Dyscalculie : comment repérer les signes chez l'enfant ?

La dyscalculie est un trouble spécifique des apprentissages mathématiques. Comment la reconnaître et quelle prise en charge est possible pour accompagner les enfants ? Les réponses de Jérémy Perichon, orthophoniste.

Dyscalculie : comment repérer les signes chez l'enfant ?
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Qu'est-ce que la dyscalculie ?

[Mise à jour du 12 avril 2022]. Le Trouble Spécifique des Apprentissages Mathématiques (appelé aussi dyscalculie) est un trouble développemental des compétences numériques et des habiletés arithmétiques. Comme le rappelle Jérémy Périchon, "la prévalence de la dyscalculie serait comparable à celle de la dyslexie (2 à 6 %), pourtant son diagnostic est moins souvent posé." Selon les certains auteurs, la prévalence est plus importante chez les garçons que les filles, de l'ordre de 2 pour 1, alors que pour d'autres elle serait de 50/50. Il n'existe pas de consensus en la matière. Il arrive que la dyscalculie soit associée à d'autres troubles, mais ce n'est pas toujours le cas : trouble développemental du langage (ou dysphasie), trouble spécifique du langage écrit (ou dyslexie), trouble déficitaire de l'attention avec / sans hyperactivité (TDA/H), trouble de la Coordination Motrice (ou dyspraxie)

Les performances attendues d'un enfant varient en fonction de son âge mais des signes de dyscalculie peuvent être identifiés dès la grande section de maternelle. Jérémy Périchon détaille les signes qui doivent alerter les parents selon l'âge de l'enfant :

Signes de la dyscalculie en grande section de maternelle 

  • Difficultés à compter des objets en les pointant du doigt
  • Difficultés à compter sur des doigts 
  • Difficultés à réciter les nombres jusqu'à 30

Signes de la dyscalculie en à l'école primaire

  • Difficulté à lire ou écrire des nombres 
  • Difficultés à apprendre les additions simples (ex : 2+2, 5+5, 4+4 …)
  • Difficultés en calcul mental 
  • Difficultés pour poser des opérations
  • Difficultés à apprendre ou à mémoriser les tables de multiplication 
  • Difficultés en numération (notions de dizaine, de centaine …) 
  • Difficultés à résoudre des problèmes mathématiques 
  • Difficultés à comprendre le langage mathématique (ex : la différence, la somme, la quantité, plus que, moins que, deux fois plus que, etc.).

Signes de la dyscalculie dès le collège

Tous les autres signes précédemment cités plus des difficultés à gérer l'argent ou son budget, des difficultés à comprendre les fractions.

"La suspicion d'une dyscalculie repose sur la persistance des difficultés évoquées malgré les aides et/ou aménagements apportés par l'école et les parents.", explique Jérémy Périchon. Les parents peuvent consulter en première intention le médecin généraliste ou le pédiatre qui les orienteront ensuite vers l'orthophoniste

Le diagnostic orthophonique s'appuie sur plusieurs critères : 

  • Persistance des difficultés mentionnées ci-dessus et durabilité depuis plus de 6 mois malgré les interventions mises en place
  • Habiletés numériques inférieures aux enfants de la même classe d'âge 
  • Retentissement fonctionnel dans le quotidien du patient et/ou de la famille : école, maison, copains …  (ex : conflits pendant les devoirs, réussite scolaire, isolement, repli sur soi, anxiété, etc.)
  • Présence d'antécédents familiaux de dyscalculie (critère facultatif)
  • Retentissement fonctionnel du trouble dans le quotidien du patient et/ou de la famille : école, maison, autre lieu de vie …  

"L'enfant porteur d'un trouble des apprentissages mathématiques est doté d'une intelligence considérée comme normale (Q.I > 70). Il ne doit pas présenter de pathologies neurologiques, génétiques ou sensorielles (trouble de la vue ou de l'audition) ou de troubles du comportement (psychopathologie).", ajoute l'orthophoniste. 

