Tics nerveux chez l'enfant : dédramatisez et montrez-vous patient !

Ils clignent des paupières, font des rictus avec leurs lèvres, haussent les sourcils brusquement… Certains enfants développent des tics nerveux : des petits mouvements compulsifs exacerbés par le stress ou la colère. A quel âge apparaissent-ils ? Quand consulter ? On fait le point avec la psychologue Cécile Viénot.

Tics nerveux chez l'enfant : dédramatisez et montrez-vous patient !
© Cebotari Nicolai - 123RF

Mouvements involontaires, brusques et répétitifs, les tics peuvent apparaître chez certains enfants vers l'âge de 4-5 ans et sont souvent liés à un état de nervosité. Ils peuvent par exemple cligner les yeux, racler leur gorge, hausser les épaules, secouer leur tête ou répéter les gestes et les paroles de leur interlocuteur. Si les tics sont récurrents, imprévisibles et amplifiés en cas de stress, ils s'atténuent au fil du temps jusqu'à généralement disparaître complètement au bout de quelques semaines (on parle alors de tics transitoires) ou années (tics chroniques). Toutefois, certains enfants sont-ils plus susceptibles de développer des tics nerveux ? Comment reconnaître un tic ? Comment réagir et quand consulter ? Réponses de Cécile Viénot, psychologue.

Ces enfants qui ont des tics...

"Les tics apparaissent souvent chez des enfants qui ont un tempérament plus anxieux que la normale, qui sont plus facilement stressés et qui ont besoin que les choses soient plus ritualisées", affirme d'emblée Cécile Viénot. Il arrive également que les tics se développent chez les enfants dont l'un des deux parents est de nature anxieuse ou angoissée. "L'enfant va alors ressentir l'anxiété de son parent et se l'accaparer". Et ses tics, il ne peut ni les prévoir, ni les contrôler. A certains moment, les tics sont inexistants tandis qu'à d'autres, ils sont très fréquents. Le fait que les tics soient irréguliers et impulsif est tout à fait logique car "l'enfant n'est pas soumis à un pic de stress de façon permanente". Mais comment reconnaître un tic ? Contrairement aux TOCs (troubles obsessionnels compulsifs), le tic est spontané, aléatoire, il ne s'agit pas d'un geste figé qui se fait à un moment précis de la journée et peut évoluer dans le temps : l'enfant peut commencer par cligner les yeux de manière répétée, puis, quelques semaines plus tard, lécher le pourtour de ses lèvres… Un TOC est "une routine qui ne doit jamais changer : cela peut être par exemple, allumer et éteindre trois fois la lumière avant de dormir, vérifier cinq fois que la porte d'entrée est bien fermée par exemple". Attention, le tic, qu'il soit flagrant ou pas, ne doit pas être confondu avec le syndrome de Gilles de la Tourette : "ces deux troubles psychiques ne sont pas dans le même tableau clinique" : le syndrome de Gilles de la Tourette est marqué par l'association de multiples tics, moteurs et surtout vocaux, qui ne disparaissent pas après plusieurs mois voire plusieurs années et qui changent régulièrement de nature. Parfois, l'enfant est atteint en plus de coprolalie - il ne peut s'empêcher de dire des mots orduriers ou scatophiles - ou de copropraxie, le fait de faire des gestes grossiers.

Comment expliquer le développement de tics nerveux ?

"Mon fils de 6 ans ne cesse de faire des grimaces avec ses yeux et son visage. Ça devient une habitude qu'il ne semble pas pouvoir contrôler. J'ai peur qu'il s'agisse d'un tic durable. Comment résoudre ce problème ? D'où ça peut venir ? Est-ce que ça peut avoir un lien avec le fait d'être souvent sur sa tablette ?" (Brahis Anes)

Tout d'abord, le tic révèle une anxiété. Il est souvent lié à un changement dans la vie de l'enfant ou à un conflit qu'il a pu rencontrer à l'école ou à la maison. L'enfant n'a pas réussi à exprimer ce conflit stressant avec des mots, et va le faire à travers des mouvements spontanés et répétés. En effet, "le seul moyen d'évacuer son trop-plein de stress sera de mettre en place ce genre de décharges nerveuses et physiques", confirme la spécialiste. En somme, tout ce que l'enfant ne peut pas exprimer par des mots, il va l'extérioriser par son langage corporel, ici par des mouvements qu'il réitère indéfiniment. Le tic nerveux a donc un lien avec l'ambiance anxiogène du moment, où il y a des émotions lourdes à encaisser.  En revanche, le tic ne va pas être une réaction à distance d'un événement vécu comme un traumatisme (la perte d'un proche, le divorce de ses parents, un déménagement…). Enfin, aucune étude à ce jour n'a montré de lien entre écrans et tics nerveux.

Comment l'aider au quotidien ?

"Donnez l'impression d'être le plus détaché possible par rapport aux tics de votre enfant"

"Ne relevez pas les tics de votre enfant et surtout, ne lui demandez pas d'arrêter", conseille la psychologue. "C'est tentant, mais non seulement, il ne sera pas capable de les contrôler (les tics sont contrôlables pendant un court instant, au prix d'un gros effort, mais finissent par resurgir involontairement) et cela risquerait d'accroître sa détresse intérieure et donc son besoin d'évacuer les tensions", justifie-t-elle. Parce que parler du tic renforce la fréquence et l'intensité du tic, observez votre enfant sans pour autant lui faire des remarques. Privilégiez le dialogue, demandez lui comment il se sent à l'école, s'il a des copains, interrogez sa maîtresse... Ensuite, ne dramatisez pas et montrez-vous patients : les tics sont des troubles du comportement bénins qui s'estompent naturellement au fil du temps, quand l'enfant sera parvenu à exprimer son mal-être, quand il aura réussi à digérer une situation qui le stresse ou encore, quand il aura pris suffisamment de distance par rapport à l'événement "traumatique".

Si les parents ne parviennent pas à identifier la cause des tics nerveux et que ces derniers sont de plus en plus handicapant pour l'enfant, qu'ils n'hésitent pas à demander l'avis d'un psychologue. Souvent, "quelques séances suffisent pour aider l'enfant à verbaliser ses émotions. Une fois que l'enfant aura mis des mots sur sa souffrance et qu'il verra que ses parents le comprennent, son corps aura naturellement moins besoin de s'exprimer", précise Cécile Viénot. Enfin, privilégiez les activités relaxantes et artistiques, comme la peinture, le dessin ou le chant qui pourront l'aider à libérer son stress.

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