Kyan Khojandi, c'est l'histoire d'un mec gentil

Dans le premier long métrage de Julien Rappeneau en salles le 23 mars 2016, Kyan Khojandi est Vincent Machot, un jeune coiffeur englué dans une vie plan-plan jusqu'à sa rencontre avec la mystérieuse Rosalie Blum. Un personnage qui a replongé l'acteur dans les méandres de sa jeunesse. Il se raconte.

Kyan Khojandi, c'est l'histoire d'un mec gentil
© SND
Kyan Khojandi est Vincent Machot dans Rosalie Blum de Julien Rappeneau © SND

"Ça vous ennuie si je m'assieds sur le côté, c'est un peu mon acte de rébellion" nous demande le très souriant Kyan Khojandi alors qu'il prend place dans un fauteuil style Louis XVI, pieds sur les accoudoirs. L'acteur que l'on a découvert et adoré dans Bref dégage une simplicité et une bonhomie naturelles qui nous donnent envie de lui taper sur l'épaule et mettre nous aussi, les pieds sur les accoudoirs... Au diable le chic du Meurice Palace ! Sa vraie révolte, il l'a faite à 21 ans. Ce n'est pas une Rosalie Blum qui lui a soufflée, mais la scène. A l'instar de son personnage Vincent Machot qui ressent le besoin compulsif de suivre la mystérieuse épicière, Kyan Khojandi a suivi le théâtre jusqu'à Paris. "Un déclic" qui le fait sortir des rails tous tracés de ses études de droit qui l'auraient conduit jusqu'au métier d'avocat. "En étant heureux, on donne de l'énergie aux autres", nous dit-il, pour sa défense. Bienveillant, l'acteur de 33 ans nous demande si notre métier de journaliste nous épanouit. Une attention délicate et touchante. On comprend pourquoi Julien Rappeneau l'a choisi pour interpréter le tendre Vincent Machot. Bref, Kyan Khojandi est vraiment sympa.   

Le Journal desFemmes : Qui est Vincent Machot votre personnage ? 
Kyan Khojandi : Un jeune coiffeur qui a repris le salon familial après le décès de son père. Il habite l'étage en dessous d'une mère particulièrement envahissante. Il a un chat. Il se complaît dans une zone de confort car on lui a toujours répété que c'était la vie, "c'est comme ça". Il s'est construit sur le non choix. Il est en veille car il ne sait pas ce qu'est le bonheur. Il va le découvrir grâce à Rosalie Blum, la femme qu'il se met à suivre. Sa réaction est impulsive et inconsciente à la fois.

Vous dites que ce personnage, c'est un peu vous... 
A 21 ans, je vendais des tapis dans la boutique de mon père en parallèle de mes études de droit. J'allais être avocat, j'avais une vie correcte, une famille. Je n'avais pas de problème particulier. Et puis j'ai rencontré le théâtre qui m'a emmené jusqu'à Paris et qui m'a fait prendre conscience ce qu'était le bonheur. J'ai découvert que je voulais faire de la scène tous les matins en me levant.

Avez-vous eu peur ?
C'était effrayant de me dire que j'étais un petit gars de Reims qui voulait être acteur. Plein de gens me demandaient pourquoi je voulais faire ça d'ailleurs. Mais il ne faut pas s'arrêter à ça. Quand on se lance on est tellement dans une évidence qu'on se demande pourquoi on n'a pas sauté le pas avant. La comparaison est un peu hasardeuse mais souvenez-vous quand on a arrêté la cigarette dans les bars. Au début on disait "non mais attends c'est pas possible, c'est notre liberté" et maintenant que nos pulls sentent bons quand on se lève, on se dit "ah ouais c'est cool en fait". Il faut chasser la peur, la petite voix qui te dit le matin "eh mais on est bien là, petit café, hop je me recouche devant un DVD ou mon mur Facebook". La peur, le doute disparaissent très rapidement à partir du moment où l'on fait ce qu'on aime.

