Jojo Moyes : "Le journalisme vous apprend à voir des histoires partout"

INTERVIEW - Jojo Moyes est de retour en librairies avec son nouveau roman, "Sous le Même Toit", aux éditions Milady. Le Journal des Femmes s'est entretenu avec l'auteur britannique, dont les livres, notamment "Avant Toi" ont séduit des millions de lecteurs dans le monde entier.

Jojo Moyes : "Le journalisme vous apprend à voir des histoires partout"
© JMAA/WENN.COM/SIPA

Jojo Moyes a (indirectement) été sous le feu des projecteurs en 2016 avec la sortie du film Avant Toi, adaptation du roman du même nom, portée par Emilia Clarke et Sam Claflin. L'auteur britannique revient cette année sur le devant de la scène avec une actualité plus directe, puisque son roman Sous le Même Toit est sorti en France le 17 février 2017 aux éditions Milady. On y suit le parcours d'Isabel, une violoniste virtuose croulant sous les dettes après la mort de son mari et contrainte d'abandonner le confort de sa vie londonienne pour habiter dans une maison délabrée en pleine campagne. Une arrivée qui va réveiller les rancoeurs et la convoitise du voisinage...

Passionnée d'écriture depuis le plus jeune âge, Jojo Moyes a travaillé pendant 10 ans en tant que journaliste pour le quotidien anglais The Independent avant de se consacrer à ses romans. Son premier livre, Sous la Pluie, est publié en 2002. Suivent ensuite Arcadia Hotel, Les Fiancées du Pacifique, La Baie des Baleines, La Dernière Lettre de son Amant ou encore Jamais Deux Sans Toi. Les romans de Jojo Moyes se sont vendus à plus de 20 millions d'exemplaires dans le monde, preuve de la popularité de cette maman de 3 enfants. 

Le Journal des Femmes : Quels sont vos premiers souvenirs de lectrice ?
Jojo Moyes :
Ma mère m'a appris à lire à l'âge de 3 ans. J'ai toujours lu. Je ne regardais pas vraiment la télévision et je n'ai pas eu de frère ou de soeur avant d'avoir 19 ans, donc j'adorais m'immerger dans les livres.

Quand et pourquoi êtes-vous passée à l'écriture ?
J'ai toujours écrit. C'était un moyen de m'exprimer. J'adorais l'anglais à l'école et ma mère avait de nombreux manuels scolaires dans lesquels j'écrivais de longues histoires décousues. J'ai eu la chance d'avoir de bons professeurs. Eux et mes parents m'ont fait découvrir beaucoup d'histoires.

Votre expérience de journaliste a-t-elle nourrit  votre activité de romancière ?
Le journalisme vous apprend à voir des histoires partout. Je pouvais m'asseoir dans une pièce avec trois personnes et écrire un roman sur chacun d'elle. Tout le monde a une vie intéressante, d'une façon ou d'une autre. Vous devez juste apprendre à écouter. Le journalisme m'a aussi fait prendre confiance en ma voix et permis d'avoir une bonne éthique de travail. Vous ne pouvez pas classer votre article parce qu'il n'est pas parfait. Il faut apprendre à le rendre aussi bonque possible, aussi vite que possible et accepter qu'il soit ensuite enrichi à la correction.

Comment avez-vous trouvé votre style et comment le définiriez-vous ?
Je ne sais pas si j'ai un style. Une autre chose qui m'est restée du journalisme est cette responsabilité envers le lecteur de rendre l'histoire intéressante et de la raconter de manière concise. Mes livres décollent vraiment quand j'y introduis de l'humour, mais aussi de la tristesse. Je pense que mon style est un mélange de ces choses.

Quels conseils donneriez-vous à d'apprentis écrivains ou à des gens qui voudraient se mettre à écrire ?
Lisez. Beaucoup. Je suis stupéfaite par les gens qui veulent être écrivains, mais passent toute la journée sur leur iPhone. Vous devez absorber la manière dont un million d'auteurs différents s'expriment et racontent leurs histoires pour commencer à raconter la vôtre.

Envisagez-vous de revenir au journalisme un jour ?
Non, je ne suis plus assez solide ! Et j'aime trop écrire de la fiction.

