La misogynie, c'est quoi ?

Manifestation ostentatoire du sexisme hostile envers les femmes, la misogynie, littéralement haine des femmes, est un symptôme du patriarcat. On fait le point.

La misogynie, c'est quoi ?
© Anton Estrada/123RF

Qu'est-ce que la misogynie ? Définition

La misogynie est un mépris affiché, une hostilité manifeste, envers les femmes. Le terme vient du grec ancien misos, haine, et gyné, femme.

Quelles sont les causes de la misogynie ?

La misogynie est un phénomène historique, dont on trouve les traces dans l'ensemble des grandes périodes de l'Histoire occidentale, de l'Antiquité à nos jours. Le sexisme, la misogynie, le machisme qu'on retrouve à l'école, au travail, dans l'éducation des enfants, à la maison, à la télévision, dans les médias... sont à la fois le résultat mais aussi la cause de ces attitudes discriminatoires, parfois violentes envers les femmes. Ces comportements misogynes permettent de justifier et de maintenir l'organisation patriarcale de la société.

Misogynie intériorisée/intégrée : de quoi s'agit-il ?

On parle de misogynie intériorisée/intégrée, comme de sexisme intériorisé. Il s'agit de stéréotypes de genres, ou de mépris envers les femmes pour la misogynie, que de nombreuses personnes, des femmes également, ont intégré inconsciemment et malgré elles. Les femmes ont intégré le rôle que leur assignait la société patriarcale. "Parce qu'historiquement, on a toujours fait reposer la responsabilité de l'éducation sur elles, les femmes ont l'impression d'être de mauvaises mères si les exercices de maths ne sont pas terminés, avec une culpabilité plus grande que les pères. Le sexisme intériorisé est aussi dur à éradiquer que le sexisme extériorisé. Mais c'est justement en prenant conscience de ces mécanismes qu'on arrive à les combattre", expliquait ainsi la journaliste féministe Lauren Bastide dans une interview à Marie-Claire, publié le 10 octobre 2020.

Les stéréotypes de genre, on grandit avec, on les retrouve dans tous les domaines de la vie, à l'école, au travail, à la maison... "C'est une construction très inconsciente, lente et graduelle, qui vient de très loin, qui existe parce qu'on a baigné depuis la naissance dans un climat sexiste, patriarcal, avec des signes quotidiens d'encouragement à la dépréciation du féminin", commentait la vidéaste Solange te parle dans l'une de ses vidéos diffusés sur YouTube. "Quand on a baigné dans un environnement qui ne met pas en valeur ce que vous êtes, vous êtes assez prompt à vous déprécier vous-même et ce qui vous ressemble. Et je suis coupable de ça (…) La petite fille en moi pense que la reconnaissance doit venir des hommes et cela a des conséquences néfastes sur mes rapports avec mes sœurs, mes semblables, les femmes, les filles", poursuit-elle dans cette vidéo baptisée Je suis misogyne.

Quelle différence entre la misogynie et le sexisme ?

Le Haut Conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes définissait ainsi le sexisme dans son premier état des lieux du sexisme France : "une idéologie qui repose sur le postulat de l'infériorité des femmes par rapport aux hommes, d'une part, et d'autre part, un ensemble de manifestations des plus anodines en apparence (remarques...) aux plus graves (viols, meurtres...). Ces manifestations ont pour objet de délégitimer, stigmatiser, humilier ou violenter les femmes et ont des effets sur elles (estime de soi, santé psychique et physique et modification des comportements)". La misogynie est une manifestation du sexisme lorsqu'il s'exerce, avec un mépris affiché, à l'encontre d'une femme.

La prise de conscience

"Il existe donc une 'misogynie ambiante', indiscernable et indolore, dans laquelle nous évoluons tous et toutes, sans en avoir conscience. Elle est constituée de normes, d'attitudes et de comportements qui passent pour naturels tant que personne ne les considère comme le produit des rapports sociaux de genre. Mais entre le moment où les lanceurs d'alerte (en général les féministes et les chercheurs et chercheuses en sciences humaines et sociales) s'emparent de la question et celui où elle bénéficie d'une couverture médiatique suffisamment large pour permettre une prise de conscience collective, il peut se passer beaucoup de temps", écrit l'historien de la sexualité Maurice Daumas auteur de Qu'est-ce que la misogynie ?.

Dans le sillage de #MeToo et #BalanceTonPorc, la dénonciation publique des comportements sexistes et misogynes et la critique d'une société patriarcale qui maintient les femmes en état d'infériorité par rapport aux hommes sont désormais des discours audibles et présents dans l'espace public, les médias, le champ politique. Ce gain de légitimité, encore récent, est-il suffisant pour permettre une prise de conscience collective ? Dans son état des lieux du sexisme en France, le Haut Conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes note à travers les différentes enquêtes disponibles que "le sujet des inégalités est aujourd'hui jugé important au sein de la société".

Les espaces de dénonciations des comportements sexistes ont explosé en même temps qu'une libération de la parole : de Paye ta Shnek en 2012 à Balance ta rédaction en 2020, en passant par #MeToo et #BalanceTonPorc sur Twitter ou Facebook, ces dénonciations ont contribué à sensibiliser l'opinion publique.

Comment lutter contre la misogynie ?

Pour lutter contre la misogynie, il faut lutter contre le sexisme et les stéréotypes de genre en sensibilisant à l'égalité dès la maternelle et en éliminant toute manifestation du sexisme à l'école. La sensibilisation et la fin de la tolérance à l'égard de comportements sexistes et misogynes demeurent primordiaux.

Dans son premier état des lieux sur le sexisme en France, le Haut Conseil à l'Egalité entre les femmes et les hommes avait identifié cinq leviers sur lesquels agir pour faire reculer efficacement le sexisme.

  • Mieux mesurer le sexisme, par le financement d'une enquête d'opinion annuelle, qui interroge notamment chacun.e sur les actes sexistes dont il ou elle est l'auteur.
  • Faire reculer le sexisme en permettant de mieux le repérer, par des campagnes de sensibilisation, la formation des professionnel.le.s, en particulier des médias, des arts et de la communication et par la reconnaissance d'une journée nationale contre le sexisme.
  • Faire reculer le sexisme en condamnant davantage les auteurs. Cela implique la formation des professionnel.le.s de la sécurité et de la justice.
  • Accompagner les victimes de sexisme en renforçant les financements des associations qui les accompagnent.
  • Garantir une action publique exempte de tout sexisme.