Halima Benhamed, une BONNE MERE éblouissante

C'est son premier rôle au cinéma. A 50 ans, Halima Benhamed joue la "Bonne Mère" de Hafsia Herzi. Dans ce second film en tant que cinéaste, en salles le 21 juillet, l'intéressée lui offre le rôle d'une mère courage de Marseille qui se saigne aux quatre veines pour ses enfants. Rencontre avec une femme pétrie d'humanité.

Halima Benhamed, une BONNE MERE éblouissante
© SBS Distribution

"Tant que je suis debout, je resterai solide." C'est le mantra de Halima Benhamed. C'est aussi celui du personnage qu'elle incarne dans Bonne Mère, le second-métrage en tant que réalisatrice de Hafsia Herzi, deux ans après Tu Mérites un Amour. L'héroïne s'appelle Nora, a la cinquantaine et vit dans une cité des quartiers nord de Marseille où elle élève seule (et à bout de bras) ses enfants. " Je partage sa combativité. Elle a un peu mon caractère, c'est une battante. Les obstacles ne doivent pas être un frein mais une épreuve à dépasser ", confie la primo-actrice de 50 ans.

Halima Benhamed, à l'école de la vie

Née le 27 mai 1971 à Skikda, une commune algérienne au bord de la Méditerranée, à côté de Constantine, l'intéressée quitte son pays natal à six mois seulement. Sa mère et elle rejoignent son père, déjà installé à Toulon. "C'était un bosseur, un grand homme respectable. Il était ouvrier dans la maçonnerie et s'est beaucoup démené pour mes frères, mes sœurs et moi. Ma mère était mère au foyer, elle m'a d'ailleurs inspirée pour ce rôle", confie Benhamed. Elle en profite pour louer l'éducation stricte inculquée par ses parents, les bonnes valeurs prodiguées et ces mauvaises fréquentations qu'ils savaient si bien déceler.
Enfant, elle pratique la danse classique -la grâce avec laquelle elle se déplace à l'écran n'est donc pas un hasard- et le modern-jazz. Mais la disparition prématurée de sa maman la pousse à grandir plus vite que prévu. Elle arrête l'école pour s'occuper de la maison et de sa fratrie. "J'ai malheureusement arrêté au collège mais j'ai continué à apprendre avec la vie… Et je n'ai pas fini", lâche-t-elle d'une voix douce et posée.
Mariée et mère de trois filles (de 25, 21 et 15 ans), elle vit à Marseille depuis 21 ans. Elle y a multiplié les emplois, commençant par un poste au service d'état civil de la mairie, en passant par une fonction d'esthéticienne et, plus récemment, d'auxiliaire de vie. "Être au chevet des personnages âgés, c'est ce que j'ai préféré"  

"Être au chevet des personnages âgés, c'est ce que j'ai préféré"  

Cette humanité transparait d'ailleurs immédiatement dans Bonne Mère, dès la première séquence du film, où elle se lève tôt, avant tout le monde, pour abattre silencieusement et discrètement une montagne de tâches domestiques et professionnelles. Bouleversante et spontanée, Halima Benhamed aurait pourtant pu ne pas crever l'écran.

A la base, Halima Benhamed accompagnait sa propre fille au casting...

Quand Hafsia Herzi la voit, c'est le coup de foudre. "Au début, j'ai refusé sa proposition. Je ne voulais pas me produire devant une caméra. Je n'y arrivais pas. Mais l'échange avec Hafsia a été fort… Elle est tellement adorable et exceptionnelle que j'ai pu lui faire confiance. Peu de temps après, c'était comme si elle avait toujours fait partie de ma famille. Elle a gagné une grande place dans mon cœur: c'est une petite sœur et une fille."
Très attentionnée, Hafsia Herzi la rassure, surtout au moment du premier clap où son cœur bat la chamade. Et, de toutes les façons, la comédienne amatrice s'en remet au mektoub...

Pour cette Bonne Mère, "le hasard n'existe pas"

Il fallait qu'elle passe par cette étape, qu'importe les questions soulevées en elle et la peur de ne pas être à la hauteur des espérances. "Les caméras ont réussi à s'effacer et je suis rentrée dans le personnage de Nora comme si j'étais seule dans la pièce", se souvient-elle. Il y a aussi (et surtout) ce désir de célébrer la maman. "Je rends un hommage à toutes les mères. Nora les représente toutes, sans exception." Elle incluse. Car, comme beaucoup, elle essaye tous les jours de rester une bonne mère, capable d'incarner tour à tour la tendresse et la fermeté, même si deux de ses filles sont largement majeures.

Halima Benhamed dans "Bonne Mère". © SBS Distribution

Au-delà de la parenthèse enchantée du Festival de Cannes, où elle a présenté le film au Certain Regard au début du mois, Halima Benhamed est très vite retournée à sa vie de tous les jours.
"Je suis très simple et j'aime tout ce qui est simple. Je retiens de ce film que je me suis redécouverte. Je ne me pensais pas capable de faire ça. J'ai retrouvé une confiance en moi au niveau intérieur. L'aventure a été tellement enrichissante, c'est un souvenir qui restera gravé en moi jusqu'à la fin de ma vie." Nous, en tout cas, on espère que le cinéma fera de nouveau appel à elle. Et vite.