Vincent et Aude paraissent bloqués dans leur vie. Pensez-vous que ce soit propre à une génération ? 
C'est vrai que dans notre société, à 18 ans on nous répète de faire des choix ce qui revient à choisir à notre place. A 18 ans j'aurais aimé qu'on me demande plutôt si j'avais eu mon déclic, celui pour lequel on est prêt à s'investir dans quelque chose qui nous plaît. Cela dit, la révélation ne se passe pas toujours à cet âge car nous ne sommes pas constants. On peut aimer le théâtre pendant 10 ans puis tout avoir envie d'arrêter pour faire quelque chose de complètement différent.

Le déclic dont vous parlez est parfois annihilé par une famille envahissante, comme la mère de Vincent dans le film... 
Leur relation repose sur la culpabilité qui n'est pas particulièrement fournisseur de bien-être ! On aide mieux sa famille quand on est heureux. Quand j'ai arrêté mes études de droit, mes parents, immigrés venus en France pour que nous fassions des études, ont eu du mal à comprendre. Mais je ne regrette rien car je n'aurais jamais pu autant aider ma famille si je n'étais pas heureux. Pour être au service des autres, il faut d'abord s'accomplir soi. C'est ce qui est en filigrane dans le film. En étant heureux, on donne de l'énergie aux gens.

Quelle est la chose la plus folle que vous ayez faite par amitié ? 
Tout ce que j'ai fait avec mes potes c'était toujours un peu fou. C'est le symbole même de l'amitié, l'excitation de faire des choses imprévues. Ce que j'adore avec mes amis aussi, c'est l'ennui. Dans Rosalie Blum, Aude et ses amies savent s'ennuyer ensemble. Avec des amis, on doit pouvoir être capable de s'ennuyer.

Comment expliquez-vous votre désir de lumière ? 
C'est ma pensée que j'essaie de montrer, pas moi. Je ne recherche pas la lumière mais à partager mes idées, mon imaginaire. Cela dit c'est hyper agréable d'être reconnu dans la rue. C'est comme un massage de l'âme. Les gens sont bienveillants avec moi. Décrocher un sourire dans le métro c'est un pouvoir incroyable, c'est magique.

Qu'est-ce qui vous donne la gouache ? 
Entreprendre des choses nouvelles. Dès que je sais faire, je m'ennuie. Mon nouveau spectacle est très excitant par exemple parce que j'aborde des sujets hyper tabous, des choses dont je n'avais jamais parlé parce que je n'en suis pas fier. Le fait d'en parler créé un contact avec le public que je n'avais jamais eu auparavant.

Quel dessein nourrissez-vous pour votre carrière ? 
Je n'ai pas trop de carrière je vous avoue. J'espère juste continuer à faire ce que j'aime et j'espère que le public sent que j'essaie de faire de mon mieux. Cela prend du temps de se renouveler et je m'excuse si les gens trouvent ça long. Mais ça m'attristerait de ne pas les stimuler comme j'aurais souhaité l'être à une époque où j'étais un peu dépressif. Si ma manière de raconter des blagues peut aider des gens qui souffrent, c'est jackpot.

Avez-vous un bon coup de crayon ? 
Je suis complètement naze, ça fait 20 ans que j'essaie de dessiner un Dragon Ball Z et je n'y arrive toujours pas... Pourtant, c'est ma came lourde avec Olive et Tom. Et Les Chevaliers du Zodiaque, je les ai tous à la maison.

Le cousin de Vincent utilise des expressions complètement désuètes. En avez-vous une dans votre répertoire ? 
J'essaie de relancer "être dans la panade" et le mot "plouc". J'adore la confusion que ça crée quand tu dis ça à quelqu'un sans animosité, de manière très simple : "t'es pas un peu plouc toi ?". "Queplou" en verlan !

Voir aussi :

Affiche de Rosalie Blum en salles le 23 mars 2016 © SND