Comment parler des attentats aux enfants, selon leur âge ?

Comment parler des événements dramatiques, quelques jours après l'assassinat à Arras du professeur de lettres Dominique Bernard ? Pour répondre à leurs questions de manière adaptée et les rassurer, voici les conseils de deux psychologues.

Comment parler des attentats aux enfants, selon leur âge ?
© fizkes -123RF

Ces dernières semaines, les actualités liées au terrorisme font ressurgir l'angoisse pour la plupart des parents. Trois ans après le meurtre de Samuel Paty, c'est un enseignant de 57 ans qui a été tué à Arras et trois autres de ses collègues blessés. Ce vendredi 13 octobre, Dominique Bernard, professeur de lettres à la cité scolaire Gambetta-Carnot a en effet été victime d'une attaque au couteau dans l'enceinte de l'établissement scolaire. Un hommage est rendu ce lundi dans les écoles de France. Un climat anxiogène, auquel s'ajoutent des alertes à la bombe survenues au Louvres et au Château de Versailles au lendemain de l'attaque terroriste à Arras. Mais il n'est pas toujours facile d'aborder des sujets graves avec les enfants. Trouver les mots pour parler de mort ou de guerre n'est guère évident, car le risque est grand de les inquiéter. Les conseils du psychologue Marcel Rufo et de Dana Castro, psychologue et auteur de "Petits silences, petits mensonges" aux éditions Albin Michel, pour permettre aux parents d'aborder la notion du terrorisme sans les traumatiser.

Quelle attitude avoir face à ces événements dramatiques ?

Une attitude saine qui est la bonne selon Marcel Rufo. "Il ne faut pas que les parents masquent leurs émotions. Ce qui inquiète le plus les enfants, c'est que les parents perdent pied et cachent quelque chose de douloureux pour eux. C'est-à-dire qu'ils s'inquiètent plus de l'inquiétude des parents que de l'inquiétude créée par cet horrible événement", expliquait en octobre 2020 Marcel Rufo lors de l'assassinat de Samuel Paty. Il conseille cependant de ne pas s'attarder sur les détails sanglants, mais d'avoir une discussion sur le sujet si jamais l'enfant y "a été confronté via les réseaux sociaux ou des amis par exemple".

Il est important de noter que les enfants ne réagissent pas tous de la même façon face à un drame. Il se peut qu'un enfant s'exprime très peu à ce sujet, aidez-le alors à extérioriser ce qu'il a vu, entendu, compris… Par ailleurs, les jeunes enfants vont généralement avoir besoin de davantage de câlins tandis que les plus grands présenteront des signes d'angoisse au moment de la séparation. Enfin, certains peuvent être plus touchés que d'autres et présenter un désintérêt, ne plus avoir envie de jouer, être en retrait…

Si votre enfant a moins de 6 ans

Il est préférable de lui expliquer que ce qui s'est passé est très grave, mais que vous êtes là, ainsi que les autres adultes, pour le protéger. L'idée est donc avant tout de le rassurer. Chez les tout-petits, inutile de mentir pour autant, selon la psychologue Dana Castro. "De toute façon, les enfants se rendent vite compte qu'il se passe quelque chose. Évoquez le sujet en essayant de ne pas dramatiser", conseille-t-elle.

Que dire à son enfant de plus de 6 ans ?

Il va très certainement vous questionner. Il est alors essentiel de lui apporter des réponses factuelles. Là aussi, insistez sur le fait que les adultes sont là pour les protéger : les parents, mais aussi la police.

Rassurez-le s'il vous dit qu'il a peur : "La peur est un sentiment tout à fait normal face à ce genre d'événement. Il ne faut pas se laisser intimider, mais tu as le droit de pleurer, d'être angoissé... Dans tous les cas, je partage tes sentiments".

Un terroriste peut-il venir dans mon école ? "Les inconnus ne peuvent pas rentrer dans ton école. L'entrée est surveillée par les instituteurs et des policiers, et il y a aussi des barrières devant ton bâtiment pour vous protéger, toi et tes copains". 

Comment en parler à son ado qui visionne des images choquantes sur les réseaux sociaux ?

Les ados peuvent être confrontés, via les écrans et les réseaux sociaux, à des propos violents et à des images angoissantes et choquantes. Il est également indispensable de maintenir avec eux une discussion afin de les aider à surmonter ces événements et les soutenir, tout en veillant à limiter l'accès aux images qui pourraient les terrifier.

Demandez exactement à votre enfant ce qu'il a vu. Cela vous permettra de vous rendre compte de ce qui a véritablement choqué votre enfant : si c'est l'attaque, le sang, les propos, l'arme... Puis, reformulez ce qui s'est passé avec lui, en restant très factuel.  Dites également que le terrorisme fait partie de la vie, que cela arrive, mais que ça ne peut pas arriver tout le temps".

"Les parents ont aussi intérêt à expliquer aux enfants comment réagir, c'est-à-dire que s'ils remarquent quelque chose de bizarre, ils doivent en parler aux adultes" recommande la psychologue Dana Castro. Enfin, déplacez et attirez l'attention des enfants sur des notions plus positives comme les hommages, et les actions de solidarité.