti qui vit dans l'opulence que lui permet sa réussite professionnelle. Seul bémol ? Son addiction à la drogue. De l'autre : Ettore, plus taciturne et triste, qui souffre, sans le savoir, d'un redoutable cancer. Dans ces douloureuses circonstances, Golino orchestre un face-à-face touchant entre deux frangins partis du mauvais pied. Et qui devront apprendre à mieux se connaître, se dompter, s'accepter, par-delà les différences et les griefs d'antan. Le scénario d'Euforia s'appuie sur l'antagonisme qui les neutralise pour jongler entre l'austérité et la fantaisie, tout en évitant, à chaque fois, de glisser sur la paroi de la sensiblerie. Dans une Italie lumineuse, magnifique réceptacle aux sentiments qui animent les héros, les comédiens Riccardo Scamarcio et Valerio Mastendrea se complètent et se distinguent sans jamais trop en faire, jusqu'à un dernier plan poétique et touchant. Mehdi Omaïs     

Avec Riccardo Scamarcio, Valerio Mastendrea, Isabella Ferrari (1h55)

  • Coup de barre sur...

Paradise Beach de Xavier Durringer

© Océan Films

Imaginez les anges de la téléréalité qui tourneraient un polar sous les tropiques ? C'est, grosso modo, le menu indigeste de Paradise Beach de Xavier Durringer. Huit ans après La Conquête, voyage honnête au cœur de l'ascension au pouvoir de Nicolas Sarkozy, le cinéaste français nous emmène en Thaïlande, armé d'un scénario qui tient sur un pin's. On vous la fait courte –forcément– : une équipe d'anciens braqueurs passent du bon temps à Phuket, loin de la France qu'ils ont quittée il y a 15 ans après un coup. Leur quotidien bascule quand Mehdi, le seul membre de leur bande ayant croupi en prison, se pointe pour réclamer la part d'un gâteau dont il ne reste plus grand-chose. Voire rien du tout. Cet état de fait va bientôt les précipiter dans une spirale de violence (sans tension). Dans Paradise Beach, l'accumulation de médiocrité tient, d'une certaine manière, d'une forme de miracle. Tout y est raté avec excellence : les dialogues semblent avoir été écrits par des ados et façonnés au marteau-piqueur, les acteurs jouent avec autant de subtilité qu'un éléphant dans un magasin de porcelaine, l'usage des chansons et de la musique est objet de rire constant, et tutti quanti… Ici, absolument rien ne vient éconduire ce navire du naufrage. Chaque séquence qui suit l'autre –mention spéciale à ce dîner hallucinant où un des personnages humilie sa femme en public avec une gratuité déconcertante– enfonce davantage l'entreprise dans les chairs d'un embarras qui n'estompe jamais. Mehdi Omaïs       

Avec Sami Bouajila, Tewfik Jallab, Mélanie Doutey (1h33)

"PARADISE BEACH // VF"