Avez-vous des rituels d'écriture ?
Non, le journalisme m'a guérit de ça. J'écris n'importe où et je n'attends pas de Muse. Je couche les mots et s'ils ne sont pas bons, je peux peaufiner encore et encore et avoir un résultat satisfaisant plus tard.

Ecrivez-vous tous les jours et comment organisez-vous votre emploi du temps ?
En ce moment, oui. Je commence à travailler à 6 heures du matin, ce qui n'est pas l'idéal, mais c'est la seule manière de faire tout ce que j'ai à faire. J'écris jusqu'au moment d'emmener les enfants à l'école et si je ne suis pas distraite par la maison ou mes animaux, je vais à mon bureau et travaille jusqu'à 18 heures. C'est probablement une bonne chose que j'ai une famille, sinon, je ne m'éloignerais jamais de mon bureau...

A quoi ressemble votre environnement de travail ?
J'adorerais dire qu'il est minimaliste, mais ce n'est jamais le cas. En face de moi, il y a deux énormes piles de paperasse, une bougie Diptyque, un mug de thé, un diffuseur que mon assistant m'a donné, un petit pingouin en argent offert par ma maison d'éditon, du parfum, un disque dur et une salière que quelqu'un a mis là et que personne n'a pris la peine de ranger ! Ce dont j'ai un peu honte tout de suite...

Que faites-vous en cas de page blanche ?
J'écris une scène que j'attends avec impatience et, en général, ça me permet de continuer à avancer.

Avant toi est votre premier roman adapté au cinéma. Etait-ce une évidence pour vous d'en écrire le scénario ?
Absolument pas. Je ne me suis jamais pensée comme une scénariste. Mais MGM m'a demandé si ça m'intéressait parce qu'ils voulaient reproduire le ton du livre et il s'est avéré que j'ai adoré ça. Depuis, j'ai commencé à travailler sur les adaptations de plusieurs autres livres.

Quel est ou quels sont vos livres de chevet ?
En ce moment, j'ai deux lectures : un recueil de nouvelles - A Manual For Cleaning Women - auquel je reviens tout le temps, et une épreuve d'un éditeur que j'ai commencée deux fois, mais sur laquelle je n'arrête pas de m'endormir. Probablement pas un bon signe...

D'où est venue l'inspiration pour Sous le Même Toit ?  
L'histoire est venue suite à la rénovation d'une maison. J'ai été inspirée par cette étrange relation que vous construisez avec vos ouvriers, quand vous ne leur faites pas totalement confiance, mais que vous n'avez pas le choix. Et plus ils en font, plus vous devez leur faire confiance. J'ai imaginé à quel point il serait facile de saboter cette relation, surtout en face d'une femme seule et sans aucun sens pratique...

Comment construit-on un bon personnage ?
Un bon personnage est un personnage qui reste à vos côtés longtemps après que vous ayez terminé le livre.

Duquel de vos personnages vous sentez-vous le plus proche ?
Probablement Lou Clark, l'héroïne d'Avant Toi. Mais aussi de Liza, de La Baie des Baleines, et de Sophie, de The Girl You Left Behind. Il y a quelque chose de moi dans chacun de mes personnages. Je ne peux pas les écrire autrement.

En dehors de l'écriture, quelles sont vos passions ?
En dehors de ma famille ? Mes animaux. J'ai 3 chevaux et 2 chiens, dont un énorme montagne des Pyrénées que nous adorons.

La solitude liée à l'activité d'écriture est-elle difficile à gérer ?
Non, j'y suis habituée maintenant. Au contraire, je trouve qu'être avec des gens est plus difficile !

Faites-vous relire vos romans à vos proches au cours de l'écriture ou à la fin ?
Seulement quand j'ai terminé, ou que je suis au moins arrivée à la moitié, sinon, votre écriture est trop tendre, trop vulnérable. Je l'ai appris à mes dépens. Mon mari est souvent le premier à lire mon travail, mais il n'est pas toujours très diplomate s'il n'aime pas quelque chose. Il a aussi, malheureusement, souvent raison.

Quels sont vos projets ? 
J'espère pouvoir annoncer un autre projet de film très bientôt et peut-être situé en France. À suivre... 

© Milady