Rencontre avec Jordana Spiro: " Long Way Home est assurément féministe"

L'actrice Jordana Spiro signe son premier film en tant que réalisatrice avec "Long Way Home", en salles. Le Journal des Femmes a eu la chance de rencontrer la cinéaste de passage à Paris pour la sortie du long-métrage, dans un magnifique bar du XVIIe arrondissement. Une discussion passionnante et résolument féministe.

Rencontre avec Jordana Spiro: " Long Way Home est assurément féministe"
© LONG WAY HOME - Condor Distribution

Jordana Spiro est née en 1977 à New York et a étudié l'art dramatique au Circle in The Square de New York et à la Royal Academy of Dramatic de Londres. Son visage vous est peut-être familier... car l'actrice est apparue dans de multiples séries télévisées : Buffy contre les vampires, Les Experts : Manhattan, Dexter, The Good Wife ou encore Ozark. Aujourd'hui, la comédienne est fière de présenter sa première production cinématographie, son film Long Way Home, qui sort le 13 février 2019 en salles. Un long-métrage émouvant qui raconte les liens familiaux et la jeunesse défavorisée, d'une façon réaliste et poignante. Le film a d'ailleurs déjà été récompensé par le prix du jury au Festival du Cinéma Américain de Deauville.  À l'image de Long Way Home, Jordana Spiro est d'une beauté pure et d'un franc-parler sincère et touchant. Elle prend le temps de la réflexion pour répondre à chacune de nos questions de manière appliquée et impliquée. Rencontre. 

Le Journal des Femmes : Pouvez-vous parler de votre passé professionnel en tant qu'actrice ?
Jordana Spiro :
J'adore ce métier et je le pratique d'ailleurs toujours... Je me suis simplement aperçue, après 10 ans de carrière, que les rôles donnés aux femmes restaient relativement limités. Je pense que cela montre la perception que les hommes ont de la gent féminine... et c'est dommage. Jouer est ma passion, mais j'avais besoin d'un équilibre dans ma vie.

Pourquoi avez-vous décidé de vous lancer dans la réalisation ?
Jordana Spiro :
Je voulais changer quelque chose dans mon métier, notamment parce que j'éprouvais un sentiment de frustration, mais je ne savais pas comment faire... Alors, je me suis posée la question suivante : "Qu'est ce que tu aimes vraiment" ? Et la réponse est : la photographie. Je me suis donc concentrée sur cette discipline et j'ai commencé à voir les films avec un autre regard. C'est à ce moment que j'ai décidé de me lancer dans la réalisation !     

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© Long Way Home - Condor Distribution

 Dans Long Way Home, vous parlez d'une jeunesse livrée à elle-même. Pourquoi avoir choisi d'aborder ce sujet sociétal  ?
Jordana Spiro : Quand j'ai commencé à chercher un sujet, je me suis interrogée sur le genre d'histoire que je voulais raconter pour mon premier film. D'abord, j'ai pensé à un personnage de caractère qui avait beaucoup à dire et en même temps, je commençais à faire du bénévolat dans une association humanitaire. Cette expérience a été déterminante : j'ai pu voir la misère se développer lorsque les aides du gouvernements cessent. Dès qu'un jeune atteint la majorité, il est lâché dans la nature et plus personne ne s'en soucie... 

Pourquoi avoir choisi deux femmes comme personnages principaux ?
Jordana Spiro : Je suis sans aucun doute féministe. L'une des raisons initiales qui m'a poussée à faire ce film est le fait que l'on attribue trop peu de rôles forts aux femmes, dans le cinéma. Pour autant, je ne ressens pas une responsabilité qui me pousserait à ne faire que des films avec des femmes, mais pour ma première production, c'était important pour moi. La plus jeune actrice, Tatum Marilyn Hall, avait neuf ans au moment du tournage. Pour son rôle, nous avons auditionné environ 700 petites filles, pendant des mois ! Elle est apparue comme une évidence, au moment où nous l'avons rencontrée. Je connaissais déjà la seconde actrice, Dominique Fishback. Nous avions joué ensemble dans une série TV. Un jour, j'ai été la voir à son One Woman Show et elle m'a bluffée !

Comment votre féminisme se manifeste-t-il dans votre travail ?
Jordana Spiro :
C'est difficile à expliquer car je pense que c'est naturel chez moi... Il est important que mon travail reflète ce qu'il y a dans mon cœur et dans mon âme. Ce n'est pas pour cela que tout doit être tragique ou sentimental dans mes films, mais je veux toujours pousser le spectateur à remettre les choses en question. C'est ma manière d'être engagée. 

Selon vous, pourquoi les lectrices du Journal Des Femmes devraient-elles absolument aller voir votre film en salles ?
Angel, le personnage principal, reste forte malgré les difficultés : c'est un exemple pour toutes et tous. Quand la vie devient difficile, il est plus facile de s'isoler et d'abandonner. Avec Long Way Home, je voulais montrer que ce n'était pas la bonne solution. Quand on traverse une mauvaise passe, il faut faire un pas vers les autres. Ce film est loin du cinéma hollywoodien où tout est fantastique, mais il nous apprend que lorsqu'une tragédie se produit, il faut toujours avancer, la tête haute.