Enfants influenceurs ou youtubeurs : un décret pour les protéger

Ce 28 avril est paru un décret qui encadre les activités rémunératrices des influenceurs de moins de 16 ans afin de mieux les protéger. Voici ce qui va changer.

Enfants influenceurs ou youtubeurs : un décret pour les protéger
© Fetr71-123RF

Un nouveau décret pour protéger les enfants influenceurs

Un décret paru ce 28 avril encadre l'exploitation commerciale de l'image d'enfants de moins de 16 ans sur les plateformes en ligne. Ce texte détaille les conditions selon lesquelles des personnes peuvent "réaliser, produire et diffuser des vidéos sur internet, mettant en scène à titre principal des mineurs de seize ans, dans un cadre lucratif." Désormais, les enfants "influenceurs" comme Lili-Ana ou Choupinette_off peuvent bénéficier des mêmes règles protectrices dans le Code du travail que les enfants mannequins, ou qui travaillent dans le monde du spectacle et de la publicité.

Ce décret fait suite à l'adoption, en octobre dernier d'une proposition de loi du député LREM Bruno Studer. "Le travail des enfants est interdit en France sauf dérogation, y compris sur internet" avait-il déclaré. Sa proposition visait en effet à encadrer les pratiques des enfants influenceurs. L'objectif : protéger les mineurs de moins de 16 ans de toute exploitation commerciale de leur image (diffusée en ligne et visionnée parfois des millions de fois) sur les plateformes en ligne telles que YouTube, Instagram, Tik Tok ou encore Twitch. D'autant que certains enfants youtubeurs peuvent générer des revenus allant jusqu'à 150 000 euros par mois, permettant à certains parents de cesser de travailler, précisait le député. 

Un travail encadré, comme pour les enfants du spectacle

Le secrétaire d'Etat chargé de l'Enfance Adrien Taquet avait quant à lui rappelé que "depuis 2017, le gouvernement s'est attaché à maintes reprises à mieux réguler l'espace numérique pour que chacun y soit mieux protégé". Ainsi, comme pour les enfants du spectacle rémunérés au cinéma ou à la télévision, le nouveau décret précise que les représentants de ces enfants devront obtenir  des autorisations administratives, des agréments, et que les rémunérations devront être placées à la Caisse des Dépôts et consignations jusqu'à ce qu'ils aient atteint leur majorité. Car jusqu'à présent, ces vidéos monétisées faisaient l'objet d'un vide juridique : les horaires, la durée du tournage n'étaient pas encadrés par le droit du travail et les revenus générés n'étaient pas forcément destinés aux enfants. Par conséquent, si l'activité des enfants Youtubeurs est considérée comme un travail, un agrément préfectoral sera nécessaire, comme c'est notamment le cas pour les enfants mannequins. A l'inverse, dans le cas où l'activité ne serait pas comparable à une activité professionnelle, le texte prévoit une déclaration obligatoire dès lors que l'enfant Youtubeur dépasserait un certain seuil de temps passé et de revenus, fixés par décret. 

Le droit à l'oubli à la demande des enfants

Le texte de loi prévoit de mettre en place "un droit à l'oubli" pour les enfants devenus grands, qui souhaiteraient supprimer ces vidéos de la toile. Ainsi, les enfants concernés qui en font la demande, pourront s'adresser à la plateforme qui devra retirer les contenus dans les meilleurs délais.

Qui sont ces enfants Youtubeurs ?

Vous avez certainement entendu parler de Gabin et Lili, Kalys et Athéna, la chaine Rose Carpet, Squeezie, Enjoy Phoenix, Juste Zoé, Seb, Andy ou encore La fille du Web et Une Ptite Jajoux ? Ces Youtubeurs devenus de véritables stars du net depuis leur chambre d'ado sont tous suivis par des milliers d'abonnés. Ces derniers y trouvent du rire, des anecdotes, ou des conseils et des tutos beauté pour apprendre à se maquiller et découvrir les nouvelles tendances. Ils aiment aussi découvrir en direct ces enfants Youtubeurs qui ouvrent des cadeaux face caméra ou testent des produits envoyés par les marques.

 

 

 

Pourquoi les jeunes sont-ils fans des enfants Youtubeurs ?

Pour Stephan Valentin, docteur en psychologie, spécialiste de la petite enfance et auteur du livre "La Reine, c'est moi !", "chaque génération a ses propres stars avec lesquelles on souhaite s'identifier. Celles de la jeune génération actuelle sont incontestablement les YouTubeurs. Souvent, ces vidéos sont créatives, drôles, et intelligentes. Quand des enfants très jeunes postent des vidéos d'eux-mêmes sur Internet, c'est un peu comme les enfants star au cinéma ou à la télévision". Sans compter qu'aujourd'hui, les modes de consommation évoluent. "Les jeunes regardent plus souvent YouTube que la télévision sur leur smartphone ou leur tablette". Il y a donc une certaine proximité entre les spectateurs et les Youtubeurs, qui peut aussi expliquer cet engouement. "Ces idoles sont un peu comme eux. Et ils communiquent beaucoup avec leurs fans. Cela peut créer des liens forts", précise le psychologue. 

 

Les parents ont un droit de regard sur ce que fait leur enfant

Certains enfants connaissent rapidement le succès en se filmant simplement au quotidien ou dans leur chambre.  "S'exposer ainsi au monde entier peut comporter des dangers. Le buzz peut être positif ou entraîner des commentaires malveillants", prévient Stephan Valentin. C'est la raison pour laquelle les parents doivent protéger leur enfant, surtout lorsqu'il est jeune. "Il serait conseillé de regarder, au préalable, la vidéo qu'il souhaite poster, afin de vérifier que son contenu ne soit pas préjudiciable pour l'enfant", recommande-t-il. En effet, personne n'est véritablement armé face aux commentaires négatifs qui peuvent être publiés sur Internet et particulièrement sur les réseaux sociaux (quel que soit l'âge). L'idéal serait alors "de ne pas autoriser des commentaires ou de les vérifier avant leur publication", conseille le psychologue. Par ailleurs, "chaque photo et vidéo que nous postons sur internet peut avoir une influence sur notre vie. Tout dépend de leur contenu et de ce que les autres internautes en font", précise le psychologue.

Limiter le temps d'écran et vérifier le contenu des vidéos

Les parents doivent vérifier le contenu des vidéos que leurs petits regardent et limiter le temps devant l'écran, c'est à dire "pas plus de 45 à 60 minutes par jour entre 6 et 12 ans". Comme pour la télévision, "ce contenu doit être adapté à l'âge et à la maturité de l'enfant", rappelle le spécialiste, En effet, certains jeunes YouTubeurs n'hésitent pas à faire le buzz en tenant des propos parfois malsains ou en relevant des défis souvent dangereux, que les plus jeunes pourraient être tentés de reproduire... Pour protéger leurs enfants des contenus inappropriés, Stephan Valentin conseille "d'activer le mode restreint de YouTube en bas de la page d'accueil sur le site. On peut aussi regarder quelques vidéos ensemble pour se faire une opinion sur la "star" qu'il admire et accompagner le plus possible son enfant", conclut le psychologue.