Nathalie Péchalat : "J'ai décidé de ne plus subir"

Danseuse sur glace d'exception au côté de Fabien Bourzat, Nathalie Péchalat a souvent été paralysée par le doute. La présidente de la Fédération Française des Sports de Glace qui attend son deuxième enfant explique dans l'ouvrage "Les Bénéfices du Doute" (Ed. Marabout) comment elle a réussi à transformer cet ennemi en partenaire de vie !

Nathalie Péchalat : "J'ai décidé de ne plus subir"
© Editions Marabout

Médaillée de bronze aux championnats du monde, double championne d'Europe et quintuple championne de France : le palmarès de Nathalie Péchalat qui patinait avec Fabien Bourzat met des étoiles dans les yeux de nombreux petits patineurs. Et pourtant la compagne de Jean Dujardin, maman d'une petite Jeanne, 5 ans, et enceinte de leur 2e enfant, s'est souvent battue contre un ennemi intime et sournois : le doute.
C'est après avoir compris qu'elle devait le nommer et l'affronter que la présidente de la Fédération Française des Sports de Glace l'a apprivoisé. Libérée de son influence négative, Nathalie Péchalat donne des clés dans l'ouvrage Les Bénéfices du Doute (Ed. Marabout) pour bien vivre avec celui qu'elle appelle Monsieur doute. Rencontre avec une championne, une future maman de son deuxième enfant avec Jean Dujardin et une femme en paix avec elle même qui a accepté de dialoguer avec cette petite voix intérieure qui l'a fait grandir, rebondir… et gagner !

Vous expliquez dans votre ouvrage que votre carrière qui a duré 23 ans a été un concentré de doutes. Est-ce que c'est propre à tous les sportifs de haut niveau ?
Nathalie Péchalat :
Tout le monde est concerné par le doute et à fortiori les sportifs de haut niveau. Nous sommes confrontés à des condensés d'émotions. Il faut aller très vite. Chaque heure qui passe peut être perdue si on ne l'utilise pas correctement. Je pense donc que tous les grands champions doutent. Pour réussir on doit traverser ces périodes là et les accepter. 

Vous avez commencé le patinage à 7 ans et vous n'aviez aucun doute. Est-ce que ça veut dire que durant l'enfance la passion occulte tout ?
Nathalie Péchalat :
Effectivement quand on est enfant, on est dans le jeu et dans le plaisir. On prend plaisir à faire des activités sportives ou artistiques. On se ne pose pas de questions car au début il n'y a pas d'objectifs et pas d'enjeux. Il n'y a que du jeu. Je me souviens que tout était simple quand j'étais enfant. C'est à l'adolescence que tout devient plus complexe. 

A quel âge avez-vous rencontré "Monsieur doute" pour la première fois ?
Nathalie Péchalat :
Au début de l'adolescence donc vers l'âge de 13 ans. A l'époque je ne l'apprivoisais pas du tout. Il était très envahissant. Il me perturbait, me prenait beaucoup de temps et je n'arrivais pas à le gérer. Il se manifestait quand ce n'était pas le bon moment et il était très nocif. J'avais l'impression que je ne pouvais pas m'en défaire et je ne voyais pas d'issue. 

"Enfant, je ne voulais pas faire de vagues"

Comment étiez-vous enfant et adolescente ?
Nathalie Péchalat : J'étais timide et dans mon coin. Je n'étais pas plus sensible qu'une autre, mais je traçais ma route. Je ne voulais pas faire de vagues. Je voulais avoir la vie la plus normale possible.

Vous évoquez deux Monsieur doute : le doute objectif et le doute subjectif. Quelle est la différence entre ces deux formes de doutes ?
Nathalie Péchalat :
Le premier peut se régler avec du travail en avançant par étapes. Il est plus calculable et une certaine logique permet de le combattre. Le doute subjectif est lié à de la pure interprétation, à des émotions, des sensations voir des intuitions et il est beaucoup plus complexe. Cela demande de s'affirmer soi et ce n'est pas évident quand on n'a pas le caractère pour. Or je n'avais pas le caractère pour quand j'étais plus jeune !

