Vincent Macaigne, électron libre

Dans "Des nouvelles de la planète Mars" en salles le 9 mars 2016, Vincent Macaigne est Jérôme, le collègue dérangé de François Damiens qui se promène avec un hachoir "pour se déstresser". Un personnage en proie à la folie douce dans lequel l'acteur se glisse avec brio.

Vincent Macaigne, électron libre
© Michaël Crotto
Vincent Macaigne (Jérôme) et François Damiens (Philippe Mars) © Michaêl Crotto

On l'avait quitté triste et transi d'amour dans Une histoire américaine, on le retrouve perturbé et follement amoureux dans Des nouvelles de la planète Mars. Vincent Macaigne semble abonné aux rôles d'antihéros dépressifs. Il assure pourtant ne pas l'être et se voit bien en "roi des connards". En attendant d'enfiler ce costume, c'est en jogging que l'acteur joue les perturbateurs dans la vie routinière de Philippe Mars (François Damiens). Dominik Moll raconte l'avoir choisi pour son côté "incontrôlable et excessif". S'il est loin d'être aussi dérangé et dément que Jérôme son personnage, le metteur en scène acteur à ses heures se raconte sincèrement mais semble pourtant insaisissable. Sur la planète Terre, Vincent Macaigne est un électron libre. 

Le JournalDesFemmes.com : Vous dites choisir les films pour les réalisateurs plus que pour les rôles. Qu'est-ce qui vous a plu chez Dominik Moll ?
Vincent Macaigne : J'avais beaucoup aimé Harry, un ami qui vous veut du bien et même si c'est un thriller et Des nouvelles de la planète Mars plutôt une comédie, je trouvais les similitudes avec mon personnage Jérôme intéressantes. Ce sont un peu des boudus. Entre Philippe Mars et Jérôme, il y a un petit côté Jacques Brel et Lino Ventura aussi. J'aimais bien l'idée de jouer un emmerdeur qui prend de plus en plus de place dans la vie de quelqu'un.

Etes-vous aussi incontrôlable ?
Vous voulez dire dans la vie ? Oh je ne sais pas. J'ai de la fantaisie, oui. Cela dit, Philippe Mars est un peu fou à sa manière. Quelqu'un qui essaie d'être aussi carré ne peut pas être complètement normal, non ?

Vous incarnez souvent l'anti-héros, le personnage un peu désaxé…
C'est sûrement ce que je dégage, je ne sais pas trop en fait. Peut-être parce que dans les films dans lesquels je joue, les personnages sont désaxés mais c'est propre à la période. Vous ne trouvez pas que la vie est un peu désaxée ? Dans les films aujourd'hui, l'homme a moins cette image "clean", cadrée. Son apparence a un peu changé. J'ai pas l'impression que mes rôles soient si fous, je ne sais pas. Cela dit, j'aime bien les rôles un peu borderline dans lesquels je me tape la tête contre les murs ou je me fais tabasser (rires).

Vous êtes souvent éconduit aussi. Aimeriez-vous incarner un super dragueur, bourreau des cœurs ?
J'adorerais. Je devais faire un film dans lequel je jouais un homme un peu affable qui a plein d'histoires d'amour et qui trimballe sa fille à tous ses rendez-vous. Ça ne s'est pas fait, c'est dommage car je trouvais ça rigolo. Mais pour revenir sur le fait que je joue souvent l'amoureux éconduit, je ne crois pas que ce soit propre à moi. Je l'explique plus par le fait que je travaille souvent avec des gens qui me sont proches et qui racontent des choses assez contemporaines sur l'amour, le couple qui se détruit. C'est plus ça que traduise les films, plutôt que l'amoureux éconduit.

Vous êtes metteur en scène. Le cinéma, c'est pour votre ego ?
Je ne le conçois pas du tout comme ça, non. Je ne fais pas des films pour l'idée de faire des films mais pour l'aventure, les rencontres. C'est pour ça que j'aime bien les cinéastes qui ont une vision, qui vont m'apporter des choses en termes d'univers. J'adore être acteur parce que c'est une énergie différente de mon travail de metteur en scène. Comme je ne dirige pas, j'ai moins de pression, on fait attention à moi. Je suis un peu comme un enfant quoi (rires).

Vous vous reposez…
Finalement pas tant que ça parce que je joue souvent dans des films d'amis proches donc je me mets un degré d'exigence assez élevé. Je suis souvent tout seul à me le mettre d'ailleurs mais c'est par respect pour le travail du réalisateur, son univers, son rythme et les autres acteurs aussi. Sur un plateau, tu fais partie d'une équipe.

