Vie pro : quand les violences conjugales nous poursuivent au travail

Les violences subies dans la sphère intime se répercutent sur notre vie sociale et professionnelle. La Fondation Kering et la Fondation Agir Contre l'Exclusion ont dévoilé les résultats d'une enquête exclusive menée dans 6 pays, sur un panel de plus de 6 000 salariés.

Vie pro : quand les violences conjugales nous poursuivent au travail
©  Elnur Amikishiyev

Créé en 2018 par la Fondation Agir Contre l'Exclusion et la Fondation Kering, le réseau OneInThreeWomen regroupe des entreprises (BNP Paribas, Carrefour, L'Oréal, SNCF, Korian...) qui luttent contre les violences conjugales. Pour la première fois, une enquête a été réalisée dans 6 pays européens, auprès de 6 639 salariés de ces sociétés partenaires, pour connaître l'impact que les violences conjugales peuvent avoir sur la vie professionnelle. 

Effets des violences conjugales au travail : absentéisme, menaces et retards

Les coups durs de la vie influent sur notre productivité en envahissant notre espace de travail. 55% des sondés déclarent qu'ils ont dû s'absenter, arriver en retard au travail ou subir un manque de productivité à la suite des violences dont ils ont été victimes.

Mais les violences peuvent se manifester de plusieurs manières. Ainsi, 16% des femmes et 13% des hommes ont confié connaître ou avoir connu un collègue victime de violences conjugales grâce aux "indices" suivants :

  • Des troubles émotionnels (11%)
  • Des indices ou confessions de problèmes à la maison (10%)
  • Des blessures physiques (9,5%)
  • Des changements au niveau de la performance et de la productivité (9,5%)
  • Des absences et des retards (9,3%)
  • Un calme ou une discrétion inhabituelle (8,1%)

Le stress (85%) est le facteur principal entraînant une baisse des capacités et de la concentration chez la personne victime. En effet, celle-ci peut faire l'objet de harcèlement par téléphone et/ou messages sur son lieu de travail (87%), par email (33%) ou encore être persécutée physiquement près de son lieu de travail (57%) ou directement sur place (44%).
37% des victimes disent que leur agresseur est entré en contact avec ses collègues, allant même jusqu'à les menacer (33%).

Des victimes honteuses et silencieuses

L'enquête de OneInThreeWomen révèle que seules 37% des victimes parlent de leurs soucis à des collègues de bureau, tandis que 67% d'entre elles disent que la honte, le déni et la peur les ont empêchées de partager leurs douloureuses expériences.
Le manque de connaissances pour faire face à ce type de problèmes en entreprise est également pointé du doigt. Les données des sondages nous informent qu'environ 15% des femmes et 20% des hommes savent à qui s'adresser et quelles dispositions ils peuvent prendre, en cas de violences conjugales pour se faire aider. 

"J'ai été cadre d'entreprise pendant 3 ans et j'encourageais les membres de mon équipe à venir me parler s'ils/elles avaient des problèmes personnels qui étaient susceptibles d'affecter leur travail. Certain.e.s l'ont fait et je les ai encouragé.e.s à contacter leur responsable régional, la police, les numéros de téléphone d'aide etc. Je trouve que beaucoup de gens n'en parlent pas par peur d'être jugé.e.s. Comme je suis plus âgé.e que la majorité de mon équipe, je pense qu'il leur a paru un peu plus facile de m'en parler, mais si leur responsable est plus jeune, ils/elles ont plus de réticences", raconte une personne qui a pu témoigner de l'impact des violences conjugales au sein de la vie professionnelle, auprès du réseau OneInThreeWomen.

Une victime rapporte, quant à elle : "Je n'ai reçu aucune aide de la part de ma direction qui était au courant de ma situation, mais j'aurais probablement pu éviter l'accident qui m'a rendu handicapée à vie… J'ai été aidée par SOS Femmes Solidarités, mais cela n'a pas empêché les violences de s'intensifier."

Méthodologie : Sondages menée par 4 chercheuses internationales, auprès des salarié.e.s de 6 entreprises membres du réseau (Kering, L'Oréal, Korian, BNP Paribas, Carrefour et OuiCare) dans 6 pays (France, Belgique, Allemagne, Espagne, Italie et Royaume-Uni). et reposant sur un questionnaire en ligne destiné aux salarié.e.s, un deuxième destiné aux responsables des ressources humaines et de la diversité, ainsi que des entretiens réalisés auprès des responsables des ressources humaines et de la diversité.