Au cours de votre carrière le doute été votre ami et votre ennemi. Vous dites ainsi qu'en 2010/2011, il a collaboré avec vous. Pouvez-vous nous en dire plus ?
Nathalie Péchalat :
Au fil des années, j'ai essayé de m'en éloigner le plus possible mais ce n'était pas non plus la solution. En 2010 je me suis dit que le doute avait peut-être quelque chose à m'apporter et que cela valait le coup de l'écouter. C'est là que nous avons commencé à collaborer et que j'ai atteint des objectifs que je n'aurais jamais pensé atteindre. C'est ma nouvelle relation avec le doute et la prise de conscience qu'il resterait dans ma vie qui m'a  décidé d'apprendre à l'apprivoiser. Cela a pris encore des années avant que je mette en place des vraies règles de vie avec le doute. J'ai décidé de ne plus subir.

"Il faut nommer le doute pour l'accepter"

Dans votre livre, vous expliquez que le Grand Prix de Chine en novembre 2010 a été un tournant. Pendant l'échauffement, vous chutez plusieurs fois mais vous vous réussissez ensuite parfaitement votre prestation. Que s'est-il passé ?
Nathalie Péchalat :
C'est effectivement là que j'ai eu un déclic. J'ai réalisé que le doute était différent du stress. Le stress est normal mais je me suis dit après avoir chuté 3 fois que ce n'est pas parce que j'étais stressée que je devais douter. Je savais que je pouvais le faire donc j'ai dissocié les deux en réussissant à  nommer le doute et à l'accepter.

© Editions Marabout

Quelles sont les étapes pour bien le gérer ?
Nathalie Péchalat
 : Il faut le nommer, l'accepter, s'octroyer le droit de douter. Il faut ensuite l'apprivoiser pour avoir une relation d'égal à égal et fixer des règles. C'est là qu'il devient un allié.

Avez-vous utilisé certaines techniques de relaxation pour gérer le doute ?
Nathalie Péchalat : J'ai fait un cheminement personnel mais il est vrai que tout au long de ma carrière je me suis aidée de mes rencontres avec des coachs, des chorégraphes, des psychologues ou des sophrologues. Ces rencontres m'ont fait avancer jusqu'au jour où j'ai réalisé qu'au lieu d'être un poids, le doute pouvait être un moteur. Cela été inconscient au début puis conscient et j'en ai fait un outil de pour être bien dans mes patins et dans mes baskets !

"J'explique à ma fille comment chasser ses doutes quand ils sont trop présents"

Vous êtes depuis le 14 mars dernier présidente de la fédération des sports de glace : est-ce que toute ces années avec "Monsieur doute" vous ont permis d'être plus forte ?
Nathalie Péchalat :
Ce cheminement m'a servi dans ma vie personnelle et professionnelle. Aujourd'hui le doute me sert bien entendu. Il faut parfois douter, parfois tolérer le doute  et parfois ne surtout pas douter. Ce poste de présidence de la FFSDG amène à prendre des décisions et à les assumer. La prise de décision passer par une phase d'coute mais aussi de doute.

Comment expliquez-vous le doute à votre fille (Jeanne, 5 ans, dont le papa est Jean Dujardin) ?
Nathalie Péchalat :
Je m'emploie à créer pour ma fille une relation avec le doute même si elle est encore petite. Je lui explique que ses doutes sont normaux  et comment les chasser quand ils sont trop présents. J'essaie de lui apporter ce que j'aurais aimé apprendre à son âge et donc plus tôt. Ce n'est pas un reproche adressé à mes parents (rires). Mais il est vrai que si j'avais pu éclairer plus tôt ma relation avec le doute j'aurais mieux vécu toutes les situations !

Le doute, qu'est-ce pour vous aujourd'hui ?
Nathalie Péchalat :
C'est mon allié. Si je ne vois pas pendant plusieurs jours, je me dis que cela ne va pas bien  (rires) et qu'il faut que je le convoque ! Je le vois comme un moteur de succès ! Le doute est formidable pour relativiser, se remettre en question. J'ai aussi écrit ce libre pour inciter les lecteurs et les lectrices à le sortir du placard et à enfin le regarder en face.