Bénédicte Delmas, réalisatrice engagée

DVD - Bénédicte Delmas évoque le Mouvement de Libéralisation de la Femme dans "Elles… Les filles du Plessis", disponible en DVD le 2 novembre. Après presque dix ans de travail, la réalisatrice voit son projet aboutir et récolter le succès au Festival de Luchon. Les comédiennes obtiennent la mention spéciale, Bénédicte Delmas reçoit le Prix du Meilleur Scénario et le film, le Prix du public pour la meilleure fiction unitaire.

Bénédicte Delmas, réalisatrice engagée
© France 3

Bénédicte Delmas était reine de beauté avant d'envisager la comédie. Repérée par une directrice de casting, elle incarne pendant dix ans Laure Olivier dans la série Sous le Soleil et fait d'autres apparitions à la télévision dans Navarro ou Léa Parker. Entre temps, la jeune femme s'essaie à la réalisation pour la série qui l'a révélée et Plus Belle La Vie. Dès lors, elle abandonne sa carrière de comédienne pour se consacrer entièrement au métier de cinéaste. Et elle a eu raison. Elles… Les Filles du Plessis est un pur bijou de fiction et sort le 2 novembre en DVD.

Bénédicte Delmas et Sandrine Bonnaire © France 3

Journal des Femmes : Trouvez-vous qu'il y a une régression dans la défense des droits des femmes ?
Bénédicte Delmas
: Il y a différentes prises en charge. Les filles ont beaucoup plus le choix maintenant. Les mineures tombent enceintes aujourd'hui mais pas pour les mêmes raisons qu'avant. Je ne connais pas à fond le problème mais elles voient davantage, dans le statut de mère, une identité dans une société où elles ont un peu de mal à se projeter. Ce n'était pas le cas dans les années 1970. Aujourd'hui, une jeune fille qui tombe enceinte après avoir été violée est prise en charge. On ne va pas la regarder dans les yeux en lui demandant si elle est sûre de ne pas vouloir le garder. Et il y a moins de honte : elles peuvent continuer leurs études, on ne va pas leur couper les allocations familiales, il n'y a pas cette pression.

Avez-vous eu des témoignages de femmes qui ont vécu dans ce foyer ?
Bénédicte Delmas
: J'en ai cherché mais je n'en ai pas trouvé. J'ai eu la chance d'avoir accès au foyer de la DDASS, j'avais quand même tous les noms des filles. Elles en ont changé parce qu'elles se sont mariées. Mais je pense que toutes celles qui ont été là pour des histoires sordides n'ont aucune envie d'être rattrapées par ce passé, elles s'en remettent difficilement. J'espère de tout coeur que lorsqu'elles verront le film, elles comprendront qu'on leur donne la parole quarante ans après, qu'on leur rend hommage parce qu'on a juste envie de leur dire bravo et merci. J'espère qu'elles m'appelleront.

Pourquoi avoir choisi Sandrine Bonnaire pour interpréter la directrice ?
Bénédicte Delmas
: Je trouve que c'est une actrice qui joue avec son corps. Et c'était intéressant dans un film qui met en scène des corps déformés à tous les stades, d'avoir une directrice qui soit hyper tenue. Elle est d'ailleurs très marquée à la taille contrairement aux gamines qui sont dans un débordement. Je voulais que ce soit l'inverse pour la directrice, un personnage étriqué, sec. Je me suis dit qu'il me fallait une actrice qui joue avec son corps.

Selon vous, quels sont les moments clé du film ?
Bénédicte Delmas
: Le fait divers du film, c'est la grève de la faim. Mais ce qui est intéressant, c'est ce qui va les emmener à faire cette grève. Comment elles vont se positionner ? Comment elles vont décider de refuser ce qu'on leur accorde ? Comment on se rejoint sur une même chose lorsque l'on vient de milieux différents et que l'on n'est pas forcément d'accord ? C'est toute la première partie du film. Mais il y a aussi le Mouvement de Libération des Femmes (MLF) qui a sollicité Simone de Beauvoir qui était très populaire. Des femmes du MLF sont venues à la projection et elles ont trouvé que le film était un film militant, mais dans le bon sens du terme, parce qu'on ne peut qu'être d'accord avec ses gamines.  

Vous avez été actrice. Quelle casquette préférez-vous ?
Bénédicte Delmas
: Celle de scénariste réalisatrice parce que ça me correspond plus. Je pense que ma carrière d'actrice est derrière moi. Je ne regrette rien du coup. Réaliser me satisfait pleinement et j'aime le rapport à l'équipe quand on est sur un plateau. C'est que du bonheur de diriger tout le monde.  

Est-ce difficile d'exister en tant que femme dans la réalisation ?
Bénédicte Delmas
: En télévision, c'est plus difficile. Pourtant, la réalisation c'est comme au cinéma. Tu écris, tu réalises. C'est la même chose et les femmes au cinéma font des films extraordinaires, elles sont incroyables. Elles sont 20% environ. En télévision, on est seulement 2% et je ne sais toujours pas pourquoi on ne nous fait pas confiance. Je sais qu'à partir du moment où je suis dans le tournage, je n'ai plus aucun doute. Mais avant, il faut convaincre le producteur de vous faire confiance et de vous laisser les rênes du plateau. Pour Elles… Les filles du Plessis c'est différent parce que j'ai écrit le scénario donc c'était une autre confiance. Mais il y a vraiment peu de femmes en télévision, on doit encore se battre.

Sortie en DVD le 2 novembre 2016.