Maman féministe ou maman moderne ?

Comment je m'efforce d'éduquer ma fille de 5 ans pour en faire une future femme consciente de sa valeur et de ses droits ?

Je suis la fière maman d’une petite fille de 5 ans.

Mon souci premier, hormis son bien-être : l’élever de manière à ce qu’elle devienne une femme indépendante et forte, ne se faisant jamais marcher dessus par les hommes. Un sacré challenge donc !

L’objectif ne va pas être aisé ! Pourquoi ? La société constituée de clichés, de sexisme et de conditionnements ? Tout bouge… si lentement, même en France… Il n'y a qu’à se promener dans les rayonnages des magasins de jouets pour se convaincre que les filles et les garçons sont catégorisés depuis leur plus jeune âge. Alors, je veux bien admettre qu’à certains niveaux nous soyons différents, que nous ne fonctionnons pas de manière totalement identique, mais exagérer ces dissemblances ainsi est scandaleux et grave.

Pour exemple : la mairie de mon quartier offre des cadeaux à Noël. L’année dernière, j’ai frôlé la crise cardiaque lorsque j’ai découvert que pour les garçons, c’était circuit de voitures et table à repasser pour les filles. En 2016 ! Quelle honte ! On a trouvé un responsable et on a obtenu d’échanger notre présent. On est reparti avec les voitures ! Parce que je ne me voyais pas repasser des vêtements de poupées avec ma fille, ni son père d’ailleurs. Ce n’est quand même pas difficile de proposer des jeux neutres ou de bousculer les normes en inversant les thèmes. Pour avoir travaillé en crèche, les petits garçons jouent autant que les filles à la dînette et vice-versa avec les activités dites « masculines ».

Le même jour, sur la place de la mairie, à un stand de tir pour les enfants, je propose à ma fille d’essayer. Elle me répond que c’est réservé aux garçons. Mon sang ne fait qu’un tour et je m’agenouille pour être à sa hauteur et lui exposer mon point de vue selon lequel : il n’y a rien que les garçons peuvent faire que les filles ne peuvent pas accomplir. RIEN !

Alors, au lieu de lui acheter une cuisinière pour Noël, avec son père, nous lui avons pris un établi de bricolage. TAC ! Et quand elle a dû choisir un costume pour le carnaval de l’école, je lui ai un peu forcé la main en lui sélectionnant un déguisement de Wonderwoman ! Et TOC !

Devant les publicités, je commente en précisant que les jeux sont mixtes malgré des codes savamment étudiés pour différencier les genres, idem pour les cartoons. Je lui fais voir des dessins animés avec des filles badass ! Mulan et Mérida de Disney ou toutes les héroïnes de Miyazaki, réalisateur de films d’animation japonaise. Je me moque gentiment de Blanche Neige et Cendrillon, ces deux bécasses qui chantent en récurant le carrelage.

Quand elle me dit qu’elle veut épouser Anatole. Je lui réponds que le mariage s’est surfait (ringard et désuet) et qu’elle peut très bien se mettre en couple avec une fille. Je lui explique que l’amour n’a pas de sexe ! Je lui murmure dans le creux de l’oreille, quand son père est ailleurs, que les filles sont vachement plus fortes que les garçons. Je compte lui insuffler un trop plein de confiance à ma princesse des temps modernes, parce que personnellement, j’en ai cruellement manqué. Les hommes ont bien tendance à se surestimer et les femmes à se sous-estimer. Ma fille, je veux qu’elle se sente capable de devenir présidente de la France, même si ce n’est pas du tout la carrière que je lui souhaite… Je lui répète souvent que plus tard, elle pourra être tout ce qu’elle désire. Aucune porte ne lui est fermée à cause de son genre. Et même si c’est le cas, elle doit forcer le passage par tous les moyens.

Par ailleurs, mon mari est iranien. Lorsque nous nous rendons en Iran voir ma belle-famille, c’est un peu comme faire un bond en arrière dans le temps (bien que j'adore ce pays). Alors, quand ma fille me demande pourquoi certaines femmes se cachent derrière un tchador, je lui raconte qu’elles sont ninjas et que pour des raisons de sécurité leur identité doit demeurer secrète. Un pieux mensonge, et j’en ai en réserve dans ma caboche pour détourner le sexisme en élément féministe.

En résumé, c’est un travail de tous les jours pour la déconditionner du mieux que je peux, car les enfants sont les premiers à tenir des discours rétrogrades entre eux dans la cour de l’école. C’est aussi féminiser les professions dans le langage courant, car le sexisme débute dans les mots que nous employons. Pleins de petits détails qui nous échappent, mais qui nous façonnent malgré nous.

J’ai la chance d’avoir un conjoint qui montre l’exemple en partageant les tâches ménagères et en prônant le même discours que moi. Sinon, on tomberait dans l’incohérence. La seule manière de changer la société pour la rendre plus juste vient par l’éducation que nous donnons à nos enfants. Et surtout les mamans si j’osais, pour pousser les femmes de demain à s’affirmer… et à rentrer des valeurs d’égalité dans les têtes des petits garçons. Ne les oublions pas !

Quoique l’on fasse, on se trompe toujours, mais j’espère ne pas trop me planter avec ma progéniture. Je suis une maman féministe ! Je ne veux pas que ma fille se croie supérieur à ses camarades, seulement leur égal !  

Lye