HitsuBlu, drag queen professionnelle, dévoile les coulisses méconnues du métier : "On dit que c'est bien payé mais..."
Derrière les paillettes et les projecteurs, le métier de drag queen est loin d'être aussi facile qu'il en a l'air. Florian, alias HitsuBlu, lève le voile sur les coulisses d'un art aussi exigeant que méconnu.
Du haut de son 1,92 mètre, Florian ne passe pas inaperçu. Mais si les têtes se tournent sur son passage, ce n'est pas seulement à cause de sa taille. Talons hauts, chevelure radieuse, maquillage travaillé à l'extrême et robes extravagantes... Florian joue des codes de la féminité avec aisance grâce à son personnage de drag queen qu'il a nommé HitsuBlu. Être drag queen, pour lui, c'est bien plus qu'un déguisement. C'est l'art de se transformer, d'amplifier les genres, de jouer avec les apparences pour mieux exprimer ce qu'on est – ou ce qu'on a envie d'être – le temps d'un show.
Tout a commencé à 16 ans, lorsqu'il découvre les possibilités infinies du maquillage : "J'ai toujours trouvé ça hyper intéressant de pouvoir modifier son visage, de pouvoir l'exprimer différemment", confie-t-il. Quelques années plus tard, le déclic se produit devant un épisode de RuPaul's Drag Race, l'émission culte venue des États-Unis qui propulse l'art du drag sous les projecteurs. "Je suis tombé amoureux de l'émission. Je trouvais ça génial", se remémore-t-il.
Comme beaucoup d'artistes drag, HitsuBlu a fait ses premières armes sur les scènes ouvertes. "Généralement, tu commences par des scènes libres où tu n'es pas payée et où tu peux te permettre de te tromper, d'expérimenter", explique-t-elle. Au début, elle commence par le lip-sync, c'est-à-dire l'art de mimer les paroles d'une chanson en parfaite synchronisation avec la musique. "Généralement, on commence par ça en premier. ça permet, quand t'as peur, de te cacher derrière le son" puis de préciser qu'il existe aussi des artistes drag qui chantent pour de vrai - c'est par exemple le cas de Piche - , font des sketchs comiques ou se lancent dans des numéros d'effeuillage.
Avec le temps, HitsuBlu a gagné en assurance, et les opportunités professionnelles se sont enchaînées. Aujourd'hui, elle se produit dans des shows rémunérés, avec des performances travaillées au cordeau. Mais derrière le strass, le drag reste un véritable investissement, bien au-delà du simple moment sur scène. HitsuBlu imagine elle-même ses tenues, qu'elle fait fabriquer par des artisans français dans un esprit quasi couture. "Du coup, les costumes, ça peut coûter très très cher. Je dirais entre 500 et la plus chère que j'ai dû payer, ça devait être à 2500 euros", confie-t-elle. Pour limiter les coûts, elle réalise également toutes ses perruques, un savoir-faire qu'elle met au service d'autres drag queens, y compris certaines passées par Drag Race France.
La rémunération, elle, reste modeste par rapport à l'investissement demandé. "On est rémunéré environ à 150-200 euros sur la soirée", précise-t-elle. Un montant qui peut sembler correct pour quelques minutes sur scène… sauf qu'il ne reflète en rien le travail colossal en amont. "La soirée, ça comprend toute la préparation avant, et les gens ne le voient pas. Souvent, on dit que c'est bien payé pour trois minutes de show… mais les gens ne voient pas les heures d'entretien, de répétition, de création qu'il y a derrière", souligne-t-elle. Car au-delà du temps passé, c'est aussi une charge mentale permanente. "Tu n'es pas rémunérée pour le temps que tu prépares. C'est vraiment sept jours sur sept, 24 heures sur 24 dans ta tête", ajoute-t-elle.