C'EST TOI QUE J'ATTENDAIS : 3 questions sur l'adoption

C'EST TOI QUE J'ATTENDAIS : 3 questions sur l'adoption

Pour les besoins du documentaire "C'est Toi que J'attendais", en salles le 22 décembre, Stéphanie Pillonca s'est notamment penchée avec délicatesse sur le destin de Lucile et de son conjoint, un couple en quête d'adoption. En trois questions, l'intéressée revient sur ce parcours du combattant.

C'est avec une lumineuse pudeur que Stéphanie Pillonca a investi l'intimité de couples en quête d'adoption dans le documentaire C'est Toi que J'attendais (au cinéma le 22 décembre). Toujours à bonne distance de ses sujets, sans jamais sombrer dans la sensiblerie ou le voyeurisme, elle nous convie à une expérience humaine portée par des hommes et des femmes inspirants et magnifiques. Parmi eux ? Lucile qui, avec son mari, s'est battue pour enfin adopter un enfant. "C'est une aventure tellement personnelle et intime. Aucun parent adoptif ne l'a vécu de la même façon", lance-t-elle. Pour le Journal des Femmes, elle revient sur ce cheminement long, fastidieux mais qui, aujourd'hui, a fait d'elle une mère comblée. 

A quel moment avez-vous eu l'envie d'adopter et quelle a été l'impulsion ? Votre entourage familial et amical a-t-il été à vos côtés ?
Lucile :
Nous avons toujours eu l'adoption en tête, même avant de commencer la PMA et notre parcours semé d'embûches. C'était une idée qui nous semblait très séduisante. Je connais plusieurs familles qui, il y a plus ou moins longtemps, ont adopté avec bonheur. Il m'a néanmoins fallu dans les faits un certain temps. Si l'idée de donner des parents à un enfant qui n'en a plus est magnifique et gratifiante, elle suppose de ne plus s'accrocher à l'envie de tomber enceinte et de vivre une grossesse et un accouchement. Et, pour moi en tout cas, ce passage d'un projet d'enfantement à un projet d'adoption a été plus long que je l'aurais a priori imaginé. Les gens me disaient "Il ne va pas te ressembler, et alors ?". C'est vrai, mais ce n'est pas si simple. Et puis, à un moment, ça s'est imposé pour moi comme une évidence. C'est pour ça que je ne parlerai pas d'impulsion mais d'un long processus mental et psychologique. Nous avons toujours été bien compris de notre entourage même si certains avaient tendance à trouver que ça devrait aller plus vite et qu'on devrait être plus "pushy". Ce que nous n'avons jamais fait et nous ne le regrettons pas.

En voyant le film, on réalise, plus que jamais, le long combat que représente une adoption. Quelles ont été les plus grandes difficultés rencontrées ?
Lucile :
Honnêtement, le plus douloureux a été le parcours de PMA qui a précédé. Quand on se lance dans une procédure d'adoption, on sait que ce sera long, parfois désespérant. Personne ne nous le cache, mais en ce qui nous concerne, nous sommes systématiquement tombés sur des personnes très bienveillantes. Je ne crois pas que ce soit toujours le cas mais de ce point de vue-là, nous avons eu beaucoup de chance. Les deux moments les plus difficiles ont été au début et à la fin. La première réunion d'information, obligatoire avant d'enregistrer sa demande, est clairement faite pour décourager le maximum de couples. Même si on ne nous y explique que la vérité : en l'occurrence qu' il y a très peu d'enfants à adopter en France mais très peu aussi à l'étranger et encore moins de bébés. Lors de la deuxième réunion, à la fin du chemin, lorsqu'on frôle les trois ans d'attente, il s'agit officiellement de revenir en longueur sur ce qui se passera les quinze jours suivant LE fameux coup de fil, l'organisation de la "mise en relation" avec le bébé. En réalité, on en est sortis complètement découragés, en ayant compris que parmi la dizaine de couples présents dans la salle, tout le monde ne se verrait pas confier un enfant. Là oui, j'ai beaucoup pleuré et j'ai perdu espoir.

La caméra est présente au moment où on vous annonce que vous pourrez adopter un enfant né d'un accouchement anonyme. Elle est aussi là au moment où vous rencontrez l'enfant. Dans quel état d'esprit vous trouvez-vous à cet instant ? Avez-vous oublié la caméra de Stéphanie Pillonca ?
Lucile :
Complètement ! L'équipe était très pro et savait se faire oublier. Et puis, on flottait dans un nuage de bonheur qui nous dépassait tellement ! Rétrospectivement, on est ravis d'avoir une trace de ces instants, les plus beaux de notre vie, et qui sont passés comme l'éclair. On est fiers aussi de pouvoir témoigner que ça peut arriver, même après beaucoup de souffrances. Je n'oublie pas néanmoins que les élus sont rares et que nous avons eu une chance immense. Je n'oublie pas ceux qui ne recevront jamais ce coup de fil qui a changé toute notre existence. Stéphanie est une réalisatrice très délicate, la manière dont elle a pris soin de nous pendant ces quinze jours complètement fous, tout en nous filmant en effet dans des instants très intimes, était parfaite.