Lou Doillon à Cannes : "Je ne suis pas que la fille ou la sœur de"

Lou Doillon est auteure-compositrice-interprète, elle dessine et est apparue à maintes reprises sur grand écran. Quand elle ne crée pas, elle passe par le Festival de Cannes pour donner des conférences sur la place des femmes dans la culture. L'occasion pour elle de parler famille et représentations.

Lou Doillon à Cannes : "Je ne suis pas que la fille ou la sœur de"
© Getty Images for Kering

Lou Doillon a une longue histoire avec le cinéma. Face à la caméra d'Agnès Varda dès ses 7 ans, elle tourne ensuite pour Jacques Doillon (son père), Abel Ferrara, Maïwenn… C'est donc tout naturellement que le Festival de Cannes l'a accueillie  pour prendre la parole au cours d'un Talk Women in Motion organisé par Kering.
"J'ai commencé par être actrice et mannequin, ce qui signifiait être rejetée 98% du temps en casting. J'ai senti que j'étais trop fragile pour ça. Alors par trouille de dépendre du désir des autres, je me suis construit un monde à moi, un mur de poésie." C'est ainsi que la fille de Jane Birkin s'est orientée sans s'en apercevoir vers la musique.
Interrogée sur la place des femmes dans la culture, Lou Doillon regrette son traitement médiatique, plus que sa position d'artiste féminine au sein de l'industrie musicale: "Lorsque je sors un album, la presse se sent obligée de mentionner quels hommes ont fait partie du projet. Comme si j'avais forcément besoin d'être épaulée par des 'professionnels'." Lou Doillon vient pourtant de prouver qu'elle n'avait besoin de personne pour s'accomplir, en sortant un EP auto-produit en plein confinement: Look at me now.

Les tips beauté de Brad Pitt

"On ne me questionne pas sur ma création, mais sur la manière dont je me mets au travail. Est-ce qu'on interroge Nick Cave sur ses looks ? Est-ce que l'on décrit Johnny Depp, lui aussi égérie d'une grande marque, comme un mannequin ? Est-ce que l'on demande à Brad Pitt ses tips beauté ? Non… et pourtant j'aimerais bien les avoir !, déplore avec humour l'artiste. Oui, je travaille avec l'intime, mais mes chansons sont-elles pour autant des petites choses tricotées le soir sur mes peines ? Dirait-on pareil de "Suzanne" de Leonard Cohen ? "

Lou Doillon : "Ma force vient de mes imperfections"

Lou Doillon s'estime immensément chanceuse d'avoir grandi dans une famille où femmes et hommes étaient au travail. Pas question pour autant de cantonner la fille de Jane Birkin et Jacques Doillon à sa généalogie. "Je suis la fille de, la femme de… et bientôt la mère de mon fils!", lance-t-elle ironiquement. Elle est aussi la filleule d'Agnès Varda, pour qui elle a tourné dans Kung Fu Master et qui lui a très vite appris la force de s'autoriser les choses. "S'autoriser, c'est accepter de se planter, oser sans savoir parfaitement faire, dire des conneries. J'ai compris que ma force vient de mes imperfections, que mon travail est tenu par mes angoisses."

Des femmes en guise de modèles, la nouvelle génération en guise d'espoir

A l'aube de la quarantaine, Lou Doillon se questionne toujours sur cette place qu'elle peut occuper. "Est-on autorisée à faire certaines choses seulement lorsque l'on est jeune femme ?" Elle semble néanmoins avoir trouvé la parade à ses interrogations : faire fi de ces représentations pour ne pas s'empêcher, croire à la sororité pour avancer et éduquer son fils pour espérer.


Persuadée que les questions autour des femmes doivent avant tout toucher les hommes, Lou Doillon mise sur sa progéniture, Marlowe, dont le prénom est tatouée sur son bras: "Il est très intéressé par la précarité menstruelle par exemple. Je ne pense pas qu'un jeune homme de 20 ans se penchait sur ces sujets-là il y a encore quelques années." Hallelujah, dirait Cohen.