Keren Ann : "Ceux que j'ai aimés, je les aime encore"

Productrice, compositrice, parolière, guitariste et chanteuse néerlandaise, israélienne et française, Keren Ann n'avait pas fait d'album en français depuis 2002... Elle dévoile son nouvel opus "Bleue" et nous révèle ses intentions musicales et intimes. Plongez dans le monde symphonique et aquatique de Keren Ann, une artiste profondément poétique...

Keren Ann : "Ceux que j'ai aimés, je les aime encore"
©  Bouchra Jarrar

Le retour de Keren Ann se fait en musique et en Bleue blanc rouge. Celle qui n'avait pas sorti de disque dans la langue de Molière depuis 14 ans, revient avec 10 titres écrits en français et rassemblés dans son album Bleue. Une création musicale qui sort le 15 mars 2019 et qui plonge l'auditeur dans un univers intimiste et bouleversant. Cette artiste complète est guitariste, parolière, compositrice, productrice et chanteuse. Lorsqu'elle arrive dans le café, le mot "douceur" semble prendre tout son sens. Dès qu'elle commence à se confier au Journal Des Femmes, on reconnaît la voix suave qui accompagne si bien les cordes de son nouvel album. Femme inspirée et inspirante, elle raconte les coulisses de son album et les épisodes décisifs de sa vie. Rencontre. 

Le Journal Des Femmes : Comment avez-vous débuté dans la musique ?
Keren Ann :
Aussi loin que je me souvienne, j'ai toujours écrit des chansons car j'aime cela. J'ai été inspirée par de grandes figures comme Bob Dylan ou Bruce Springsteen mais aussi par la chanson française avec Gainsbourg, Françoise Hardy ou Henri Salvador. J'ai eu ma première guitare à neuf ans (un classique) et j'en ai joué pendant toute mon adolescence. Le "songwriting" (écriture de chanson, NDLR) m'a toujours intéressée. J'explorais des styles et je faisais des choses beaucoup plus personnelles... J'avais des gens autour de moi qui chantaient mes chansons et un jour, je me suis mise à chanter. 

Quelles ont été vos principales inspirations pour l'écriture de votre album ?
Keren Ann : 
Ma muse, c'est avant tout ma vie : pas seulement mon histoire mais aussi des thèmes qui m'intéressent assez pour que je les raconte à ma manière et en tant que narratrice. En l’occurrence, pour l'album Bleue, j'avais envie d'un fond onirique et organique avec de la texture. L'eau m'a toujours accompagnée dans mon écriture. Les auteurs ont besoin d'éléments météorologiques pour raconter. Dans mon cas, je relate aussi les mouvements qui sont dans l'eau, ce qui nous bouleverse. En 8 mois, j'ai trouvé un sujet et un équilibre pour savoir ce qui allait avec mes envies. 

"Il y a quelque chose d'intemporel que l'on ressent lorsque l'on a un rapport avec l'Amour." 

Qu'est ce que l'eau représente pour vous ? 
Keren Ann : L'eau est quelque chose d'amniotique dans l'écriture, il y a un coté près de la peau. En revanche, les relations, quelles qu'elles soient, sont mon principal fil conducteur. Je m'intéresse toujours à l'amour entre deux personnes. Je pars du principe que ceux que j'ai aimés, je les aime encore et ceux que je n'aime pas encore, je les aime déjà. Je n'ai aucun souvenir de ne pas avoir aimée ma fille avant de la connaître. J'adore explorer ce côté intemporel des relations.

Keren Ann © Bouchra Jarrar

Pourquoi avoir choisi d'écrire Bleue en français ?
Keren Ann
: C'est ma langue d'adoption même si ma langue d'origine est l'anglais. Mon écriture est très liée à mon environnement sonore. Cela faisait des années que j'avais un pied à Paris et un pied à New York et ma famille a toujours parlé anglais. Aujourd'hui cela fait 3 ans et demi que j'ai mes deux pieds à Paris. C'était donc évident et naturel pour moi que cet album existe en français. 

Quelle est votre playlist du moment ? 
Keren Ann : J'écoute beaucoup le nouvel album de Lou Doillon, que j'adore. Bien évidemment, il y a toujours des choses que je veux faire découvrir à ma fille, donc je reviens aux classiques comme Billie Holiday, Bob Dylan ou Bruce Springsteen, parce que j'ai envie qu'elle les connaisse autant que moi.

Quelle relation avez-vous avec votre public français ?
Keren Ann : 
J'ai une relation assez passionnelle. Ils sont là depuis mes débuts et maintenant que j'ai 19 ans de carrière derrière moi, c'est comme si nous formions une famille. Certains se sont rencontrés pour mon premier Olympia et maintenant ils viennent voir mes concerts avec leurs enfants... C'est une belle relation ! 

Votre plus beau souvenir en tant que chanteuse ?
Keren Ann :
J'en ai tellement… Quand on est bercé par Henri Salvador et que 25 ans après ,on se retrouve en studio avec lui, c'est fort. Quand on fait un concert où l'on a vu plein d'autres artistes se produire dans ce même lieu, c'est une émotion particulière aussi. Mais le souvenir le plus vif dans ma mémoire, c'est la première fois où mon père a écouté mes chansons. Je n'oublierai jamais cette expression sur son visage... Comme je n'aime pas partager un travail inachevé, ma famille a eu l'album dans les mains au dernier moment. Aujourd'hui cela n'a pas changé ! 

Quelle est votre chanson préférée ? 
Keren Ann : Avant, c'était Boots of Spanish Leather de Bob Dylan, car c'est un magnifique exemple de narration. Je pense que l'on peut apprendre à aimer avec cette chanson. Aujourd'hui, je dirais plutôt Almost Like the Blues de Leonard Cohen, qui est presque une bible pour moi. 

Quel est votre roman préféré ?
Keren Ann : Frankenstein de Mary Shelley est un livre qui m'a toujours accompagnée. La psychologie et l’apprentissage de soi sont des thèmes très fort qui me touchent. 

N'avez-vous jamais été tentée par l'écriture d'un livre ? 
Keren Ann : Je pense que je relèverai peut-être ce challenge plus tard, mais pour l'instant, l'activité qui me satisfait le plus, physiquement ou mentalement, c'est le "songwriting". La progression harmonique, les mots, les notes, l’architecture musicale, la production, les arrangements… Cela me satisfait tellement.

Si vous deviez définir votre album en seulement trois mots vous diriez... 
Keren Ann : Charnel. Puissant. Organique.

Découvrez Bleue, le nouvel album de Keren Ann, dans les bacs le 15 mars 2019.