Tel Aviv on Fire, Los Silencios, Curiosa : nos coups de cœur du 3 avril

Tel Aviv on Fire de Sameh Zoabi

Traiter la thématique du conflit israélo-palestinien par le prisme de l'humour, c'est le pari risqué qu'a relevé avec succès le cinéaste palestinien Sameh Zoabi pour les besoins de sa seconde réalisation : Tel Aviv on Fire. Le titre du long-métrage en question est également celui du soap opera qui en est le fil conducteur. C'est précisément à travers le regard de Salam (Kais Nashif, primé à Venise), 30 ans, stagiaire sur le plateau de la série, que l'on en découvre les coulisses. Fauché, malhabile, de guingois, ce dernier galère autant dans son socle professionnel qu'au-dehors, où, tous les jours, il doit passer le même checkpoint pour bosser à Ramallah. Son destin bascule quand il se fait arrêter par Assi, un officier israélien ultra fan dudit show télévisé, et qu'il lui annonce, pour se dédouaner, qu'il en est le scénariste principal. S'ensuit alors une relation électriquement amicale entre ces deux protagonistes que tout oppose et qui, par à-coup, se voient rattraper par leur propre histoire de tourments. Tisser des passerelles à travers la fiction et l'art, offrir un regard nouveau et amusé sur une terre souvent synonyme de violence et de sang : tel est le programme de ce plaidoyer pour le vivre-ensemble qui fait du bien aux zygomatiques.  Mehdi Omaïs            

Avec Kais Nashif, Lubna Azabal, Yaniv Biton (1h37)

Curiosa de Lou Jeunet

Pour s'acquitter des dettes de son père, Marie de Héredia épouse le poète Henri de Régnier, mais c'est avec Pierre Louÿs, homme de lettres également, mais surtout aventurier, pornographe et voyageur qu'elle va s'initier au désir… Curiosa séduit tant par son esthétique que par le jeu de ses acteurs. Tant pour la peinture d'une époque que pour celle de la passion.
L'art de la photographie érotique se juxtapose avec délice à celui de la littérature. Nudité des corps, drames de la sensualité, affres des sentiments font de cet opus aux dialogues érudits et aux mots soignés, un trésor enivrant.
Magnifique réalisation symbolique et culottée de Lou Jeunet. Mention spéciale aux interprètes (Camélia Jordana et Niels Schneider en tête), qui, souvent dans le plus simple appareil, prennent la pose sans exhibition, mais avec aisance et musicalité. Justine Boivin
Avec Noémie Merlant, Niels Schneider, Benjamin Lavernhe (1h47)
 

Los Silencios de Beatriz Seigner

Découvert l'an dernier à la Quinzaine des Réalisateurs du Festival de Cannes, Los Silencios marque la seconde réalisation de la brésilienne Beatriz Seigner. De manière quasi-documentaire, en congédiant toute afféterie ou tout usage de musique, elle se penche sur le sort de Nuria, 12 ans, Fabio, 9 ans, et de leur mère ; lesquels débarquent sur une petite île au cœur de l'Amazonie, entre le Brésil, la Colombie et le Pérou, pour fuir le conflit armé colombien qui sévit depuis des décennies. Dans un écrin à la fois sublime et désolé, propice à un ancrage dans la réalité comme à un décrochage dans la fantasmagorie, la cinéaste raconte le retour du père disparu et le combat d'une famille, dans un monde à l'agonie, pour retrouver une place, un foyer, un destin. Pour ce faire, elle élude le traitement de la violence, masquant les armes et le sang en les rendant, in fine, davantage présents dans l'esprit du spectateur. Si l'apparente aridité du procédé de mise en scène, qui refuse la sensiblerie et le misérabilisme, peut en désarçonner plus d'un, il y a dans cette divagation saisissante la marque d'une réalisatrice au regard passionnant, acéré et totalement lucide. Derrière les envolées fluorescentes, entre morts et vivants, elle livre en effet le réel dans sa nudité. Mehdi Omaïs  

Avec Doña Albina, Yerson Castellanos, Enrique Díaz (1h29)

Terra Willy – Planète Inconnue de Eric Tosti

Le jeune Willy a pris ses quartiers dans l'espace. En compagnie de ses parents, il vogue entre les étoiles et les planètes… Pour le meilleur… Jusqu'à ce que le pire se produise. Après la destruction de leur vaisseau, sa capsule de secours finit sa course loin de son papa et de sa maman, en plein milieu d'une planète sauvage qui n'a jamais été explorée par les hommes. Avec pour seul ami Buck, un robot façon R2D2, le voilà plongé dans un univers dans lequel il lui faudra apprendre à survivre en utilisant sa matière grise et sa sensibilité. Ce voyage initiatique et de connaissance de soi est le fruit de cinq années de développement, dont 24 mois de fabrication ayant mobilisé près de 150 personnes. Avec une grille de lecture davantage tourné vers les enfants, Terra Willy – Planète Inconnue des frenchies Éric Tosti (à la réalisation) et David Alaux et Jean-François Tosti (au scénario) offrent ce qu'il faut de couleurs, de personnages secondaires amusants et de péripéties en tous genres pour fasciner tous les petits aventuriers qui sommeillent en nous. En chemin, le trio n'oublie pas d'essaimer une large panoplie de références sur lesquelles les parents devraient prendre du plaisir à surfer : de Star Wars à Predator en passant par Retour vers le futur ou Rambo. Mehdi Omaïs    

Avec Timothé Vom Dorp, Edouard Baer, Marie-Eugénie Maréchal (1h30)