Maryam Touzani réussit ses premiers pas de cinéaste avec ADAM

Avec "Adam", récit touchant de deux solitudes qui se rencontrent, la marocaine Maryam Touzani fait sa première entrée au Festival de Cannes, dans la catégorie "Un Certain Regard". Vu et approuvé !

Maryam Touzani réussit ses premiers pas de cinéaste avec ADAM
© Anthony Harvey/REX/SIPA

Après avoir collaboré à l'écriture de Much Loved et Razzia (dans lesquels elle joue également), avec son mari et cinéaste Nabil Ayouch, la ravissante Maryam Touzani a ressenti le besoin de passer à son tour derrière la caméra pour raconter une histoire ayant germé en elle pendant sa grossesse. Celle de deux femmes seules dont les destins abîmés se croisent au cœur de la bouillonnante Médina de Casablanca. D'un côté, Abla, mère veuve d'une fillette de huit ans qui tente d'oublier son deuil en préparant des pâtisseries. De l'autre, Samia, une jeune femme enceinte et désœuvrée qui cherche du travail. Si la première rencontre vrille et les mots sont d'abord friables, les atomes se rejoignent bientôt pour, peut-être, éteindre les plaies vivaces.

Un regard sensible sur la maternité

Soutenues par les prestations impeccables de Lubna Azabal, popularisée par Incendies de Denis Villeneuve, et Nisrin Erradi, ces deux héroïnes n'ont aucun mal à s'adjuger, très rapidement, notre empathie. Sans misérabilisme sentimental ou émotionnel, Touzani nous accompagne au creux de leurs secrets, de leurs peurs, tentant par les gestes et les silences de nous faire comprendre ce qui les unit et les désunit, ce qui draine en elles l'espoir ou le désenchantement. Adam est un film du détail, en vase clos, en huis clos, où les rituels domestiques deviennent graduellement le ciment d'une possible résurrection, d'un hypothétique rayon de soleil là où l'obscurité a tout plâtré.

Premier film qui se tient de bout en bout, enjolivé par la lumière si naturaliste et picturale de Virginie Surdej (Une famille syrienne, Razzia, Much Loved…), Adam séduit aussi par sa peinture de la sororité et, surtout, de la maternité. C'est en effet dans le dilemme qui habite Samia, prisonnière de son propre corps et de l'enfant qu'elle s'apprête à expulser dans un monde où les cartes en main sont désespérantes, que le long-métrage emprunte toute sa sève.
Il y a là une humilité dans la proposition et une sincérité dans le propos qui apportent de la véracité au projet. Non seulement Maryam Touzani maîtrise son sujet mais, en plus, elle s'impose comme une cinéaste à suivre, dotée d'un regard sensible sur les femmes, le monde et, par extension, -puisque c'est ça dont il est question avant tout-, sur la vie. 

Adam de Maryam Touzani, avec Lubna Azabel, Nisrin Erradi, Hasna Tamtaoui. Prochainement au cinéma.