Emma Terebo, policière et athlète de haut niveau : "Les Jeux approchent et on a tous envie de savoir si on sera de la partie"
À 25 ans, la nageuse néocalédonienne Emma Terebo s'apprête à prendre part aux championnats de France de natation qui se dérouleront à Chartres, du 16 au 21 juin 2024, dans l'espoir de décrocher son billet pour les Jeux olympiques de Paris.
Alors que le coup d'envoi des Jeux olympiques de Paris 2024 sera donné dans moins de deux mois, nombre d'athlètes ne savent pas encore s'iels participeront à la fête. Parmi elleux, les nageur-euse-s français-es dont le sort sera scellé aux championnats de France de la discipline, entre le 16 et le 21 juin prochain. Emma Terebo, 25 ans, sera au départ du 100 m dos.
Journal des Femmes : Comment avez-vous commencé la natation ?
Emma Terebo : Je suis née en Nouvelle-Calédonie. Comme de nombreuses personnes, j'ai commencé la natation, car mes parents souhaitaient que je sache nager vers l'âge de 2 ans. On m'a inscrite au Cercle des nageurs calédoniens et c'est rapidement devenu un plaisir. J'y retrouvais mes ami-e-s après l'école, on partait en stage, en compétition… Je me suis essayé à d'autres sports comme la danse, le crossfit, les sports de glisse… Mes parents ont toujours été sportifs, ils ne faisaient pas de haut niveau, mais iels touchaient un peu à tout. C'est comme ça que j'ai été élevée.
Qu'aimez-vous le plus dans votre sport ?
La compétition ! J'adore l'adrénaline, ce moment où il faut nager plus vite que tes adversaires. La vie a fait que je me suis retrouvée à faire de la natation car j'étais performante dans cette discipline. Mais je pense que si j'avais pratiqué un autre sport, j'aurais aussi tout tenté pour faire de la compétition à haut niveau.
Vous avez connu une première partie de carrière dans les catégories jeune, puis aux États-Unis où vous avez poursuivi vos études...
Oui, j'ai eu mes premières sélections en équipe de France tôt, vers 2014, pour les championnats d'Europe et les Jeux olympiques de la jeunesse. C'est arrivé sans que je le veuille vraiment. Le haut niveau était un monde totalement inconnu pour moi. Comme j'habitais encore en Nouvelle-Calédonie, je ne participais pas toujours aux compétitions nationales. J'étais un peu à l'écart. Puis j'ai obtenu mon baccalauréat en 2016 et la natation a été mon billet d'entrée pour aller étudier aux États-Unis. J'ai obtenu une bourse et j'ai suivi un cursus dans une école de droit, en relation internationale et économie. L'idée n'était pas de nager plus vite, mais simplement de devenir bilingue et de découvrir une autre culture.
À votre retour en France après avoir obtenu votre licence, vous aviez pour projet d'arrêter la natation.
J'ai eu mon diplôme en avril 2021 et j'avais envie de faire une dernière compétition avant de raccrocher définitivement. La natation m'avait déjà apporté bien plus que ce que je ne pouvais espérer. Les championnats de France avaient lieu quelques semaines plus tard. Mon entraîneur américain n'ayant pas pu venir avec moi, j'ai cherché un groupe avec qui passer les quelques jours précédant la compétition. Et c'est comme ça que j'ai été accueillie à l'INSEP, dans le groupe de Michel Chrétien. Pendant dix jours, je me suis entraînée avec ses athlètes et tout s'est très bien passé. J'ai finalement terminé sixième de la finale du 100 m dos cette année-là. Ce qui n'est vraiment pas extraordinaire ! Mais pendant la compétition, Michel Chrétien est venu me voir pour me dire que si j'avais encore la motivation et l'envie de continuer à nager, il m'accueillerait l'année suivante à l'INSEP. Il m'a aussi dit très clairement que si je travaillais avec lui, je serais aux championnats du monde avec l'équipe de France l'année suivante. Moi qui pensais partir en Australie pour faire un master, cela a bouleversé mes plans. Lorsque quelqu'un comme lui te dit que tu peux le faire, tu as envie d'y croire et de lui faire confiance. Je ne voulais avoir aucun regret.
En 2022, vous êtes finaliste des championnats du monde sur 100 m dos. Cette course a-t-elle changé quelque chose à vos ambitions ?
Complètement. En un an, je suis passée de sixième en finale des championnats de France à cinquième des championnats du monde. Ce n'est pas pareil. Ça a changé ma perception des choses : pour la première fois, j'ai cru en ma capacité à obtenir une sélection pour les Jeux olympiques de Paris. Si cette compétition avait été un échec, je me serais arrêtée là, sans regret.
Pour tous les nageurs français, la qualification aux Jeux olympiques se jouera lors des championnats de France à Chartres (du 16 au 21 juin 2024). Comment vous sentez-vous à quelques jours de cette échéance ?
Un peu stressée, mais impatiente. On a tellement entendu parler de cette sélection, les Jeux approchent et on a tous envie de savoir si on sera de la partie. Mais je suis confiante. J'ai hâte de performer à mon meilleur niveau.
Comment imaginez-vous ces Jeux olympiques à domicile ?
Comme le résultat de toutes mes années de travail et comme une immense fête, car des Jeux à la maison, ça n'arrive qu'une fois dans une vie. Je suis heureuse de savoir que je suis au bon endroit, au bon moment, et que je me suis entraînée dur pour réaliser ce rêve.
À quoi ressemble l'une de vos journées d'entrainement ?
Du lundi au vendredi, je m'entraîne deux fois par jour, une fois le matin et une fois le soir. Chaque séance de natation dure entre 1h30 et 2 h. Il faut ajouter à cela de la musculation trois fois par semaine et de la préparation physique les deux autres jours. J'ai aussi une séance de natation le samedi et je suis en repos le dimanche. Je suis interne à l'INSEP, je passe toute ma vie là-bas (rires).
Vous êtes également membre de l'équipe police nationale composée d'athlètes de haut niveau depuis 2022.
C'est une vraie chance pour moi. Iels sont là pour me soutenir. On échange beaucoup, on regarde aussi ce que font les autres athlètes dans leurs disciplines respectives. Ça me donne l'impression de faire partie de quelque chose de plus grand, d'un groupe avec des personnes et des valeurs qui me ressemblent. On a déjà eu un stage de formation et nous avons parfois des regroupements pour parler de l'accompagnement d'après-carrière. Je suis aussi policière réserviste. Je peux faire des vacations si j'ai le temps et l'envie. Mais pour le moment, je reste concentrée sur mes objectifs sportifs.
Qu'est-ce que le sport a apporté à votre vie ?
Des voyages, des rencontres, des souvenirs, une bonne santé, une manière de me dépenser au quotidien… Mais plus que tout, j'adore la manière dont le sport a construit ma personnalité. Je ne serais pas la même sans sport dans ma vie et je suis fière de ce que cela m'a appris. J'espère pouvoir retransmettre ces valeurs après la fin de ma carrière, mais aussi les utiliser dans le monde professionnel.