Aure Atika (ROSE) : "J'aime à croire que je suis la fille de Françoise Fabian"

Dans "Rose" au cinéma le 8 décembre, Aure Atika joue la fille de l'héroïne du film, celle qui va devoir composer avec la renaissance intime de sa mère de 78 ans et se remettre elle-même en question. La comédienne y joue le désespoir amoureux et l'optimisme qui renaît avec le charisme qui a fait son succès. Rencontre.

Aure Atika (ROSE) : "J'aime à croire que je suis la fille de Françoise Fabian"
© JP PARIENTE/SIPA

Aure Atika joue une femme au cœur brisé et une fille confrontée à la révolution intime de sa mère dans Rose, d'Aurélie Saada, au cinéma le 8 décembre. L'actrice connue pour ses comédies (La Vérité si je mens !, OSS 117 Le Caire Nid d'espion)a prouvé l'ampleur de sa palette de jeu au fil de sa carrière, avec des apparitions sur grand écran chez Audiard (De Battre mon cœur s'est arrêté) ou Julie Delpy (Le Skylab) et sur petit écran dans Les Bracelets rouges ou Pour Sarah. La voici dans un rôle qui montre à la fois sa force et sa fragilité. Sarah, le personnage incarné par Aure Atika passe de l'exaspération à la douceur, du deuil amoureux à l'envie de tourner la page. Elle emprunte ce chemin avec du caractère et des sourires francs face à une Françoise Fabian plus lumineuse que jamais en héroïne à la conquête d'elle-même. Interview avec une comédienne de plus en plus passionnée par son métier.

Comment avez-vous connu la réalisatrice de Rose, Aurélie Saada ?
Aure Atika
: Nous nous connaissions par des amis communs, sans être intimes pour autant. Et elle m'a proposé le rôle. En plus d'avoir adoré le scénario et l'histoire de Rose, j'ai vu dans mon personnage l'occasion de dire plein de choses, de jouer sur des modulations. Pendant les séances de travail, Aurélie m'a dirigée presque musicalement, avec beaucoup d'oreille. Elle m'a fait aller sur des chemins auxquels je n'avais pas pensé et je me suis dit que j'adorerais composer avec elle sur ce film.

Qui est Sarah, votre personnage ?
Aure Atika
: Je suis la fille de Rose, jouée par Françoise Fabian et j'ai deux frères incarnés par Grégory Montel et Damien Chapelle. Je suis chorégraphe, mère d'une grande fille et séparée de mon ex, parti avec une femme plus jeune parce qu'il en avait marre de la vie de famille. Je suis toujours dans l'espoir, encore amoureuse, il y a quelque chose d'inabouti chez moi. J'aimerais qu'il revienne. La révolution intime du personnage de Rose va tous nous faire bouger. Je vais finalement aller de l'avant et passer à autre chose.

Partagez-vous des points communs avec elle ?
Aure Atika
: Comme Sarah, au moment où j'ai lu le scénario, je vivais une rupture difficile. Je me suis reconnue dans sa tristesse et son espoir que ça s'arrange. De par sa culture et le rapport fille-mère, il y a quelque chose que j'aime bien, qui touche à la tendresse et à l'exaspération, parce qu'on est tous exaspérés par nos parents. On a du mal à les voir vieillir, à accepter que certaines choses ne fonctionnent plus comme avant.

Aure Atika, Damien Chapelle et Grégory Montel dans "Rose" © Silex Films - Germaine Films 2021 - Apollo Films

Le personnage de Rose est assez universel. Vous a-t-il parlé ?
Aure Atika
: Bien sûr qu'on s'y reconnaît, même si on n'a pas le même caractère qu'elle. Rose nous fait naître ou renaître cette volonté de vivre à 200%. Elle donne envie de se dire que ce n'est pas terminé. Parfois à 30, 40, 50 ou 60 ans, on peut se dire que la vie est finie. Tout d'un coup, en la voyant, on réalise que ce n'est pas le cas, que tout dépend de ce qu'on fait de ce quotidien, de comment on se réveille le matin. On n'est pas obligé de ne plus s'autoriser certaines choses parce qu'on a 60 ou 70 ans, ou même de devoir être réduit à cet âge.

Sarah semble être la seule de la fratrie qui la comprend et la soutient...
Aure Atika
: Oui, son jeune fils n'accepte pas que sa mère veuille sortir à 22h maquillée, il voudrait qu'elle reste en blouse à la maison à faire des mots-croisés. Mon personnage accepte. Peut-être qu'elle reconnaît quelque chose de la sororité, même si je déteste ce mot. C'est comme si elle se disait "on est femmes, pourquoi on n'aurait pas le droit ?" Peut-être aussi qu'en donnant cette liberté à sa mère, elle se donne la liberté de vivre enfin autre chose.

Le film aborde la question du temps qui passe. Comment vivez-vous ça ?
Aure Atika
: J'ai pu y penser à certaines périodes de ma vie. C'est surtout dans les moments d'échec, d'impasse ou de difficulté qu'on se dit qu'on n'y arrivera plus, qu'il est trop tard. Ce n'est pas forcément évident de vieillir, de prendre de l'âge, de se dire qu'on n'aura plus cette tête, cette peau ou ces possibilités-là, mais il y a d'autres opportunités qui s'ouvrent à nous. Ce sont des mini-deuils à faire pour découvrir les choses autrement. Il vaut mieux accompagner ce mouvement, mais c'est beaucoup dans la tête que ça se passe et le film le dit très bien.

"Si j'ai envie de quelque chose, je le fais"

Comme Rose, avez-vous dû apprendre à suivre vos envies ou vous êtes-vous toujours écoutée ?
Aure Atika
: Il y a des domaines dans lesquels je suis totalement mes envies, la vie privée par exemple. Professionnellement, ce métier de comédienne, je ne l'ai pas voulu ou désiré très fort au départ. Plus je le pratique, plus je suis passionnée. Je sens que j'ai d'autres envies que je ne saurais pas définir exactement. Cette période de coronavirus nous a tous un peu chamboulés sur ces domaines.

Comment la collaboration avec Françoise Fabian s'est-elle passée ?
Aure Atika
: Merveilleusement bien. J'aime à croire que je lui ressemble un peu et que je pourrais être sa fille. Je l'ai souvent appelée maman. Comme je n'ai plus ma mère depuis très longtemps, j'ai fait une projection et j'imaginais qu'elle était ma mère rêvée. C'est une grande professionnelle, une immense actrice. Elle nous partageait des anecdotes de sa carrière assez croustillantes. On s'est régalés. On peut parler de tout avec elle, c'est une relation à la fois très libre et profonde qui nous unit.

Rose donne envie de vivre à fond. Quelle est votre manière à vous de croquer la vie à pleines dents ?
Aure Atika
: Je ne me refuse pas vraiment de plaisir. Si j'ai envie de quelque chose, je le fais, même si je suis de nature raisonnable. Je m'autorise ce qu'il faut, malgré mon sens des responsabilités. Je ne me suis pas choisi un mari assurance vie, je ne me suis pas coincée dans une relation par convention sociale, bourgeoise ou par peur d'être seule. Je suis assez indépendante dans ma manière d'aborder la vie.