Pascale Arbillot : "Je suis très dure envers moi-même"

Starlette amoureuse d'un crooner désuet dans GUY d'Alex Lutz, Pascale Arbillot nous prouve qu'elle maîtrise, aussi, l'art de la dérision. Rencontre avec une actrice exceptionnelle, une femme sensible et "vraie", comme on lui dit souvent...

Pascale Arbillot : "Je suis très dure envers moi-même"
© Marechal Aurore/ABACA

Pascale Arbillot, je vous tends un miroir, que voyez-vous ?
Je suis dans le déni du narcissisme que cela impliquerait... Je trouverais cela absurde et déplacé. Je ne me regarde jamais dans les glaces, sauf durant mes cours de bar au sol, dans un souci de mieux travailler.  

Est-ce que votre apparence reflète celle que vous êtes ?
Oui, je pense enfin savoir exactement qui je suis. Il y a 5 ans pas du tout, il y a 10 ans, c'était un cauchemar...

Qu'est-ce qui vous a aidée à vous trouver ?
Vieillir, relativiser le physique, le désir. La psychanalyse aide beaucoup, les rencontres que j'ai faites récemment aussi : l'homme de ma vie, voir grandir mon fils et devenir vraiment responsable.

Le succès aussi rend beau, non ?
J'aurais pu démarrer plus vite dans le métier, faire carrière plus tôt et le succès m'a posé problème. J'avais une crainte illogique de la notoriété, de la reconnaissance, de voir poindre la gloire... Aujourd'hui, la seule peur que j'ai, c'est de ne plus pouvoir payer mon loyer et d'être dépendante de quelqu'un financièrement ou physiquement. 

Et la dépendance affective ?
J'étais fragile, très influençable… Je vais beaucoup mieux depuis que je me sens moins dépendante affectivement. Cette confiance se gagne avec le temps. C'est une forme d'apprentissage… Maintenant, plus personne ne me dira ce que je dois faire !

Prenez-vous soin de vous ?
Oui ! Avant, parce que je ne m'aimais pas. Quand je lisais un scénario où il était écrit "elle est belle et souriante", je m'affolais, complexais et sombrais dans l'excès. A 40 ans, j'ai décidé de vivre le plus longtemps possible et en bonne santé. Je veux rester maître de mon corps et cela passe par le sport et une bonne hygiène de vie, mais je ne le fais plus de manière stakhanoviste. 

Vous convenez que votre silhouette est très élancée...
Je suis mince alors que j'étais très maigre. Je m'affamais, j'avais un rapport à la nourriture aberrant, un comportement coupable anormal. Je réalise seulement qu'il suffit de faire de la danse, de courir de temps en temps, de manger un peu de tout...

Qui influençait votre façon d'agir ? 
C'est le regard que l'on porte sur soi, une projection infantile, une façon de vivre à travers la vision de ses parents ou de ce que les autres pensent de vous...

Vous nous aviez confié que votre expérience la plus fulgurante avait été d'accoucher de votre enfant il y a 12 ans...
Et la deuxième sera de devoir lâcher mon fils dans la nature, lui permettre d'être libre, le laisser évoluer, être heureux, accepter qu'il m'appelle ou qu'il ne m'appelle pas... J'ai une peur absolue de l'embourgeoisement. 

Avez-vous fait des concessions au fil de votre parcours ?
Je suis très dure envers moi-même, mais aussi envers les autres. Ne pas être trop indulgent permet de rester vigilant, mais je dois être plus cool avec mon entourage, arrêter de vouloir avoir toujours raison...

L'ère des selfies, des photos à tout-va, est-ce une nouvelle pesanteur ?
C'est une intrusion atroce. Je n'en souffre pas car je ne suis pas une star que l'on poursuit jusque dans son intimité où à la plage..., mais l'on connaît tous l'envers du décor. Naturellement, je me cache et je n'aime pas que l'on me voit. Mon compte Instagram est tout pourri. J'ai appris il y a deux jours à faire un repost… Je ne suis ni à fond ni en dehors du système. C'est utile pour rester en contact et j'aime l'idée de ne pas être une pro. Mon Instagram me ressemble et c'est comme cela qu'il faut l'utiliser. 

Quel mot aimez-vous particulièrement entendre ou prononcer ? 
"Slip", c'est rigolo.

Quelle place accordez-vous à la dimension sexuelle ?
Elle est omniprésente même quand je n'ai pas de sexualité. Comme beaucoup de femmes, cela peut être 100% et 0% de ma vie, en mode alternatif. 

Quel compliment vous fait-on souvent ?
On me dit que je suis vraie. 

Qu'est ce qui peut vous rendre violente ?
De ne pas être entendue, vue, prise en considération… La non empathie. Comme je ne tape pas (encore) les gens, je détruis une pièce. Cela m'est arrivé une fois. J'ai tout cassé dans ma chambre, arraché le papier-peint…

Pourriez-vous vivre sans le portable ?
C'est mon objectif, mais je n'y arrive pas. C'est devenu un tic. Avant, j'allumais ma clope, maintenant je checke mon téléphone. Je ne sais pas ce qui est le plus toxique...

Quel était votre tout premier boulot?
J'étais gratte-papier dans une agence bancaire, je tamponnais des papiers verts...

Aimez-vous votre visage ?
Je le trouve changeant et cela n'est pas plus mal. Ce caractère m'offre l'opportunité d'avoir plusieurs possibilités de personnages, de vies...

Seriez-vous prête à le changer ?
Si c'est pour assumer comme Jane Fonda, je signe, mais ce serait une connerie absolue si cette envie reflétait un mal-être. En revanche, j'adorerais me transformer pour un rôle, une performance, prendre 30kg… Une métamorphose magnifique et bouleversante.  

A quelle question n'aimez-vous pas répondre?
Une question sur mon haleine, ça me déprime.

Qu'est-ce qui était mieux avant ? 
Tout et rien. Ah si, les vélibs ! Et le design des voitures.