Le contrôle des émotions chez les enfants doués
Tout le monde s'accorde pour dire que les personnes douées ont du mal à maîtriser leurs émotions et elles-mêmes, évoquant ce point faible, demandent la " recette " pour atténuer cette intensité qui les fait tant souffrir. Ces émotions débordantes sont en rapport avec une hypersensibilité, considérée comme un point faible et sans doute irrémédiable.
Les enfants doués réagissent douloureusement à la moindre éraflure, leurs larmes si vite déclenchées réjouissent leurs camarades ravis de ce jeu qui peut se répéter indéfiniment Désormais, ces réactions exagérées sont considérées comme " normales ", puisqu'elles iraient de pair avec le don intellectuel démontré par les tests. Cette faiblesse ne serait pas entièrement une fatalité, mais presque : toute médaille a son revers, il ne serait pas juste qu'une plus grande dextérité intellectuelle ne s'accompagne pas de défaillances dans d'autres domaines. Cette fameuse sensibilité exagérée rendrait leur assurance plus vacillante, eux-mêmes savent qu'ils présentent cette fragilité, impossible à combattre. On oublie qu'il existe une catégorie de personnes incontestablement douées et qui font preuve d'une admirable maîtrise de leurs émotions : les champions, dans quelque catégorie que ce soit.
Un moral de champion
S'ils se situent parmi les meilleurs, ils sont obligatoirement doués. La préparation de ces champions exigent une rigueur qui ne doit jamais se relâcher et s'applique à tous les moments de l'existence. Quand ils se préparent pour un championnat, prévu des années à l'avance, ils font porter tous leurs efforts pour accumuler les chances de l'emporter durant les quelques minutes de la compétition. Une assiduité sans faille est indispensable. Elle s'accompagne de la capacité à renoncer souvent à des activités bien tentantes, parce que cette sortie, cette escapade, tombent à un moment inopportun et leur entraînement en souffrirait.
Cet entraînement commence très tôt dans leur jeune vie, puisque l'Éducation nationale a prévu leur cas en instituant des classes sport étude où l'enseignement est dispensé seulement le matin. Cet arrangement enchante d'ailleurs les enfants doués. Ils évitent les fastidieuses répétitions. Dans ces classes, homogènes par la force des choses, tous les élèves se situent à un bon niveau, ils comprennent vite et savent travailler sans perdre de temps. C'est durant ces années d'entraînement qu'ils se forgent tout naturellement un mental assez fort pour résister à la pression de la compétition, lorsqu'un titre se joue en quelques minutes, quelques secondes, un infime centimètre. Bien entendu, ils bénéficient du soutien et des conseils de coachs spécialisés, qui savent détecter leurs points forts pouvant servir d'appui à leur entraînement. Les émotions sont là pour les renforcer, pour donner encore davantage d'élan à leur force propre, mais elles ne doivent en aucun cas les entraver par des réactions intempestives.
Ils leur arrive de pleurer après, quand ils se retrouvent sur le podium, quand l'émotion provoquée par cette victoire est tout à coup trop forte et qu'ils peuvent se permettre de se laisser aller. Ces vagues sont trop violentes pour être endiguées. Elles marquent la somme d'efforts insensés qu'il a fallu fournir, en essayant de ne jamais se laisser aller au découragement ou à la tentation de vivre comme tout le monde et non comme un ascète dont le moindre écart sera sanctionné par une performance moindre. Il faut vraiment posséder toutes les qualités morales et mentales des personnes douées pour accepter ces contraintes en vue d'un but ultime, que peu sont capables d'atteindre.
Pour l'ensemble de la population, y compris nombre de personnes douées, ce mode de vie est impensable. Il suppose trop de sacrifices et on ne vit qu'une fois. Mais ce sont justement les personnes douées qui sont capables d'aller jusqu'au bout de leur désir d'accomplissement et de consentir à tous les sacrifices pour le satisfaire. Elles seules peuvent s'imposer cette rigueur, insensée pour la plupart des gens. Il faut non seulement contraindre son corps par des exercices difficiles et fastidieux, mais dompter son esprit pour qu'il ne se laisse pas envahir par des pensées négatives ou sournoisement tentatrices. Pour y résister les émotions doivent être totalement refoulées, elles fournissent de l'énergie, mais rien de plus.
Néanmoins, il est possible que dans certains sports où on est face à un adversaire, l'extrême sensibilité permette de prévoir ses gestes avec un infime temps d'avance. Ce sont alors des forces particulières qui s'affrontent pour un spectacle éblouissant grâce à une maîtrise totale qu'on peut seulement admirer sans vraiment comprendre ce qui s'échange-là. Les émotions sont d'un autre ordre, échappant à celui qui régit la vie ordinaire et c'est justement cet ordre différent qui transporte les spectateurs.
Les athlètes sont le meilleur exemple de la façon dont on peut transformer ce qui pourrait constituer une faiblesse en une force insensée, propre aux personnes douées. Les enfants qui suivent cet entraînement savent très vite qu'il ne faut pas se montrer mauvais perdant, leur image s'effriterait aussitôt, et qu'il est préférable de transformer tous les événements en force. La maîtrise de soi est la meilleure voie conduisant à cette sagesse. Ces affrontements ne sont pas toujours physiques : les tournois d'échecs, de mathématiques, ne demandent pas seulement des dons bien spécifiques, ils exigent le même contrôle.
"On peut être doué et savoir maîtriser ses émotions"
Sans tenter de ressembler à ces êtres d'exception que sont les athlètes, que ce soit dans le domaine physique ou intellectuel, on peut penser qu'ils nous indiquent un chemin qu'il est toujours possible d'emprunter. Il n'y a pas de fatalité : on peut être doué et savoir maîtriser ses émotions. Les enfants ont déjà l'occasion de s'exercer avec les contrôles en classe. Combien perdent leurs moyens. Une sensation terrible de vide les gagne, alors qu'ils connaissaient tout le programme par cœur. Plus tard le rôle des examens et enfin des concours est de mettre à rude épreuve ceux qui les affrontent. Ils apprennent à dominer ces vagues de doutes qui les assaillent et à dissiper le brouillard qui envahit leur cerveau quand il s'agit d'être examinés, jugés, notés. Ce ne sera jamais assez bien, ils vont se montrer décevants, c'est-à-dire tels qu'ils sont dans la réalité. Ils en sont conscients, c'est leur entourage que ne veut pas voir cette réalité et s'obstine à les croire doués. Cette peur est tellement violente et envahissante qu'ils se sentent démunis, incapables de l'apaiser. Donner les champions en exemple peut faire réfléchir, mais il y a aussi des aides plus concrètes, telles qu'en prodiguent certaines approches paramédicales, ou bien des techniques physiques. Les enfants et surtout les adolescents constatent que ce combat est possible et qu'on en sort alors vainqueur.
Conseils : ne jamais considérer que des émotions impossibles à maîtriser sont sans remède, demander de l'aide à des spécialistes, envisager des activités où la maîtrise de soi est indispensable, mais accepter les larmes quand elles sont irrépressibles et expriment une détresse sans nom. Ensuite, chercher à en cerner les causes, et les raisons derrière ces causes, en prenant tout le temps nécessaire, avec patience et persévérance. |