Carla Bruni : "Sans la musique, je ne sais pas ce que j'aurais fait de ma vie"

Ex-mannequin aux mœurs rock'n'roll, Carla Bruni impose son charme et son intelligence. Avec une bienveillance spontanée, Carla questionne… rit de bon cœur, s'exprime avec douceur et une joyeuse répartie. Artiste libre et accomplie, cette grande amoureuse nous revient, en-chanteuse, avec "Quelque Chose", un extrait de son album à paraître en octobre.

Carla Bruni : "Sans la musique, je ne sais pas ce que j'aurais fait de ma vie"
© Yann Orhan

Elégance et bienséance, beauté saisissante, mais pas glacée, Carla Bruni se fiche aujourd'hui d'attirer les regards... Cette ancienne top-modèle devenue musicienne n'a rien de distant, de méprisant, de froid.
Parfaite First Lady, elle a su tenir son rang et garder sa fantaisie. Douze ans après leurs noces précipitées, n'en déplaise aux médisants, Madame Sarkozy est toujours éprise de son mari. Follement. Des sentiments ardents à l'image de son désir de profiter de l'instant, de ses enfants, du souffle créatif et vibrant qui l'anime.

Ressentez-vous la fascination que vous pouvez susciter ?
Carla Bruni : Lorsque je me pose la question de "l'effet que je fais", c'est un gouffre qui s'ouvre. Curieusement, je perçois les autres, leur aura, mais ne ressens jamais rien de ce que je peux dégager. Je me cherche dans les regards, dans les expressions, mais j'ai toujours du mal à comprendre les sentiments que je provoque... Je mets donc mon énergie à essayer d'être appréciée, plutôt qu'à savoir si je le suis ou pas ! 

Comment décririez-vous le parcours qui a façonné votre personnalité ? 
Carla Bruni : Je suis quelqu'un qui a eu vraiment beaucoup de chance... et qui a su la saisir !

Quelle place a joué la musique dans votre chemin de vie ?
Carla Bruni : La musique a été un membre de ma famille, et ce, dès l'enfance avec deux parents concertistes. Avec ma carrière de mannequin, la musique est devenue un refuge incroyable. L'écouter met du baume au coeur, une mélodie vous emporte ailleurs, vous aide à surmonter les pires moments... Aujourd'hui, la musique est mon travail. Elle est omniprésente. La créer m'installe dans une bulle qui me protège de tout. Sans la musique, je ne sais pas ce que j'aurais fait de ma vie...

Quelle est la genèse du single "Quelque chose", extrait de votre prochain album ?
Carla Bruni : "Quelque chose" est une chanson de désir et d'envie. On ne sait pas précisément ce dont il s'agit… Ce flou est relatif à l'amour, c'est une danse sensuelle, une quête réjouissante... L'assertion commune "quelque chose" permet de dire à la fois tout et rien, de parler sans trop penser. Ce titre indéfini décrit pourtant dans ce morceau des sentiments profonds et excessifs. Cette imprécision confère un relief aux mots plus poétiques...

Quels sont vos plaisirs simples ?
Carla Bruni : Les choses les plus banales sont les plus précieuses. Mes plaisirs simples sonnent comme des évidences : être avec les miens, manger, lire, écrire et faire de la musique !

Vous êtes retournée récemment en studio, comment avez-vous travaillé ?
Carla Bruni : Dès que la pandémie de coronavirus nous a laissé une brèche, nous avons enregistré 15 chansons en 8 jours, rapidement, comme des fous !

"Je suis lente et très casanière par nature"

Carla Bruni  © Yann Orhan

Comment avez-vous vécu le confinement ?
Carla Bruni : Nous étions en famille, avec mon mari, ma mère, ma soeur, les enfants au cap Nègre. C'était une parenthèse agréable au sein d'une période préoccupante et anxiogène. Pour contrer l'attente, j'ai essayé de réaliser mes maquettes. Ecrire et composer a été salvateur. Cela a donné du sens au temps. Mais je dois avouer que je suis lente et très casanière par nature. Les artistes, auteurs, romanciers sont des personnes naturellement confinées car il y a toute une partie de notre métier qui impose solitude, retrait, enfermement.

Est-ce votre éducation qui fait que, même dans la tempête, vous vous montrez solaire ?
Carla Bruni : C'est une forme de pudeur… mais surtout de politesse inculquée par mes parents. L'appétit vient en mangeant, le sommeil vient en dormant... et la gaieté vient en étant joyeux. Si l'on force un peu les choses, elles nous emportent. Ce serait obscène de ma part de me plaindre, privilégiée que je suis !

