Rencontre à Cannes avec Idir Ben Addi, LE JEUNE AHMED des Dardenne

Il est "Le Jeune Ahmed" des frères Dardenne, excellent sous les traits d'un adolescent radicalisé qui commet l'irréparable. Idir Ben Addi, 13 ans, fait une entrée fracassante au cinéma avec ce drame choc, en lice pour la Palme d'Or et en salles le 22 mai.

Rencontre à Cannes avec Idir Ben Addi, LE JEUNE AHMED des Dardenne
© Copyright Christine Plenus

Sur la terrasse cannoise de Diaphana, le distributeur du Jeune Ahmed, Idir Ben Addi s'avance timidement et prend les frères Dardenne dans les bras. Des retrouvailles joyeuses, plusieurs mois après le dernier clap d'un film choc pour lequel les cinéastes belges l'ont transformé en ado fanatisé. "Franchement, ça fait bizarre d'être là. Mais je me dis que je vais juste monter des marches, un peu comme un escalier pour aller quelque part ", confie-t-il avec toute l'innocence du monde. Ce qu'il ignore peut-être, c'est que de grands acteurs n'ont jamais eu ce privilège à l'affiche d'un film en compétition.  

Du foot au cinéma

Né le 17 novembre 2005 dans la commune d'Ixelles en Belgique, Idir Ben Addi  a voulu être acteur grâce à sa sœur, de trois ans son aînée. "Je recopiais à chaque fois ce qu'elle faisait. Du coup, quand elle a fait du théâtre, je me suis inscrit à l'académie des Pagodes de Bruxelles et ça m'a plu", raconte-t-il, amusé. Pourtant, ni son père, chirurgien, ni sa mère, diplômée en socio-anthropologie, n'ont embrassé de carrières artistiques. "En vrai, ma mère fait le plus beau des métiers : elle nous éduque et cuisine pour nous. On ne pense pas assez à remercier nos mamans pour ça. Alors merci à la mienne ! "
Outre le cinéma, Idir, "comme presque tous les garçons ", adore le football. Il a joué dans divers clubs et adorerait vivre une trajectoire à la Cristiano Ronaldo. "Sauf que je ne suis plus trop fan de lui depuis qu'il a quitté le Real. Neymar m'agace aussi par son attitude. J'aime bien Marouane Fellaini parce qu'on a les mêmes cheveux ", ajoute-t-il en éclatant de rire. A l'école, forcément, il adore le sport autant qu'il déteste le latin, "matière qui ne sert à rien ". Et quand il rentre à la maison, il n'y a pas Netflix. Refus des parents. Rien d'insurmontable pour l'intéressé, qui préfère le "vrai monde aux écrans ". D'ailleurs, sa maman confisque régulièrement son smartphone et son compte insta est géré par sa tante.  

Après les Dardenne, Avengers ?

Quand on évoque le cinéma, il dit volontiers qu'il ne connait rien aux films d'auteur. Lui préfère nettement les Avengers "et ces trucs basiques que tout le monde aime parce que ça fait rêver ". Pourtant, c'est dans l'épicentre du cinéma d'art et d'essai qu'il entame sa carrière avec Le Jeune Ahmed des frères Dardenne, qui l'ont choisi sur une centaine de candidats. "Mes parents ne m'ont confirmé la bonne nouvelle qu'au moment des essayages. J'avais passé trois essais avant." Du duo belge, il n'a vu qu'un film : Deux jours, Une Nuit avec Marion Cotillard. "J'ai aimé, c'était bien. Les films d'auteur, ça veut toujours dire quelque chose et, à la fin, ça te fait réfléchir ". S'il incarne à l'écran un adolescent gangrené par l'intégrisme religieux, sur le plateau, c'est la fête. Idir voit cette expérience comme un formidable espace de jeu et d'apprentissage.

"Le plus dur, c'était de ne pas grossir : ça a été mon plus gros problème. La table de la régie était constamment pleine de bouffe. Il y avait des sucreries, du Coca et tout ", lâche-t-il les yeux brillants. Et d'ajouter que les Dardenne sont "hyper gentils et mettent directement en confiance". Fan de Jamel Debbouze, qui, selon lui, a de la chance de faire plein de comédies, le jeune homme entend profiter de son séjour cannois pour voir Les Misérables de Ladj Ly, "parce que c'est un film qui parle de la société, de maintenant. " Et, si possible, il ne dirait pas non à un prix. "Il paraît que la Palme d'Or, c'est le meilleur truc à recevoir ". C'est tout le mal qu'on lui souhaite. 

Le Jeune Ahmed de Jean-Pierre et Luc Dardenne avec Idir Ben Addi, Claire Bodson, Olivier Bonnaud. En salles.