Risques d'attentats : quelle attitude avoir avec son enfant ?

Après les attentats de Paris et de Nice, les mesures de sécurité ont été renforcées dans les établissements scolaires. Un climat anxiogène, qui peut parfois inquiéter les enfants. Comment les rassurer ? Le point avec Saverio Tomasella, psychanalyste.

Risques d'attentats : quelle attitude avoir avec son enfant ?
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"Lorsqu'ils découvrent que la mort existe, vers deux ou trois ans, les tout-petits sont très impressionnés, ils y pensent énormément et posent beaucoup de questions. Avant de penser qu'ils pourraient mourir eux-mêmes, ils craignent la mort de leurs proches", explique Saverio Tomasella dans son livre "Petites peurs ou grosses terreurs", aux éditions Leducs. Les attentats qui ont touché Paris et Nice, mais aussi les mesures de sécurité mises en place depuis la rentrée n'ont pu leur échapper. Ce contexte anxiogène peut exacerber encore davantage ces peurs, estime le psychanalyste. 

Que penser des nouvelles mesures de sécurité dans les écoles ? 

Le gouvernement a présenté ses nouvelles mesures de sécurité, appliquées dès la rentrée des classes 2016 au sein des établissements scolaires de France. Le dispositif prévoit notamment des exercices de simulation, en plus d'une mobilisation des forces de sécurité, de travaux destinés à sécuriser les zones vulnérables, et une sensibilisation des élèves aux gestes qui sauvent. Un exercice "attentat intrusion", devra ainsi être effectué avant les vacances de la Toussaint. Précisons que ces exercices sont adaptés à l'âge des enfants. Chez les tout-petits par exemple, il s'agira de se cacher ou de sortir sans faire le moindre bruit. Mais ces nouvelles mesures ne risquent-elles pas d'inquiéter davantage les enfants ? "Ces mesures de sécurité font place à la peur comme s'il s'agissait d'une menace permanente. Bien sûr, il ne faut pas minimiser les horreurs, mais relativiser et éviter de se laisser envahir par une peur permanente", commente Saverio Tomasella. Pour autant, "ces actes abominables, qui touchent la population nécessitent une protection de nos enfants, que l'on espère efficace". Pour le psychanalyste, il est indispensable de rappeler aux enfants que ces exercices sont mis en place pour les protéger et d'avoir un discours positif. "Les écoliers pourront être stressés le jour de l'exercice, mais après tout, il se rendront compte que tout s'est bien déroulé", ajoute-t-il. Ils prouvent en outre que nous sommes solidaires et que nous nous organisons. 

Après un événement tragique, laisser l'enfant s'exprimer

Après un événement, comme un attentat terroriste, un enfant a besoin d'extérioriser ce qu'il a vécu. "L'enfant est dans l'incompréhension la plus totale. Il est confronté à l'absurdité et à la violence extrême puisqu'il s'agit d'un assassinat volontaire", précise le psychanalyste. Les parents doivent cependant répondre à ses interrogations de manière adaptée à son âge. S'il est tout petit par exemple, adoptez un discours sans préciser de détails. "Un méchant Monsieur a tué plusieurs personnes. On est très triste et nous allons penser (ou prier) pour ces personnes". Il est nécessaire par ailleurs de rappeler que "cela est très mal, interdit, et que la loi protège chaque être humain car la vie est importante et doit être protégée", explique Saverio Tomasella. Précisez-lui aussi que "tout est mis en oeuvre pour nous protéger, et que ces terroristes vont être jugés pour leurs actes". Par ailleurs, chaque enfant réagit différemment : certains ne parviennent pas à mettre de mots sur leurs émotions. Dans ce cas, "on peut tout à fait leur proposer de réaliser un dessin, un modelage, une peinture afin de les laisser s'exprimer autrement", conseille Saverio Tomasella. 

Déculpabilisez vos ados !

Si votre enfant est adolescent, "mieux vaut ne pas en parler à chaud lorsqu'il est encore sous le choc, mais attendre qu'il soit prêt à en discuter avec vous". Demandez-lui alors comment il a vécu ce tragique événement, et quelles sont les questions qu'il se pose. Les jeunes ont avant tout besoin de comprendre ce qu'il s'est passé. Mais ils ont parfois tendance à vouloir connaître tous les détails et à en discuter entre eux. C'est pourquoi il est préférable d'en parler avec lui avant qu'il n'ait d'autres versions (peut-être faussées). Par ailleurs, si votre ado est accro aux jeux vidéo violents, n'en faites pas un problème. "Il est important de déculpabiliser les jeunes par rapport à leur addiction à ces jeux violents". Selon Saverio Tomasella, les ados ont tout simplement du mal à se rendre compte de ce qu'il se passe autour d'eux. Ils ne font pas la part des choses entre le réel et ces actes qui leur semblent justement irréels et qui les perturbent.

En parler, oui... mais avec modération

Les parents doivent toujours garder confiance et espoir, à travers la discussion. "Dans ce contexte de terrorisme, il me semble que la dimension médiatique prend une place trop importante. Ces terroristes pensent passer pour des héros, comme portés par un imaginaire", regrette le psychanalyste. "Il est donc important de parler des attentats pour désamorcer les dérives et notamment faire barrage aux vidéos atroces qui peuvent être diffusées aux yeux de tous". Par ailleurs, évitez de regarder les informations en boucle, ou de parler constamment de vos inquiétudes quant aux menaces terroristes, au risque d'angoisser l'enfant à son tour. Privilégiez les sorties en famille, et les discussions positives, car ces tristes événements ne doivent pas changer vos habitudes de vie, ni vos projets !

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