La bonne réaction à avoir si son enfant prévoit de se marier avec quelqu'un qu'on ne sent pas (voire pas du tout)
La plupart des parents appréhendent le moment où leur enfant leur présentera l'heureux élu. Mais comment intervenir lorsqu'on a des doutes sur la relation ou qu'on a des raisons de s'inquiéter ? Vincent Joly, psychologue, nous éclaire sur ce dilemme moral.
"Papa, maman, je vous présente Pierre, on vient de se fiancer, et on va bientôt se marier !" Voilà la phrase que redoutent bon nombre de parents qui sont parfois confrontés, de but en blanc, à l'annonce du mariage en même temps que les présentations. Bien souvent, les parents ont des à priori et s'inquiètent de savoir s'il sera suffisamment bien pour leur fille. "Il peut y avoir des parents qui ne s'entendent pas avec leur gendre ou leur belle-fille, mais il peut s'agir simplement d'une question de tolérance (il vient d'un autre milieu social, il ne travaille pas...). Il faut donc accepter que nos enfants fassent des choix qu'on n'aime pas une fois devenus adultes. Cela peut être désagréable, on peut être déçu, mais il faut l'accepter", nous explique Vincent Joly, psychologue.
En revanche, lorsqu'on a de bonnes raisons de se méfier de la personne, il s'agit là d'un dilemme moral. Notre fille va se marier avec un homme violent, qui a des problèmes de dépendance à l'alcool et qui peut potentiellement devenir agressif ? Il peut s'agir aussi d'une personne qui la rabaisse et qui est infidèle, malhonnête ou on peut s'apercevoir que notre enfant est sous emprise... Dans ce cas, "ça devient plus compliqué, car on va chercher à protéger notre enfant, tout en respectant sa liberté. Mais en tant que parent, il faut clarifier les choses", conseille le spécialiste qui estime que généralement, on ne s'inquiète pas pour "rien". Mais alors, comment faire comprendre à son enfant que l'on s'inquiète pour lui sans que cela se retourne contre nous ? En effet, on pourrait presque passer pour la mère ou le père qui a "tout fait" pour rompre le mariage...
Pour Vincent Joly, il faut dans un premier temps éviter de donner l'impression à son enfant que l'on va décider à sa place comme quand il était adolescent, et bien sûr ne pas juger la personne qu'il nous présente, car il faut prendre en compte qu'il a des sentiments envers lui/elle. Pour aider, il faut avant tout comprendre ses choix. "Il est important de se demander ce qu'il se passe réellement pour l'autre, de passer du temps à se poser des questions "pour de vrai", savoir ce qu'il lui arrive et pourquoi il ou elle est attaché à cet homme/femme. Il faut essayer de comprendre l'autre ou lui demander de nous expliquer la situation, pour que notre conseil soit bien entendu, car il s'agira d'un conseil qui part du cœur", recommande-t-il. Pour amener l'autre à se confier, il convient aussi d'être sincère et surtout, de ne pas se braquer. "J'ai eu une patiente dont la famille refusait catégoriquement de revoir le mari violent de leur fille. Mais cette position très tranchée ne l'a pas beaucoup aidée, car étant restée avec son époux, elle ne voit finalement plus sa famille. L'enfant doit alors faire un choix terrible entre son mari ou sa famille", nous confie le psychologue.
Une fois passés les sentiments de colère, de tristesse et à l'aigreur, on peut alors faire confiance à cette petite voix intérieure qui nous orienterait sur la manière de procéder. Peut-être inviter son enfant à dîner à la maison plus souvent avec son fiancé, aller tous ensemble au restaurant, lui écrire ou avoir une discussion sérieuse, organiser une activité en famille pour créer du lien et apaiser les tensions... ? Dans tous les cas, "il est important de réfléchir en amont et de se dire qu'il est possible que son enfant n'écoute pas notre point de vue, mais qu'on le lui dise quand même", précise Vincent Joly.
Enfin, si malgré vos échanges, votre enfant décide tout de même de se marier, le mieux que l'on puisse faire est de garder un lien pour que l'on soit encore une ressource le jour où il aura besoin de nous. "Ce qui est difficile pour les parents, c'est de se dire que les enfants grandissent et qu'on ne peut plus les protéger à leur place, on ne peut plus faire pour eux comme on le faisait encore à l'adolescence. Il faut parfois accepter de les voir faire un certain nombre d'erreurs, mais la vie, c'est aussi faire de mauvais choix, se tromper, aller dans la mauvaise direction..." conclut-il.