Droits des femmes en Arabie saoudite : modernisation à deux vitesses

Les Saoudiennes pourront désormais créer leur propre entreprise sans l'aval de leur mari, de leur frère ou de leur père. Une annonce gouvernementale qui confirme la volonté du régime d'élargir les droits des femmes. Un semblant de féminisme ou de la poudre aux yeux ?

Droits des femmes en Arabie saoudite : modernisation à deux vitesses
© Christophe Cappelli - 123RF

"Les femmes peuvent maintenant lancer leurs propres entreprises et bénéficier des services en ligne (du gouvernement) sans avoir à prouver le consentement d'un tuteur", a déclaré le ministère saoudien du Commerce et de l'Investissement sur son site Web, dimanche 18 février 2018. Jusque-là, les Saoudiennes devaient présenter une preuve de permission d'un tuteur masculin pour toute démarche administrative. Désormais, il leur sera possible de devenir auto-entrepreneuses en toute liberté. Cette réforme s'inscrit dans la volonté des autorités d'élargir le champ des libertés pour les femmes.

Depuis quelques mois, le prince héritier Mohammed Ben Salman mène une politique de réformes sociétales. Depuis le 12 février, le parquet de Riyad a annoncé son intention de recruter pour la première fois des femmes. Les Saoudiennes ont également obtenu en juin 2017, après de longues années de campagne, l'autorisation de conduire. C'est une petite victoire pour les militantes féministes du royaume. Nombre d'entre elles avaient dénoncé cette interdiction archaïque et n'hésitaient pas à publier des vidéos d'elles-mêmes au volant, comme Manal Al Sharif en 2011. Un geste qui lui a valu 9 jours de prison et des appels pour qu'elle soit flagellée en public.

Un tournant vers plus de liberté ?

Cette mini révolution prônée par le gouvernement n'est en réalité que l'arbre qui cache la forêt. Le 9 février, un haut dignitaire religieux avait déclaré que le port de l'abaya, cette longue robe ample que doivent porter les Saoudiennes en public, ne devrait pas être obligatoire. Toutefois, les femmes du royaume ne peuvent toujours pas s'habiller comme elles l'entendent. Il suffit de voir les réactions virulentes à une vidéo diffusée sur Snapchat en juillet 2017, sur laquelle une jeune femme déambulait en minijupe et en tee-shirt dans les rues du pays avant d'être recherchée puis interrogée par la police.

Les femmes vont-elles obtenir davantage d'indépendance sous le règne de Ben Salman ? La réponse semble s'orienter vers un non, car les voix dissidentes au régime sont rapidement tues. Les associations féministes peinent à voir le jour et les partisans des droits de l'homme sont jetés en prison. En janvier dernier, Mohammad al Otaibi et Abdallah al Attaoui ont été condamnés à 14 ans de détention en raison de leurs activités militantes.