"J'ai une culture d'autodidacte limitée aux choses que j'aime"

Pendant cette période particulière, avez-vous fait l'école à la maison ?
Carla Bruni : Je suis tellement mauvaise professeure que mes enfants ont voulu changer de mère ! Je ne suis pas pédagogue. Non seulement cela me rendait très nerveuse d'enseigner, mais mon niveau scolaire est proche de la grande section maternelle. Je n'ai pas assez de connaissances scolaires, j'ai une culture d'autodidacte limitée aux choses que j'aime. Ma seule qualité, c'est de rester cohérente et vraie avec celle que je suis… Bref, j'ai été sincère, mais je ne les ai pas fait progresser !

Quelles sont les peurs qui vous hantent ?
Carla Bruni : Mes enfants cristallisent mes angoisses. Depuis que je les ai mis au monde, je crains qu'il leur arrive quelque chose... Mais je suis aussi rongée par la peur que les gens meurent, la peur de ne plus voir ceux que j'aime, j'ai peur que la vie passe vite, qu'elle ne serve à rien, j'ai peur d'être seule, de ne pas réussir à soutenir mes proches ou à tendre la main aux autres, j'ai peur de la maladie, de la tristesse…

"Le souci de l'image doit consister à se plaire à soi"

Quel regard portez-vous sur votre physique ?
Carla Bruni : Je porte un regard habitué sur mon corps, mon visage, ma silhouette. Le temps passe, je ne peux rien y faire. Je m'inspecte techniquement. Je me dis que j'ai eu de la veine qu'on me considère dans les eighties comme une jolie fille, un "top-model". Tout est relatif. Au XIXe, grande et maigre, j'aurais été au cachot ! La beauté dépend des époques, des pays. Je n'aime pas l'idée qu'il faut être mince. Les Kardashian ont mis les rondeurs à la mode et les jeunes filles assument mieux leurs courbes. Avec l'âge, la beauté est encore moins une question de mensurations, c'est avant tout la grâce, la classe, l'intelligence… Oh la la, on va penser que j'ai une haute opinion de moi ! (rires)

Votre apparence n'est pas -ou plus- une priorité...
Carla Bruni : Quand j'étais jeune, paraître était davantage qu'une obsession, c'était ma profession et j'en ai fait le tour. S'habiller, se maquiller, se coiffer, chercher un bijou, simplement, pas pour séduire, pas par contrainte, je trouve que c'est un luxe charmant et accessible. Le souci de l'image doit consister à se plaire à soi. Le raffinement intime reste ainsi démocratique. 

"Je refuse de me soumettre à la brutalité de l'immédiateté"

Quel usage avez-vous du Web et des réseaux sociaux ?
Mi-professionnel, mi-personnel… mais je dois admettre que la sphère internet ne correspond pas à ma génération. Trop de flux, d'informations contradictoires... Le truc rafraîchissant qui me plaît, c'est l'échange direct avec le public… mais je constate l'extrême violence de la Toile. Je refuse de me soumettre à la brutalité de l'immédiateté. Ce n'est pas mon rythme...

Carla Bruni © Yann Orhan

Nicolas Sarkozy vous a pourtant demandée en mariage au lendemain de votre rencontre, il y a 13 ans...
Carla Bruni : C'est vrai… C'est passé en une seconde. L'amour n'est pas soumis aux règles. C'est quelque chose de miraculeux que l'on doit protéger et faire durer. Je pense que c'est l'inquiétude de perdre cette magie, ce mystère, ce secret, qui nous garde en alerte, vigilants, vivants !

Êtes-vous la même qu'à vos débuts ?
Carla Bruni : M'adapter aux situations, aux univers, aux contextes, aux succès, aux échecs... a été une constante chez moi. C'est ce qui m'a fait le plus évoluer et ce qui m'a apporté le plus de changement.

Qu'est ce qui ne changera jamais chez vous ?
Carla Bruni : Je ne pourrais pas m'adapter à quelqu'un qui méprise autrui, à la méchanceté, l'avarice, la perversion... Je ne me conformerai jamais aux aspects les plus sombres de l'espèce humaine. La vie est trop courte et belle pour accorder du temps aux personnes toxiques.