Philippe Mars trouve que "l'époque n'est pas facile pour avoir confiance en l'avenir". Trouvez-vous l'avenir anxiogène ?
Je crois que c'est surtout Dominik Moll qui a peur de l'avenir. Je ne suis pas très angoissé, j'ai pas de craintes par rapport à l'avenir. C'est pas dans mon caractère. C'est vrai qu'on vit un moment un peu fou avec les nouvelles technologies, les iphone, google, la réalité virtuelle. La vie qui se rallonge aussi. Et paradoxalement, il y a Daesh, avec des idées très archaïques. Il y a beaucoup de changements et ça peut engendrer un phénomène de peur, d'extrême. Mais on est aussi obligés d'avancer, quoi. C'est inutile d'être contre tout.

Avez-vous un objet fétiche qui vous calme ?
Je ne suis pas du tout matérialiste. D'ailleurs j'oublie souvent les objets. J'ai plus des manies. J'ai souvent mal au dos donc je me le fais craquer. Je ne fume pas mais je bois pas mal de café. C'est un peu mes pauses clopes.

Jérôme tombe amoureux d'une fille un peu dérangée et leur amour a quelque chose d'un peu fou. Bien aimer, c'est aimer follement ?
C'est complètement bizarre comme question. Aimer, c'est quoi ? Il ne faut pas confondre l'amour avec la passion, qui n'arrive pas si souvent que ça d'ailleurs. L'amour passionnel ou très extrême est plus facile à lire parce que ça suscite un émoi très fort. Je ne sais pas si c'est mieux qu'un amour qui se construit petit à petit. Je ne crois pas qu'il y ait une meilleure façon d'aimer qu'une autre. Le couple c'est très culturel. Moi j'ai été élevé avec l'idée d'un couple classique. Je n'ai pas de grandes pensées là-dessus. J'essaie de m'en sortir avec ma propre éducation.

Comment était l'ambiance sur le tournage avec François Damiens aka François l'embrouille ?
Je ne le connaissais pas du tout. Le tournage était très studieux. Dominik Moll est un cinéaste très rigoureux et c'est ce qui donne au film son empreinte tenue. On a beaucoup travaillé donc ce n'était pas la grosse déconne quoi.

Que pensez-vous des César (question posée la veille de la cérémonie, ndlr) ?  
C'est un peu rasoir mais ça n'atteint pas les Molière. Quand t'es nommé aux Molière, c'est la honte, enfin moi j'ai honte. Ce que je trouve dommage avec les César c'est que ça récompense des choses qui ont déjà eu du succès. Du coup, par rapport à Cannes ou Berlin, il n'y a pas de prise de risque. C'est plus une sorte de consécration qu'une cérémonie de révélation. Je trouve que ça ne renouvelle pas l'envie d'aller voir des films. Si tu y réfléchis, à part le cinéma, il y a peu de métiers qui sont autant contents d'eux. Après c'est sympa quand même. Quand j'étais enfant, j'aimais bien les regarder.

Interview cosmique

Quel geste écolo faites-vous pour la planète Terre ?
Zéro. Je suis nul, c'est carrément horrible. C'est pas bien du tout. Si je ne suis pas obligé, je suis un peu égoïste mais je m'en veux. Je fais partie des gens qu'il faut gérer pour la planète. Je suis pas du tout hollandais ! Après je jette mes ordures normalement, je ne suis pas un ennemi de la planète non plus.

Avez-vous le sentiment d'être né sous une bonne étoile ?
Ma vie n'est pas si rose. Ce n'est pas parce que je fais des films que ça fait de moi un privilégié. Et puis, il y a peut-être des gens qui ont eu des facilités jeunes mais qui deviennent complètement dépressifs. J'ai vécu des choses assez compliquées et bizarrement je ne suis pas dépressif donc c'est plutôt bien.

Vous levez-vous à l'aube ?
Je me couche plutôt à l'aube. Je n'aime pas quand la journée se termine parce que je fais beaucoup de choses personnelles le soir. C'est mon moment de répit. Du coup, je repousse le moment d'aller me coucher pour avoir du temps pour moi.

Etes-vous plutôt lunaire ou solaire ?
Je suis assez bougon donc je doute être solaire. 

Des nouvelles de la planète Mars en salles le 9 mars 2016 © Diaphana Distribution