Municipales : Rencontre avec Julia Mouzon, fondatrice de Femmes & Pouvoir.

Pourquoi avoir créé Femmes & Pouvoir ?
Je me suis rendue compte que les femmes venant de différents partis politiques avaient des problèmes communs. Pour citer quelques chiffres, nous sommes aujourd'hui à 27 % de femmes à l'Assemblée, 21 % au Sénat et 14 % de pourcentage de femmes maires.

Selon vous, quels ont été les progrès effectués en matière de représentation des femmes dans les instances de pouvoir :
On a pu apercevoir un net progrès avec le projet de loi adopté en 2001 sur la parité hommes-femmes dans les communes de 3500 habitants (Le texte adopté par le Parlement rendait obligatoire la stricte alternance hommes-femmes, ndlr). On a maintenant une progression du nombre de femmes maires en tête de liste. Toutefois, il faut aussi savoir que le rythme politique est très lent, à cause de la durée des mandats notamment.

Comment expliquer que les femmes soient toujours sous représentées aux postes à fortes responsabilités en France ?
On peut l'expliquer par deux phénomènes. D'une part, les attentes sociales encore très stéréotypées sur le rôle des femmes, souvent jugé limité. D'autre part, une conséquence de tout le système qui existe. On peut se demander où est la responsabilité. Selon moi, elle réside dans l'éducation, qui fait que les femmes sont moins souvent poussées aux rôles de leader, elles osent moins. Par ailleurs, elles sont également moins valorisées lorsqu'elles accèdent à de tels postes.

Que reste-t-il à faire ?
Tout. Ou beaucoup de choses en tout cas. On est encore très loin du résultat espéré.

Où commence le travail pour combattre le sexisme ?
Par la publicisation et la médiatisation. Le tumblr "Et sinon je fais de la politique" est un exemple intéressant sur la façon dont on peut tourner en dérision ce genre de choses. Il ne faut pas hésiter à parler.

Que proposez-vous pour réduire le sexisme en politiques ?
Nous proposons trois axes : le networking, qui consiste en un partage d'expériences et de problèmes individuels qui sont en fait des problèmes collectifs; les témoignages de rôles modèles, de personnalités inspirantes et enfin des outils concrets pour se mettre en avant, savoir comment agir dans des situations compliquées.

Pourquoi les femmes se dirigent-elles moins vers la politique que les hommes ?
À cause de l'idée d'une politique culturellement et historiquement masculine. Les hommes et les femmes sont tous aussi compétents, cependant  il s'agit là d'un fonctionnement qui ne se fait pas au mérite mais par réseaux, avec des fonctionnements plus opaques donc.

Comment se caractérise le machisme en politique ?
Par le stéréotype, les idées préconçues. Par exemple celle selon laquelle la femme est mieux en numéro deux qu'en numéro un.

Quelles sont les pires remarques que vous avez eu à subir ?
Ce sont plutôt des remarques qu'on eut à subir les élues, comme "Tiens, voilà votre souteneur ", à comprendre ici au sens de proxénète. La semaine dernière, une élue a vu sa vitrine de campagne taguée de l'inscription "Les femmes en cuisine, pas à la mairie. Dégage".

L'élection d'une femme à la Présidence de la république pourrait-elle changer les choses ?
Oui et non : oui, car cela changera l'idée des femmes en position de leader, puisque le poste de président de la République est celui du leader incontesté. Non, parce qu'il faut plus de leaders pour parvenir à changer les mentalités en profondeur.

Quels conseils donneriez-vous à une femme qui s'engage en politique ?
De bien s'entourer. Au niveau personnel ainsi qu'en termes de réseau politique. Je lui conseillerais de faire de la politique avec des gens qu'elle apprécie.

Selon vous, quel sera le pourcentage de femmes élues aux prochaines municipales ?
C'est très difficile à dire. On pourrait espérer entre 38 et 45 % de conseillères municipales.

La prochaine édition du Forum Femmes & Pouvoir aura lieu les 28 et 29 novembre 2014 à Paris.