Il ne veut pas manger à table : faut-il le priver de dessert ?

De nombreux parents sont désemparés face à leurs enfants qui refusent catégoriquement de manger leur assiette. Pourquoi il faut éviter de les forcer ? Quelles sont les bonnes attitudes à adopter en cas de conflits à l'heure du repas ? Les réponses de Béatrice Benavent-Marco, nutritionniste.

Il ne veut pas manger à table : faut-il le priver de dessert ?
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En moyenne, un enfant a besoin de 1 000 calories par jour entre 1 an et 2 ans, de 1 300 calories entre 3 et 5 ans, de 1 700 calories à l'âge de 6 ans et de 2 000 calories à 10 ans. Les besoins nutritionnels se calculent en fonction du poids de l'enfant et de ses dépenses énergétiques quotidiennes ainsi que de son métabolisme de base. Béatrice Benavent-Marco, diététicienne nutritionniste, rappelle que ces besoins doivent être répartis de manière équilibrée, avec une importance pour les enfants de consommer juste ce qu'il faut de protéines et suffisamment de calcium. Par exemple, le petit déjeuner doit apporter 25% des apports énergétiques de la journée, le déjeuner 35%, la collation 10% et le dîner 30%. Enfin, pour avoir un ordre d'idée, un enfant doit peser environ 11 kg entre 1 et 2 ans, 20 kg vers 5-6 ans et 30 kg vers 9-10 ans.

Pourquoi certains enfants refusent-ils de manger à table ?

Dans la grande majorité des cas, les enfants deviennent néophobiques, tout simplement en opposition avec leurs parents ou la nourriture. Généralement, c'est à partir de 1,5 ans et jusqu'à l'âge de 6 ans en moyenne qu'ils refusent de goûter de nouvelles saveurs et de manger des aliments qu'ils n'apprécient pas. Ils sont parfois préoccupés par d'autres choses et n'ont pas forcément envie de passer à table, préférant jouer... Résultat : ils entrent souvent en conflit avec leurs parents qui leur demandent de finir leur assiette. Pourtant, il s'agit d'un comportement tout à fait normal chez les tout-petits, et c'est la raison pour laquelle de nombreux parents se sentent concernés, voire même désemparés puisqu'une sorte de "guerre" autour de l'alimentation s'installe au moment de passer à table. "Et ce combat est souvent gagné par les enfants qui en profitent", explique la nutritionniste. En effet, "ils se rendent compte que le fait de ne pas manger affecte les parents, et ils utilisent cela comme un pouvoir absolu".

Comment réagir en cas de conflits ?

"En tant que parent, on est forcément impliqué émotionnellement. Et si l'enfant sent que l'on est déstabilisé, il risque de renforcer ce jeu", explique Béatrice Benavent-Marco. Difficile à appliquer au quotidien, l'idéal serait de banaliser la situation et ne pas lui montrer que son refus de manger nous affecte."Ainsi, il y a plus de chances qu'il capitule sur le long terme, mais dans tous les cas, il n'aggravera pas la situation. Partons du principe qu'il ne mangera pas plus si on le menace", ajoute la spécialiste. Elle conseille alors aux parents de le laisser manger à son rythme, en lui proposant tous les composants du repas (entrée, plat, dessert) et en lui précisant qu'il n'y aura rien d'autre ensuite (jusqu'au goûter). Rien ne sert donc de le priver de dessert, bien au contraire ! S'il ne mange pas son plat, mais qu'il accepte le fruit ou la compote, "c'est toujours mieux que rien". Le punir, lui faire du chantage et lui donner un enjeu ("si tu finis ton assiette, tu auras le droit à un bonbon ou un gâteau") n'arrange pas non plus les choses. Néanmoins, il devra attendre l'heure du goûter pour pouvoir manger s'il a faim. Proposez-lui un goûter normal, sans pour autant lui donner double ration de gâteau à 16 h parce qu'il n'a rien mangé à midi. Dans ce cas, faites-lui comprendre calmement qu'il mangera mieux ce soir. 

Comment lui donner envie de manger son assiette ?

  • Dans un premier temps, "impliquer son enfant dans la préparation du repas permet de lui donner de l'intérêt", explique Béatrice Benavent-Marco. Ainsi, il s'approprie les nouveaux produits et aliments, apprend à les connaître et s'il a contribué à la recette du plat, il y a plus de chances pour qu'il le goûte à table. N'hésitez pas non plus à le valoriser auprès du reste de la famille ("C'est Julie qui a cuisiné l'entrée aujourd'hui !"). 
  • Il est important également, avant de passer à table, d'instaurer un rituel (on se lave les mains, on apporte des serviettes...). Avertissez-le que dans une dizaine de minutes, il sera l'heure de manger. Cela lui permettra de terminer ce qu'il est en train d'entreprendre, notamment s'il est en plein jeu, et de faire une transition entre ses activités et le repas en famille. 
  • A table, s'il refuse de goûter à un aliment, ne le forcez pas. Néanmoins, ne perdez pas non plus espoir puisque les goûts des enfants évoluent vite, et que les aliments se présentent sous différentes formes. Il n'aime pas les carottes rapées ? Peut-être appréciera-t-il une purée de carottes, ou des carottes cuites, mélangées à des petits pois ou des pâtes ?...
  • Et si vous rendiez le repas amusant ? Peut-être aura-t-il moins de crainte que s'il associait ce moment au conflit et à "l'obligation de finir son assiette" ? Pour cela, Béatrice Benavent-Marco conseille aux parents de toujours manger en famille, ensemble, afin de faire comprendre qu'il s'agit avant tout d'un moment agréable et de partage. "Si vous lui proposez une soupe aux épinards par exemple, racontez-lui que c'est la soupe venue tout droit du pays des extra-terrestres", propose-t-elle. Vous pouvez aussi lui préparer des assiettes "Food Art", en créant de petits personnages avec la nourriture : des olives pour les yeux, de la purée pour le visage, des tomates pour les oreilles et des saucisses en guise de sourire... Ainsi, il sera fier d'avoir dévoré les oreilles et vous, "satisfait(e)" qu'il ait mangé des tomates.
  • Enfin, gardez en tête qu'un enfant ne reste pas des heures attablé (en moyenne 25 à 30 minutes). N'attendez donc pas trop longtemps avant de le servir. Et s'il ne mange toujours pas, dites-vous bien qu'il n'y a rien de grave tant que sa courbe staturo-pondérale est normale. Il y a en revanche des raisons de s'inquiéter si l'enfant a un comportement alarmant, s'il vomit après les repas ou que son poids est insuffisant par rapport à son âge ou à sa taille. Dans ce cas, n'hésitez pas à consulter votre médecin.

Béatrice Bénavent-Marco est diététicienne nutritionniste. Plus d'informations sur son site www.maconsultationdietetique.fr

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