HollySiz : "Je ne peux pas me permettre de dire que j'ai été victime"

HollySiz, c'est une dégaine. C'est aussi une voix, puissante, qui résonne sur un rock-électro ultra dynamique. Avec son blond peroxydé, son look magnétique et son énergie communicative, Cécile Cassel -quand elle ne porte pas son nom de scène-, électrisera la foule du Festival Les Déferlantes, à Argelès-sur-Mer, du 7 au 10 juillet 2018.

HollySiz : "Je ne peux pas me permettre de dire que j'ai été victime"
© Dimitri Coste

Le Journal des Femmes : Durant votre tournée, vous avez fait un passage par l'Olympia, à Paris. Qu'avez-vous ressenti en voyant votre nom en lettres rouges sur la façade d'un monument ?
HollySiz : On ne s'y fait pas. C'était ma deuxième fois à l'Olympia, mais sur la tournée précédente, j'avais eu l'impression de me faire "voler" mon Olympia car il y a avait eu un énorme incendie tout près et jusqu'à 18h30, nous n'étions pas surs de jouer alors que cette date, complète, était annoncée depuis 6 mois. C'était déroutant. Là, j'avoue que quand je suis arrivée tôt le matin devant j'ai pleuré. J'ai passé la journée en peignoir, pieds nus, à me trimbaler comme si j'étais chez moi alors que j'étais au milieu de mon équipe, des techniciens... C'est ouf d'imaginer que l'on vous confie les clés de cet endroit pour une journée. J'aime autant la journée, quand la salle est vide, que le concert en lui-même car j'aime le fait d'avoir le temps de "respirer" la salle, de sentir l'énergie et d'avoir une vision que personne n'a, 

Votre meilleur souvenir de cette tournée ?
Je suis Parisienne donc lorsque j'ai une date à Paris, je retrouve mes amis, ma famille... C'est toujours particulier. Mais lors de notre passage à Lille, nous n'avons pas été déçus, le public du Nord est toujours incroyable. Souvent, nous sommes surpris de trouver une ambiance semblable à celle que l'on pourrait attendre à l'Olympia. A La Vapeur, à Dijon, c'était fantastique. Quelle chance de se faire surprendre ! Et puis, j'espère que le meilleur est à venir, notamment aux Déferlantes, dont on garde un super souvenir. 

Justement, vous n'avez pas fini avec Les Déferlantes… Vous y avez déjà fait un passage électrique en 2014, qu'en retenez-vous ?
Nous avions eu affaire à une tempête de vent hallucinante où, là aussi, nous n'avons pas su avant longtemps quand est-ce que nous pourrions jouer... C'était la déferlante ! Nous avons été très bien accueillis et puis nous jouions le même soir que Blondie. C'était très joyeux. 

Vous partagerez l'affiche avec d'autres talents français comme Orelsan et Eddy De Pretto. Que pensez-vous de la nouvelle scène française ?
J'adore Orelsan depuis longtemps. Son écriture, tellement moderne, est tout à fait justifiée étant donnée son actualité... Il est passé au niveau supérieur mais représente la nouvelle chanson française malgré lui. Il a débuté en ne faisant que du rap et rapidement son écriture a touché un public plus large, toutes générations confondues, c'est étonnant. Je suis une fan de la première heure ! Nous nous sommes beaucoup croisés dans des festivals. Je suis ravie de participer à autant de festivals avec lui cet été. Il y aura beaucoup de garçons et j'apprécie énormément son équipe et la bonne énergie qu'il draine avec lui. 
Eddy de Pretto, c'est aussi une marque... Adolescente, j'écoutais du rap car mes grands frères (Vincent Cassel, Mathias Cassel, ndlr) en écoutaient et j'étais considérée comme un ovni. Aujourd'hui, le rap, que l'on appelle "l'urbain", c'est la nouvelle pop. On a tendance à y mettre un peu de tout et de n'importe quoi. Eddy de Pretto a une superbe écriture, une très belle voix, c'est un vrai chanteur. Sans son jean et ses baskets, on a du mal à croire qu'il est l'une des figures du nouveau rap français. Il s'apparente davantage à  Gilbert Bécaud qu'à Booba. Il chante vraiment bien, sa voix laisse entendre qu'il en a sous le pieds. Quand je l'ai vu pour la première fois, il était tout seul avec un Ipod, je suis curieuse de voir comment il a fait évolué le show.

Qu'est-ce qui vous électrise sur scène ?
L'énergie de mes musiciens, déjà, que j'ai particulièrement bien ressentie à l'Olympia. Ils étaient tous investis et chacun "faisait son Olympia". Cela a créé une émulation magnifique. Et puis le public, indéniablement. Un bon concert se fait des deux côtés. J'adore les festivals car ils imposent un vrai challenge : conquérir le public. Souvent, j'avais affaire au public d'Orelsan car je faisais ses premières parties. Il faut réussir à convaincre des gens qui sont là depuis des heures et souvent 
très bourrés ! 