"Il n'y a pas de solution toute prête. La prise en charge est adaptée au profil de chaque enfant ainsi qu'au contexte familial et environnemental.", annonce d'emblée le spécialiste. Ce dernier insiste sur la nécessité de bien cerner les difficultés de l'enfant afin de  proposer à l'enfant et à ses parents des aides adaptées aux spécificités de l'enfant et utilisables dans leur quotidien. L'intervention orthophonique va donc cibler des objectifs spécifiques, préalablement discutés et concertés avec le patient et sa famille, pour répondre à leurs besoins singuliers. "L'orthophoniste pourra revoir avec l'enfant les bases du calcul, le sens du nombre, le langage mathématique, les stratégies pour résoudre un problème", détaille Jérémy Périchon. La prise en charge rééducative pourra être pluridisciplinaire en fonction de l'origine des difficultés et de leur sévérité. Si plusieurs troubles sont associés, on pourra faire appel à : un orthoptiste, un ergothérapeute, un neuropsychologue, un psychologue etc.

Une adaptation pédagogique, en parallèle de l'intervention orthophonique, est recommandée en classe. L'intervention orthophonique tend à rendre l'enfant autonome afin de lui permettre de réaliser ses activités de la vie quotidienne sans se sentir gêné ou limité. Une collaboration avec l'enseignant facilitera alors la mise en place et l'utilisation d'outils (objets à manipuler, calculatrice, tables de multiplication, aides technologiques et numériques …) lui permettant de réaliser ses tâches de la vie quotidienne en autonomie (partielle ou totale). 

"Les parents seront des partenaires indispensables de la prise en charge orthophonique. Ils seront des acteurs essentiels œuvrant à l'atteinte des objectifs décidés préalablement tous ensemble.", explique l'orthophoniste. Au quotidien, les parents peuvent aider de différentes manières : 

  • Comprendre et accepter le fonctionnement de son enfant : "il ne fait pas exprès / semblant", "cette activité est difficile pour lui car les chiffres ne lui font pas sens", "il est normalement intelligent", "certaines activités sont faciles au quotidien mais les activités autour des chiffres et des nombres sont difficiles pour mon enfant".     
  • L'impliquer dans la gestion d'un petit budget au quotidien (manipulation d'argent, calcul mental ...) 
  • L'accompagner pendant le temps des devoirs : trouver ensemble des astuces et des stratégies pour l'aider à réussir par lui-même ses exercices. Préférer les périodes courtes et fréquentes de devoirs.
  • Laissez-le utiliser toutes les stratégies qui lui sont nécessaires (ex : comptage d'objets, dessins, utilisation des doigts, récitation de comptines, etc.).
  • Trouver des moments en famille pour faire des jeux de mathématiques. "A table" : choisir une table de multiplication pendant un moment en famille, par exemple le goûter, et trouver le plus rapidement possible la réponse à une table de multiplication chacun son tour) ; "A vos calculs, prêts, partez" : l'enfant doit chercher dans une pièce la réponse à une opération donnée par son parent. 

Certaines applications et logiciels sur ordinateur ou sur tablette peuvent également être très utiles : L'attrape-nombres, La course aux nombres, 120 secondes, Défi tables, Math quest, Mathemagics.

Livres pour parents

  • La bosse des maths, 15 ans après de Stanislas Dehaene (2010)
  • Que sais-je ? L'acquisition du nombre de Michel Fayol (2012)
  • Que sais-je ? Le raisonnement d'Olivier Houdé (2014)
  • Mathis n'aime pas les maths (2e partie pour les adultes) d'Anne Lafay (2013)
  • Je suis dyscalculique d'Alain Ménissier (2e partie pour les adultes) (2015)
  • 100 idées pour aider les élèves dyscalculiques de Josiane Hélayel et Isabelle Causse-Mergui (2011)

Livres pour enfants

  • Mathis n'aime pas les maths (histoire en 1e partie) d'Anne Lafay (2013)
  • Je suis dyscalculique d'Alain Ménissier (histoire en 1e partie) (2015)

Merci à Jérémy Périchon, orthophoniste

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