Plus on aime une personne..., moins on l'écoute

Selon plusieurs études américaines, nous avons tendance à ne pas écouter nos proches car nous savons déjà ce qu'ils vont nous dire...

Plus on aime une personne..., moins on l'écoute
© Andrea De Martin

"C'est comme si vous alliez si souvent sur une route, que vous n'en regardiez plus les panneaux", a écrit Kate Murphy dans un article du New York Times. L'écoute au sein du couple, une notion que l'on considère comme acquise, a intéressé des chercheurs en communication qui sont tombés sur les résultats suivants dans plusieurs études : Plus l'on se sent proche de quelqu'un, moins on l'écoute avec attention. Ce phénomène porte le nom de biais de la communication de proximité.

"Nous développons des stéréotypes sur les personnes que nous connaissons"

"Une fois que l'on connaît assez bien les personnes, une tendance inconsciente nous pousse à nous déconnecter de l'autre car nous savons déjà ce qu'il va nous dire", peut-on lire

Kaleena Goldsworthy en a fait la pénible expérience, lorsque sa sœur jumelle a décidé de déménager à New York pour tenter une carrière dans la musique. Les deux sœurs avaient toujours partagé leur quotidien et Kaleena ne l'avait pas vu venir : "Nous étions forcées de reconnaître que nous avons des idées préconçues sur qui nous étions (...) Nous ne nous écoutions pas", déclare-t-elle au quotidien newyorkais.

Des chercheurs en sciences sociales avaient déjà montré l'existence du biais de communication de proximité, en rassemblant des couples, des époux et des amis entre eux, puis avec des inconnus. Ils avaient alors observé que les proches avait un niveau de compréhension égal ou moins élevé que lorsque la conversation avait eu lieu avec un total inconnu. 

Pour Nicholas Epley, professeur à l'université de Chicago, comprendre l'autre personne "nécessite un second niveau de pensée, de se dire 'Attends, est-ce que c'est vraiment ce que cette personne voulait dire ?'". Il ajoute ensuite : "Nous développons tous des stéréotypes sur les personnes que l'on connaît bien, et ces stéréotypes nous conduisent à faire des erreurs".

Ce mécanisme qui ne nous permet pas de percevoir l'autre, a également sa réciproque : en nous exprimant peu, nous empêchons nos proches de nous écouter. Ces malentendus au sens propre du terme pourraient alors expliquer pourquoi des personnes au sein d'un couple ou d'une famille cachent des secrets.

Le manque de communication, accéléré par les technologies

Une étude menée par Mario Luis Small sur 38 étudiants, puis sur 2 000 Américains montrait que dans plus de la moitié des cas, les gens confiaient leurs craintes les plus personnelles à des personnes dont ils n'étaient pas substantiellement proches. Chez certains, les sujets critiques ne peuvent être abordés avec les proches de peur qu'ils ne les jugent ou qu'ils ne soient blessés.

Pour répondre à ce biais de communication, l'anthropologiste britannique Robin Dunbar conseille de maintenir des relations proches, et ce, par des conversations quotidiennes, dans lesquelles la personne écoute réellement la réponse de son interlocuteur.

Mais une autre étude réalisée aux États-Unis avait montré que la moitié de la population étudiée n'avait pas d'interactions sociales significatives, comme une simple conversation entre amis, et la même proportion se sentait isolée, malgré la présence d'autres personnes.

La technologie a malheureusement un rôle à jouer dans tout ça. Pour le docteur Epley, les objets numériques amplifient "le biais de communication de proximité, parce que nous devons composer avec moins d'information", en référence aux messages plus courts et l'absence d'indices tels que la voix et le corps de l'interlocuteur.