Mort de Philippe Gildas : album-souvenir

Chaussé de ses talonnettes, coiffé d'une touffe de cheveux grisonnante et paré de ses petits yeux rieurs, Philippe Gildas inspirait la sympathie à l'écran. Le journaliste et figure emblématique de Canal + s'est éteint à 82 ans, dans la nuit du 27 au 28 octobre 2018, à Paris, des suites d'un cancer.

Né le 12 novembre 1935 à Auray, dans le Morbihan, Philippe Leprêtre, de son vrai nom, se destine à une carrière de journaliste, après avoir raté ses études de Lettres. Lorsqu'il achève sa formation au CFJ (Centre de Formation des Journalistes), le jeune diplômé fait ses classes au journal local Nouvelle République du Centre-Ouest. "En deux semaines, j'ai découvert toute la difficulté du métier. La meilleure école, c'était le travail sur le terrain", s'est-il souvenu dans L'Écho Républicain. Puis, l'ambitieux père de famille débarque à Paris, accompagné de sa tribu, et est promu chef des informations générales au journal Combat.

Un homme polyvalent

Il change de registre et tombe amoureux de la radio, lorsqu'il intègre la rédaction de Radio Luxembourg, ancêtre de RTL, en 1962. Qui dit nouvelle vie… dit nouveau sobriquet ! Le journaliste, qui effectue son service militaire en parallèle, doit trouver un pseudonyme afin de pouvoir officier à l'antenne, sans que l'on ne reconnaisse son identité, à la caserne. Ce sera Philippe… Gildas, comme le prénom de son fils. Après sept ans de bons et loyaux services, il tire sa révérence. Touche-à-tout et désireux d'ajouter une corde à son arc, Philippe Gildas entre à l'ORTF, première chaîne de France, où il devient rapidement rédacteur en chef. Puis, l'homme aux grandes oreilles s'invite sur nos écrans de télévision en présentant sur Antenne 2,  La Tête et les Jambes, puis La Chasse au Trésor. En 1984, il épouse sa collègue d'Europe 1, Maryse Matuchet, avec qui il vivra une histoire d'amour passionnée jusqu'à sa mort.

La vie est une fête

C'est en 1985 que le succès frappe à la porte : Philippe Gildas rejoint Canal +, première chaîne payante en France, une révolution dans le PAF. À l'époque, le média n'existe que depuis un an. Après avoir créé et produit le Top 50, ce curieux journaliste tente d'innover et présente le talk-show Nulle Part Ailleurs, sorte d'ovni télévisuel qui allie information et divertissement. C'est ainsi que le concept, très actuel, de "l'infotainment" voit le jour. Accompagné de son compère Antoine de Caunes et de convives "habitués de la maison" comme les Nuls, l'animateur fait le bonheur de centaines de milliers de téléspectateurs, qui s'amusent des sketchs de son acolyte et des interviews loufoques de célébrités comme Sylvester Stallone. Après dix années de fous-rires et de séquences cultes, Philippe Gildas quitte l'émission en 1997, et fait ses adieux à la chaîne en 2001.

De la lumière... à l'ombre

S'il refuse de prendre sa retraite, l'animateur s'éloigne du feu des projecteurs et termine sa carrière en proposant des programmes pour des petites chaînes, telles que Comédie ! ou Paris Première, avant de créer Vivolta, média télévisuel pour les seniors. En 2010, le journaliste retranscrit, à sa manière, son expérience, dans son autobiographie Comment réussir à la télévision quand on est petit, breton, avec de grandes oreilles ?. Un titre plein d'auto-dérision, comme le personnage. Il en profite pour y transposer ses dernières volontés : "Maryse et moi avons décidé de nous faire incinérer. Et quand je passerai de l'autre côté des flammes, faites aussi l'économie de l'urne : répandez mes cendres au hasard, en vous amusant, comme je n'ai cessé de le faire." Une leçon de vie, même après la mort.