Nicolas Bedos a aidé son père à mourir : récit d'une nuit "bouleversante"

Nicolas Bedos a aidé son père à mourir dans la dignité, il y a près d'un an. Un parcours éprouvant, une dernière nuit "longue" et "bouleversante" que l'humoriste raconte dans un texte poignant...

Nicolas Bedos a aidé son père à mourir : récit d'une nuit "bouleversante"
© Guy et Nicolas Bedos, en 2016 par Domine Jerome/ABACA

La dernière bataille... pour la mort. Près d'un an après le décès de son père Guy Bedos, qui s'est éteint à 85 ans des suites d'une maladie "cousine d'Alzheimer", Nicolas Bedos raconte les ultimes semaines de vie de l'homme qui l'a élevé et comment il l'a aidé à mourir dans la dignité. Un texte émouvant publié dans L'Obs. "Ce n'est pas le chagrin qu'il s'agit de livrer ici, c'est la question du choix, c'est la violence des épreuves imposée, en plus du reste, par la loi", a-t-il expliqué en préambule.
"Avril 2020. Il a du mal à respirer. Il ne mange plus depuis des semaines, la maladie, le confinement, la confusion", raconte d'abord Nicolas Bedos. Tandis que son épouse Joëlle Bercot est épuisée, Guy Bedos, lui, ne parvient pas à bouger normalement. Il "se lève, voudrait sortir, oublie qu'il est trop faible", mais "tombe, se cogne, saigne".

Les "violentes" larmes de Joëlle Bercot

"Ma mère, à bout de nerfs et de vigilance, est extirpée de son demi-sommeil par des cris. Tant bien que mal, elle le soulève, le rassure, le borde. Elle déteste le ramasser. Elle déteste le voir détester qu'elle le ramasse, supporter ce regard où se mélangent toujours la détresse et l'orgueil", poursuit-il. 

D'abord, Joëlle Bercot pleurait, bouleversée par la façon dont la maladie avait changé leur vie, la relation avec son mari: "Mais les larmes de sa femme le violentent davantage que le fait d'être étalé sur le parquet du couloir. Elle n'en peut plus d'être bouleversée. Il n'en peut plus de ne pas comprendre". Alors, le silence a succédé aux larmes. 

Guy Bedos "mourra dans sa chambre"

Il y a bien l'option d'hospitaliser Guy Bedos. Mais à l'époque, la pandémie bat son plein et "l'envoyer à l'hosto, c'est l'envoyer au diable, possiblement ne plus le voir et ne plus lui parler, ne plus pouvoir glaner ces rares sursauts de lucidité".

"Il est donc décidé" que Guy Bedos "mourra dans sa chambre", avec sa femme, ses enfants et ses chats, se remémore son fils. 

Plus le temps passe, plus l'épreuve est ardue. L'ancien humoriste perd du poids rapidement: "Il ne sort plus de son lit, ses mains sont devenues si fines qu'on a peur de les briser sous le poids des baisers".

Le droit à l'euthanasie, que Guy Bedos avait défendu au cours de sa vie, est l'un de ces combats partagés entre père et fils. "Il y a des pères qui partagent la passion du football ou de la guitare avec leur fils, mon père et moi avons toujours eu en commun une relation étroite avec l'envie de débrancher la machine, faisant de cette idée une sorte de compagne presque réconfortante en cas de désespoir, de déroute affective ou intellectuelle", explique Nicolas Bedos, toujours dans L'Obs.

Nicolas Bedos : comment il a "acheté la mort" de son père

D'ailleurs, Guy Bedos avait déjà commencé à planifier les choses, avant sa maladie. Il avait pris contact avec un médecin anonyme, surnommé "docteur T", afin que celui-ci l'aide à mourir lorsque le temps serait "venu". 

C'est dans cette optique que Nicolas Bedos et sa famille tentent de joindre le fameux "docteur T". Mais celui-ci est injoignable. Alors, ils décident de prendre les choses en main. Ils parviennent à contacter un autre médecin, qui leur envoie "une ordonnance de Rivotril, un antiépileptique couramment utilisé dans ces cas-là", lit-on.

C'est le fils de l'ancien acteur qui prétexte avoir besoin de cet antiépileptique pour un problème d'insomnie: "Je me revois sur mon scooter, me rendant à la pharmacie pour acheter la mort de l'homme que j'aime le plus au monde".

La dernière nuit de Guy Bedos

Finalement, le "docteur T" finit par rappeler, se rend au domicile familial et constate que Guy Bedos n'est pas encore assez "somnolent" pour pratiquer une telle intervention. Il décide de repasser le lendemain. Et cette fois, il accepte de faire partir l'ancien humoriste.

"La nuit suivante sera la dernière. Longue. Bouleversante. Le lendemain, le flacon est plein. Mon père n'en a pas eu besoin pour offrir à son médecin l'état somnolent apparemment nécessaire à une intervention - qui eut lieu vers 17 heures", a raconté Nicolas Bedos.

Et de conclure: "Il aura donc fallu qu'il baisse entièrement le rideau et ne pèse plus que quelques kilos pour que la société daigne choisir 'le jour et l'heure".