Mon ado est végétarien, comment réagir ?

Votre enfant vient de vous annoncer que désormais, il ne mangerait plus de viande et qu'il est devenu végétarien. Que ce soit pour des convictions éthiques, écologiques ou par simple goût, ce changement radical dans son alimentation n'est pas sans conséquences. Explications.

Mon ado est végétarien, comment réagir ?
© Vadim Guzhva - 123RF

Alors qu'il n'y a pas si longtemps, il ne pouvait pas résister à une escalope milanaise et ne cessait de vous réclamer vos lasagnes maison, votre ado a décidé de devenir végétarien et de tirer une croix sur la viande. Et ce que vous avez pris d'emblée pour une lubie passagère commence à durer. Quelles sont ses motivations ? Que traduit ce nouveau mode alimentaire ? Un tel régime est-il adéquat avec un ado en pleine croissance ? La nutritionniste comportementaliste Caroline Seguin nous aide à y voir plus clair.

Conviction, besoin de se différencier… Pourquoi veut-il être végétarien ?

"Il faut écouter le discours de l'ado, a-t-il du sens ?"

Faire le choix d'être végétarien impose de ne plus manger certains aliments, comme la viande, le poisson ou les œufs. Ce choix, il est normal que votre enfant puisse vous l'expliquer. "Si sa motivation semble sensée, que ses convictions sont très réfléchies et logiques, il est important de l'écouter et de lui proposer des alternatives adaptées", explique Caroline Seguin. Toutefois, "si son choix repose sur des mobiles flous ou potentiellement dangereux (contrôler son poids...), mieux vaut le questionner et lui expliquer les éventuels risques d'un tel régime alimentaire". Il faut donc distinguer les convictions mûrement réfléchies des motivations basées sur un effet de mode, une volonté de marginalisation ou influencées par des copains végétariens. Si votre ado a vu des reportages sur l'écologie, que la maltraitance animale l'affecte ou qu'il a récemment perdu un animal de compagnie, il va pouvoir argumenter sur sa décision de ne plus manger de viande, un choix alimentaire "qui ne sera très certainement pas négociable pour lui, au même titre que des convictions politiques ou religieuses", précise l'experte. Et dans la mesure où il est réfléchi, responsable et raisonnable, il n'y a aucune raison de s'y opposer. En grandissant, "votre ado acquiert une conscience psychique, politique et écologique que vous ne soupçonniez peut-être pas", rassure Caroline Seguin. Mais parfois, un adolescent décide de ne plus manger certains aliments pour se démarquer des normes familiales, affirmer sa différence et son autonomie : il veut choisir ce qu'il mange, manger différemment des autres membres de sa famille et ainsi être "maître de lui". On sent alors que son discours n'est pas fondé sur une conviction écologique ou planétaire, mais davantage sur des questionnements ou un mal-être qu'il va transposer sur l'alimentation. Il a besoin d'un outil, en l'occurrence la nourriture, pour se faire entendre au sein de sa famille. Dans ce cas, en parler à un thérapeute est à envisager afin de travailler sur ce qui le pousse à devenir végétarien.

Attention aux régimes végan

En Belgique, l'Académie royale de médecine vient de rendre son avis sur le véganisme, qu'elle juge "inadapté et donc non recommandé" pour les enfants, mais également les adolescents, les futures mamans ou encore les mères qui allaitent leur bébé au sein. "Ce concept d'alimentation s'apparente à une forme de traitement qu'il n'est pas éthique d'imposer à des enfants. Il est non recommandé médicalement et même proscrit de soumettre un enfant, en particulier lors des périodes de croissance rapide, à un régime potentiellement déstabilisant", précise l'Académie. Selon les spécialistes, environ 3% des enfants belges seraient végan. En outre, ils s'exposent à des risques de carence avec un manque de "protéines de haute valeur biologique, de vitamine B12, de vitamine D, de calcium, de fer, de zinc, d'iode et de DHA"

Quand faut-il s'inquiéter ?

"Choisir une orientation alimentaire spécifique peut dériver, comme toutes convictions, vers des extrêmes", pose d'emblée Caroline Seguin, avant de conseiller aux parents d'être vigilants, en s'assurant que ce nouveau régime alimentaire ne soit pas un prétexte pour contrôler son poids ou ne pas grossir. Si la liste des aliments que l'ado ne souhaite plus manger s'allonge, il est préférable de lui proposer un suivi régulier chez un médecin, "une personne neutre et compétente qui pourra l'écouter et le conseiller". Surtout que l'adolescence est une période propice aux dérives et aux troubles alimentaires. Mais, dans la grande majorité des cas, "les parents ont surtout peur des carences et ont besoin que ce nouveau régime alimentaire soit encadré par un médecin, surtout si le discours entre parents et enfant est compliqué", tient à préciser la nutritionniste, organiser des séances avec les parents permet de les rassurer et de dédramatiser la situation, particulièrement quand ils sont braqués ou réticents.

L'importance des repas en famille

"On peut tout à fait respecter les choix alimentaires de son enfant, mais hors de question de tomber dans un véritable casse-tête lors de la préparation des repas", préconise l'experte. Au lieu de proposer un menu à la carte comme au restaurant, on fait un repas commun que l'on partage en famille et on invite l'ado végétarien à manger la même chose que les autres, la viande ou le poisson en moins. De la même façon qu'un un enfant diabétique devrait adapter son régime alimentaire lors des dîners en famille. Concernant les repas, Caroline Seguin est sans équivoque : "le dîner en famille doit être un repère culturel et social, un moment de partage convivial qui participe au bon développement de l'enfant". Il n'y a donc pas que l'aspect nutritionnel qui prime dans le repas, la table représente un lieu de rassemblement pour la famille. Là encore, le comportement de l'ado à table peut être révélateur d'un mal-être plus profond. "S'il est parfaitement d'accord pour manger la même chose que sa famille, il prouve qu'il a parfaitement intégré la notion de respect de ses convictions. Toutefois, s'il se braque et réclame son propre repas, sa volonté de végétarisme traduit probablement d'autres souffrances".

Bien s'assurer qu'il n'ait pas de carences

"Un régime végétarien est envisageable dans la mesure où l'ado compense avec d'autres apports protéinés (laitages, légumineuses, céréales à défaut de consommer des protéines animales) pour couvrir tous ses besoins", souligne-t-elle. Néanmoins, un régime végétalien n'est évidemment pas conseillé lors de la croissance. En effet, la viande apporte des protéines, des substances indispensables pour entretenir la peau, les muscles et les organes (cerveau, cœur…), mais elle est également riche en fer. Si votre ado n'aime pas la viande ou ne souhaite plus en manger, il peut tout de même consommer du poisson, des œufs et des produits laitiers. Enfin, qu'il n'hésite à en parler à l'infirmière du lycée, au médecin scolaire ou au médecin de famille car il peut nécessiter une supplémentation en fer, en vitamines ou en oligo-éléments. "C'est important car à cet âge-là, l'ado ne doit pas être carencé", conclut-t-elle.

Végétarien ou végétalien : quelles différences ? Le végétarien retire de son alimentation certains types de protéines animales comme la viande, les poissons et les fruits de mer. Le végétalien ne mange aucun aliment issu du monde animal. Il ne consomme pas de viandes (blanche et rouge), de poissons, de fruits de mer, d'œufs, de produits laitiers (de vache, de chèvre, de brebis…) et d'autres produits d'origine animale comme le miel.
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