Mort d'Olivier Metzner, ténor du barreau

Homme de Droit, immense figure de la justice, avocat pénaliste de génie, Olivier Metner n'est plus. Son corps s'est échoué dimanche matin sur la plage de l'île privée de Boëdic (qu'il avait acquise en 2010), laissant la profession sous le choc.
Une lettre évoquant sa volonté de mettre fin à ses jours a été retrouvée chez lui. Une autopsie doit avoir lieu aujourd'hui.
Issu d'un milieu modeste, ce fils d'agriculteurs normands, né le 22 novembre 1949, était inscrit au barreau de Paris depuis 1975.
Rompu à la recherche de failles juridiques dans un dossier, Me Metzner a pris part à la plupart des procès qui ont éclaboussé le monde politique comme celui des faux électeurs du 3e arrondissement de Paris ou des écoutes de l'Élysée. En 2009, il a rejoint la défense de Dominique de Villepin dans le procès Clearstream et obtenu sa relaxe. Plus récemment, il représentait dans la saga Bettencourt la fille de l'héritière de L'Oréal, Françoise Bettencourt-Meyers.
Son domaine de prédilection était le droit pénal des affaires. Plusieurs grandes entreprises s'étaient attachées ses services: il était le défenseur historique de Bouygues, représentait l'organisme de certification maritime Rina dans le dossier de l'Erika, ainsi que la compagnie Continental pour le crash du Concorde. Il a par ailleurs bataillé face à la Société générale en étant le conseil de l'ancien trader Jérôme Kerviel.
Me Metzner était également l'avocat de l'ancien P-DG d'ELF, Loïk Le Floch-Prigent et de Jacques Crozemarie, condamné pour avoir pioché dans les caisses de l'association qu'il présidait, l'Arc.
Cet amateur d'art contemporain défendit également lors de son procès tenu à Vilnius le chanteur de Noir Désir, Bertrand Cantat, condamné pour la mort de l'actrice Marie Trintignant. Parmi ses clients, figuraient aussi l'ancien patron de Vivendi Jean-Marie Messier, le berger corse Yvan Colonna, l'ex-dictateur panaméen Manuel Noriega, ou encore de Rachida Dati.

Fumeur de Havanes. Olivier Metzner était parfois pris de quintes de toux qui n'étonnaient ni ses confrères ni les journalistes, lesquels le connaissaient depuis des années comme un grand amateur de cigares, qu'il appréciait aux suspensions d'audience, en haut de l'escalier monumental du palais de justice. Fatigué, peut-être, il avait toutefois son habituel regard malicieux au-dessus de ses demi-lunes.

Son associé, Emmanuel Marsigny, qui travaillait depuis 20 ans avec lui, a rendu hommage à "sa passion de défendre". "Il est triste que quelqu'un d'aussi talentueux que lui n'ait pas réussi à trouver les ressources pour se défendre de lui-même et contre lui-même", a ajouté Me Marsigny.
Tous décrivent un homme totalement consacré à son travail mais également solitaire et secret. "Cela faisait 40 ans que l'on se côtoyait et je ne savais pas grand chose de lui", a dit l'ancien bâtonnier, Me Jean-Yves Le Borgne.

Star des prétoires, ses affaires l'avaient exposé médiatiquement et plusieurs de ses déclarations cinglantes lui avient valu de solides inimitiés, notamment celle d'une autre légende du barreau Me Georges Kiejman. L'avocat et ancien ministre s'est déclaré "abasourdi" par l'annonce de son décès. "Sa disparition me surprend et me choque", a-t-il dit sur Europe 1. "J'avais une admiration intellectuelle pour lui mais ça ne m'empêchait pas de croire, à tort apparemment, que peut-être il pouvait manquer de coeur et de sensibilité. Tout à coup, les conditions de sa mort me permettent de réexaminer tout ça (..) Ce colosse que je voyais comme tel avait lui aussi ses fragilités..."