© Dimitri Coste

Vous puisez vos inspirations dans la musique latine, qui est pour vous à l'origine de pas mal de gros tubes, de Michael Jackson à Pharrell Williams. 
Quand je suis partie à Cuba, je me suis reconnectée avec les musiques latines, notamment Brasileiro de Sergio Mendes, une musique brésilienne dans laquelle il y a beaucoup de batucada brésilienne et une certaine rythmique que l'on retrouve effectivement dans pas mal de titres de Michael Jackson, en particulier pourThey Don't Care About Us , mais aussi dans toutes les petites rythmiques de Pharrell Williams au début des années 2000. Ce titre (Brasileiro) était en fait le premier que j'avais eu dans mon walkman – c'est là que j'a 100 ans – car c'est mon père qui me l'avait offert et cela m'a complètement influencé. Mon voyage à Cuba m'a ramené à toutes ces musiques et si la musique brésilienne et cubaine sont différentes, leur rythmique est très similaire.

Vous avez posé vos valises sur la Côte basque, que vous inspire cette région ?
Beaucoup de choses ! Avant tout, c'est une région qui vit au rythme des éléments car il y a les marées, qui sont très fortes et la montagne, très proche aussi. On dit qu'au Pays basque il peut faire beau plusieurs fois dans la journée. Nous devons nous adapter à la nature et adopter un rythme plus sain. Les choses se méritent et ça me fait du bien. Londres, New York, Paris... J'ai toujours vécu dans des grandes villes qui imposent un rythme de vie effréné et où nous sommes contrariés lorsque nous n'avons pas tout, tout de suite. Ici, il y a une très belle plage qui s'appelle la Côte des Basques, qui vit au rythme des marées. Après 14h, ne cherchez pas à vous y rendre puisqu'elle ne sera plus ! C'est une vrai source d'inspiration. Et puis, quelle meilleure télévision que l'océan ? 

La famille, c'est un soutien primordial… Vincent Cassel, votre frère, vous a d'ailleurs fait sa déclaration en photo lors de votre passage à l'Olympia.
Nous sommes fiers les uns des autres, nous somme une fratrie de trois, on se soutient... Et oui, il a rendu ça public, ce qui était très mignon et en même temps très gênant.

Quelle est votre BO de l'été ?
Pour l'instant j'écoute Passion Fruit de Drake, un titre que j'ai usé jusqu'à la moelle l'été dernier. Je ne me suis pas encore penchée sur le sujet mais les festivals de l'été vont sûrement m'aider. J'aime bien Hyphen Hyphen aussi, mais comme je viens de déménager, j'ai retrouvé mes vieux vinyles, que je redécouvre. Quoi de plus romantique que d'écouter du jazz en regardant la pluie tomber ?

La clé du succès, c'est l'exigence que vous avez envers vous-même ? 
Cela y participe. Si j'avais la clé, je la filerais à pas mal de gens autour de moi. En tout cas, pour un succès sur le long terme, il faut énormément de travail, même avec un bon alignement des planètes. Après, je place mon exigence très haute car j'estime que c'est la moindre des choses. Il y a tellement de concurrence aujourd'hui. Si les gens font la démarche de vous écouter, d'assister à l'un de vos concert, vous leur devez de donner le meilleur de vous même.  

Quelle est votre position sur #metoo et cette déferlante de porc ?
Je suis une femme donc j'ai des choses à raconter. Je  suis solidaire mais j'ai besoin de concret, de lois... Par exemple, la Fondation des Femmes pour laquelle j’ai apposé ma signature a pu enfin rouvrir son standard. Elle n'avait plus assez de bénévoles et d'argent pour aider victimes, Dans le milieu du cinéma, il y a le projet "5050 pour 2020" qui essaie d'imposer l'égalité salariale. Si les voix des artistes peuvent ouvrir la voie aux autres femmes de tous les milieux, c'est encore mieux. Là, c'est l'arbre qui cache la forêt. 

Quelles genres de situations avez-vous dû affronter ?
Je ne peux pas me permettre de dire que j'ai été victime de quoi que ce soit, je trouve cela malhonnête envers les véritables victimes. Evidemment, je me suis retrouvée dans des situations "déplacées" mais pas une seule femme que je connaisse ne pourra dire le contraire, Parfois, on le reconnaît au détour d'une question, sans même s'en rendre compte au moment des faits. Je ne serai pas un porte-drapeau par respect pour les vraies victimes qui n’ont pas été écoutées pendant longtemps.

Quels sont vos combats ?
J'ai beaucoup d'engagements en tant que citoyenne mais mes engagements quotidiens ne regardent que moi. Dans mes écrits, j'essaie de mettre en valeur des choses qui me paraissent importantes mais, rien que le fait de faire de la musique et de réunir des gens de toutes les générations et de toutes les couleurs, c'est déjà un acte politique en soi. Pendant mes concerts, je demande à ce que les gens prennent leur voisin dans les bras... C'est un truc qu'on ne fait plus!