FÊTE DE FAMILLE : pourquoi voir le film de Cédric Kahn en salles 

"Aujourd'hui c'est mon anniversaire et j'aimerais qu'on ne parle que de choses joyeuses." C'est Andréa, la mère, qui le réclame pour que la réunion de famille dont elle est à l'initiative se passe sans perte et fracas. A tort... Dans la lignée de Festen, Another Happy Day et ces autres films dans lesquels les ronds de serviettes deviennent des rampes de guerres intestines, Fête de Famille, le onzième long-métrage du cinéaste Cédric Kahn, place le spectateur au cœur de saillies tous azimuts, qu'elles soient drôles ou tranchantes. En somme ? 24 heures au cœur d'une smalah aussi attachante que lardée de crevasses. Le Journal des Femmes vous donne trois bonnes raisons de faire connaissance.

Une photo de famille soignée

Il y a une maison. Belle à l'intérieur, arborée à l'extérieur. Tout juste quelques feuilles mortes ici et là, écho à certains meubles élimés et à ces travaux à prévoir. Le lieu est beau mais a perdu de sa superbe. Un peu comme eux. On le sent avant que les choses ne soient dites. C'est l'histoire d'une famille endettée. D'un groupe qui s'aime profondément tout en étant sur le fil, parfois à vif, et qui va imploser quand la fille aînée (Emmanuelle Bercot) débarque par surprise après trois ans d'absence en présentant d'électriques doléances. De quoi bousculer l'équilibre déjà précaire et entraîner un déferlement de vérités. Sans sombrer dans l'hystérisation, Cédric Kahn se sert de deux jolis pinceaux pour soigner son instantané : d'une main celui de la gravité, dont il use sans abus pour mettre en exergue les querelles en présence, et de l'autre celui de l'humour, qu'il dégaine quand la respiration se fait plus difficile. A ce jeu, l'équilibre est impec !

Fête de Famille : un casting aux petits oignons

Cédric Kahn a écrit le scénario en pensant à elle. Et il lui a fallu très peu de temps pour accepter d'en devenir la colonne vertébrale pour sa transposition sur grand écran. Catherine Deneuve, touchante et humaine à souhait, incarne ainsi la mère de cette Fête de Famille. Autour, ses enfants prennent les traits inspirés d'Emmanuelle Bercot, Vincent Macaigne et… Cédric Kahn himself. La première livre une prestation absolument sidérante, tout en explosions et en silences, dans la peau de cette fille qui revient (presque) d'entre les morts pour réclamer son dû. Un rôle extrêmement physique et intense pour lequel la comédienne se donne avec générosité et panache. Kahn et Macaigne ne sont pas en reste et séduisent par des jeux riches et complémentaires qui achèvent de faire de cette famille une mosaïque de toutes les familles. De celles où, souvent, autour d'une table ou à l'ombre d'un arbre, il est avant tout question de lutte de pouvoir.     

Cédric Kahn, un cinéaste passionnant

C'est un de nos metteurs en scène les plus précieux. De ceux qui ont une foi absolue dans ce qu'ils racontent et dont les récits naissent d'une nécessité artistique. D'ordinaire, il met du temps entre chacune de ses réalisations, peaufinant son travail pour offrir des opus aussi aboutis que Roberto Succo (2001), Feux Rouges (2004) ou La Prière (2018), pour lequel Anthony Bajon a remporté l'Ours d'Argent du Meilleur Acteur à Berlin. Mais pour Fête de Famille, le projet s'est monté rapidement. Et il est fort à parier que cette manière inédite de procéder a apporté de l'énergie à l'entreprise. Catherine Deneuve parle volontiers d'un groupe réuni à la manière d'une troupe de théâtre. Kahn a ainsi su, tout en jouant un des rôles principaux de son film, créer une véritable alchimie artistique, humaine et chorégraphique, transformant l'essai de son premier huis-clos. Lequel, qui plus est, se déploie sur une temporalité très courte.