(Brûlez) Molière : qui était vraiment Jean-Baptiste Poquelin ?

On le connaît grand écrivain, proche du Roi-Soleil et de la cour. Sa mort sur scène est aussi mythique que celle d'un héros grec. Mais qui était réellement Jean-Baptiste Poquelin ? À l'occasion de la 31e édition des Molières, diffusée le 13 mai 2019 sur France 2, revenons sur la vie et l'oeuvre de cette figure de la culture française.

(Brûlez) Molière : qui était vraiment Jean-Baptiste Poquelin ?
© World History Archive/ABACA

Superstar avant l'heure, Jean-Baptiste Poquelin, mondialement connu sous le pseudonyme de Molière, est le fils aîné d'un riche marchand de tapisseries parisien. Il fait ses études au Collège de Clermont à Paris, actuel lycée Louis le Grand. Chez les Jésuites, le jeune garçon fait l'apprentissage du théâtre en latin. C'est donc tout naturellement qu'il se tourne vers la dramaturgie et fonde la troupe de l'Illustre Théâtre avec 3 membres de la famille Béjart et 6 autres amis, en 1643. De 1645 à 1658, ils se donnent en représentation dans toute la France, allant de province en province. S'inspirant de scènes de la vie quotidienne et du parler populaire, à une époque où Richelieu veut instaurer la langue française sur tout le territoire, l'Illustre Théâtre séduit riches comme pauvres grâce à ses farces et s'invite dans les salons de grands seigneurs, comme le Prince de Conti, le cousin de Louis XIV.  
De retour à Paris, la jeune troupe est protégée par Philippe d'Orléans dit Monsieur, le frère du roi et bientôt, l'Illustre Théâtre se donne en spectacle au Louvre, devant Mazarin, Anne d'Autriche et son fils, le jeune Louis XIV. En 1658, Jean-Baptiste Poquelin interprète Le Docteur Amoureux devant le Roi et devient son amuseur attitré. 
L’Étourdi, Le Dépit Amoureux, Les Précieuses Ridicules : les comédies de Molière rencontrent un succès auprès de la Cour et d'un public plus modeste. Reprenant les codes des courtisans et paysans et les tournant en dérision, Molière parvient à sublimer le théâtre grâce à des interprétations plus naturelles et moins pompeuses. 
Vu comme l'héritier de la commedia dell'arte, l'auteur du Malade Imaginaire a eu, comme tout artiste, des hauts et des bas. Jeté en prison par ses créanciers à ses débuts, adulé puis défait par le roi et ses caprices : le comédien libertin est, aujourd'hui encore, une source d'inspiration pour les férus de théâtre, se battant pour ses idées et contre la toute-puissance de l'Eglise qui voyait en ses écrits des appels contre-religieux.  

Molière, le bouffon du Roi ? 

Friand des satires piquantes du jeune comédien, Louis XIV fait de Jean-Baptiste Poquelin son protégé. Il lui confie la mission de plusieurs créations culturelles et s'implique beaucoup dans les œuvres du dramaturge, allant jusqu'à lui souffler les sujets de ses pièces. C'est ainsi que, malmené par les religieux, le monarque demande à son fidèle Molière de se moquer des dévots dans sa prochaine farce. Le Tartuffe est né. Mais face à la pression de l'Eglise, le souverain, en 1664, fait interdire la pièce, qui raille les hommes pieux et les présente comme des pêcheurs. Pas de représentation signifie... pas d'argent dans les caisses de la troupe de l'Illustre Théâtre, qui demande à son leader de trouver une solution. Fils du tapissier du Roi, Jean-Baptiste Poquelin jouit d'un privilège qui n'a pas de prix : il est présent lors de la cérémonie du lever du Roi, durant laquelle il peut discuter avec le souverain et lui faire quelques demandes. 
Obnubilé par ses intérêts pour asseoir son pouvoir divin, inquiété par la guerre contre les Espagnols et attristé par la mort de sa mère, Anne d'Autriche, Louis XIV fait languir Molière pendant des années. Ce n'est qu'en 1669, soit cinq ans après son interdiction, que le dramaturge et sa troupe peuvent rejouer Le Tartuffe en public.
Vu comme un hérétique, un libre-penseur, un génie, Molière dérange autant qu'il fascine. Pourtant, quatre siècles après sa mort, sa vie et son oeuvre sont teintées de mystères... 

Molière est-il un imposteur ? 

Molière serait l'un des seuls écrivains qui n'a laissé aucune trace de ses écrits, aucun brouillon. Le comédien et sa troupe n'ont laissé derrière eux qu'un registre des comptes, tenu par Charles Varlet dit La Grange, membre de l'Illustre Théâtre. C'est au XXe siècle que la rumeur court : Molière ne serait pas l'auteur de toutes ses œuvres. Lancée par l'écrivain Pierre Louys, cette information qui n'a toujours pas été confirmée, divise le monde du théâtre. D'un côté, certains refusent de remettre en cause le talent de Jean-Baptiste Poquelin tandis que d'autres se plaisent à dire que le nègre de Molière était... Pierre Corneille.
Auteur le plus étudié à l'école en France, incarnation de la langue française : Molière doit-il sa renommée mondiale à un autre ou est-il un brillant dramaturge incompris ? 

Brûlez Molière ! de Jacques Malaterre avec Dimitri Storoge, Jules Pelissier, Cosima Bevernaege, Agathe de La Boulaye (Durée : 90 minutes) suivi de la 31e Nuit des Molières présentée par Alex Vizorek en direct des Folies-Bergère, le 13 mai 2019 sur France 2 à 22h45.