Substances chimiques dans l'alimentation des enfants : faut-il s'inquiéter ?

Les données d'une étude sur l'alimentation des enfants de moins de trois ans menée par l'Anses en 2016, sont désormais accessibles pour le grand public. Conseils et décryptage de Marion Hulin, chargée de la coordination de l'étude.

Substances chimiques dans l'alimentation des enfants : faut-il s'inquiéter ?
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Les enfants de moins de trois ans non allaités peuvent être exposés à de nombreuses substances de par leur alimentation. Mais, pour la grande majorité d'entre elles, les tout-petits ne courent pas particulièrement de risque, selon l'Etude de l'alimentation totale (EAT) infantile réalisée par l'Agence nationale de sécurité de l'alimentation (Anses) en 2016. Depuis le mercredi 28 novembre 2018, l'ensemble des données issues de cette étude est désormais accessible et consultable par tous sur le site officiel data.gouv.fr. Ce qu'il faut savoir.

L'Agence s'est intéressée à la composition de 97 % des aliments que les tout-petits consomment régulièrement. Ce sont plus de 5 400 produits représentatifs des consommations et des pratiques d'achats et de préparations alimentaires achetés au supermarché ou dans les marchés, qui ont été analysés durant plus de six années. L'objectif ? Détecter la présence éventuelle de près de 670 substances dont des pesticides, et caractériser le risque pour 400 d'entre elles. C'est la première étude d'une telle ampleur qui s'intéresse spécifiquement aux moins de trois ans.

Une quinzaine de substances à surveiller. L 'étude révèle globalement une bonne maîtrise des risques sanitaires associés à la présence potentielle de contaminants chimiques dans les aliments. En effet, pour 90% des substances évaluées, le risque peut être écarté". Les scientifiques ont toutefois distingué neuf substances, pour lesquelles l'exposition doit être diminuée. "Il s'agit de substances pour lesquelles un nombre non négligeable d'enfants présente une exposition supérieure aux valeurs toxicologiques de référence." C'est le cas de l'arsenic inorganique, du plomb, du nickel, des PCDD/F, des PCB, des mycotoxines T-2 & HT-2, de l'acrylamide, du déoxynivalénol et ses dérivés ainsi que du furane. L'arsenic a par exemple été retrouvé dans du riz et certaines céréales infantiles. "Pour sept autres substances, notamment l'aluminium, le cobalt, la strontium, le méthylmercure, le sélénium, le cadmium et la génistéine chez les consommateurs de soja, le risque ne peut être écarté."

Que conseiller aux parents ? Avant un an, "seuls le lait maternel et les préparations infantiles permettent de couvrir les besoins nutritionnels du nourrisson", explique Marion Hulin, chargée de la coordination de l'EAT infantile. Celle-ci ajoute en effet que le lait végétal et le lait courant (vache, chèvre…) ne permettent pas de couvrir ces besoins. Par ailleurs, "il est essentiel de commencer la diversification alimentaire à partir de 6 mois de façon optimale, et dans tous les cas, jamais avant 4 mois révolus", déclare la scientifique. Et pour cause, elle "entraîne des expositions à certains contaminants supérieures à celles engendrées par la consommation de préparations infantiles. En quittant le régime strictement lacté, les enfants sont en effet plus exposés et à plus de substances", affirme l'Anses dans son communiqué.

"Après la diversification alimentaire, il faut varier le régime de l'enfant, c'est-à-dire les aliments qu'il consomme, et ce même s'il a une préférence pour tel ou tel aliment", affirme Marion Hulin. C'est en effet essentiel pour diminuer son exposition à ces substances. "Il est ainsi conseillé aux parents de varier les espèces et la provenance des poissons, assure Marion Hulin. Les enfants doivent par ailleurs consommer deux portions de poissons par semaine, dont un poisson gras riche en oméga-3 comme du saumon, des sardines, du maquereau, du hareng ou de la truite fumée." Il faut par ailleurs limiter la consommation d'aliments à base de soja.

Le Secteur Français des Aliments de l'Enfance (SFEA) rappelle par ailleurs dans un communiqué que "l'alimentation spécifique pour enfants (laits infantiles, lais de croissance, petits pots, petits plats et céréales infantiles) est soumise en France au plus haut niveau de contrôle. Les fabricants respectent des normes extrêmement strictes, encadrées par une réglementation spécifique, afin de garantir au consommateur un niveau de sécurité, de qualité et de traçabilité sans équivalent dans l'alimentation courante. Les aliments infantiles spécifiques sur le marché restent une proposition sûre pour les tout-petits".