La fessée, une pratique érotique ? 6 réponses sexo

Selon une enquête Ifop/Femme Actuelle réalisée en 2012, 24 % des Françaises affirment avoir déjà reçu une fessée de leur partenaire contre 8 % en 1985. Une pratique qui prend de plus en plus de place dans nos lits ? Nous avons interrogé Nathalie Giraud Desforges, sexothérapeute, afin de comprendre les dessous de cette déculottée.

La fessée, une pratique érotique ? 6 réponses sexo
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Les chiffres parlent : en 2012, 24 % des Françaises affirmaient avoir déjà reçu une fessée de leur partenaire contre 8 % en 1985. Peut-on affirmer que la fessée s’impose ou les femmes admettent-elles plus facilement aujourd’hui la pratiquer ?

Il y a un peu des deux. Aujourd'hui, la parole se libère en matière de sexualité. Et aussi parce qu'on se libère au lit. Oser parler sexe et oser de nouvelles pratiques, c’est lié. J'observe que l'arrivée de Sex and The City sur nos écrans (ndlr : en 1999, en France) a libéré les yeux, la parole. La série a levé un voile sur ce qu'il se passe sous la couette, surtout avec le personnage de Samantha. Pour moi, cette série est un tournant qui a permis d'introduire certaines pratiques sexuelles de façon tout à fait décomplexée dans nos chambres à coucher. Nous ne sommes pas dans le porno mas face à ce phénomène on se donne soudainement l'autorisation de tester de nouvelles choses et surtout de l’avouer, puisque ça paraît désormais normal. 50 Nuances de Grey a eu le même rôle. La saga ouvre les esprits, donne envie de s'essayer. Le sondage dont vous parlez a d’ailleurs été réalisé pour la sortie du second tome. Quels auraient-été les chiffres juste avant ?

Pourquoi, lorsque l’on pense fessée, on l’imagine souvent violente et douloureuse ?

Parce qu’on pense fessée SM ! Or la fessée ne se pratique pas nécessairement avec un fouet et ne laisse pas des traces infinies sur les fesses. Il faut la redéfinir. La fessée, c’est l’acte de frapper contre les fesses, avec l’intensité que l’on veut et l’accessoire que l’on veut. Elle peut se faire du plat de la main ou avec une main douce, du bout des doigts. Ça ne claque pas forcément. J’invite à parler de fessée cérébrale ; ce qui nous fait plaisir, c’est de tendre les fesses, d’imaginer le geste. De la même façon, le partenaire peut aimer le geste, sans chercher à transmettre une quelconque douleur ou humiliation. Les fesses sont un élément excitatoire et érotique. La fessée cérébrale, c’est donc d’abord me mettre en posture de recevoir la fessée. C’est penser le geste, m’imaginer soumise et prendre du plaisir dans cette "conception". La fessée est une pratique sexuelle qui au départ est un jeu entre adultes consentants, un déséquilibre avec plus de plaisir que de douleur ! Mais évidemment, pour aller vers cette fessée "plaisir" qui peut même amener à l’orgasme suivant la position du fessé, il est nécessaire d'être en accord avec son partenaire, de trouver ensemble une définition de la fessée et se lancer avec envie.

La fessée érotique nous ramène-t-elle indéniablement à notre enfance ?

Dans les Confessions de Jean-Jacques Rousseau, suite à une fessée reçue par Mademoiselle Lambercier, sa gouvernante, on lit : "[...] J'avais trouvé dans la douleur, dans la honte même, un mélange de sensualité qui m'avait laissé plus de désir que de crainte de l'éprouver derechef par la même main. Il est vrai que, comme il se mêlait sans doute à cela quelque instinct précoce du sexe, le même châtiment reçu de son frère ne m'eût point du tout paru plaisant." L’écrivain et philosophe découvre à travers cette fessée ses premiers émois érotiques. Il ressent quelque chose de fort qui mêle plusieurs sentiments : la culpabilité, la honte et le plaisir. La fessée est un châtiment corporel mais qui châtie bien aime bien : la fessée pourrait alors s’apparenter à un geste… d’affection. La différence avec l’âge adulte tient de notre libre arbitre, du choix d’accepter ou de refuser et de dire stop. Adulte, on se soumet à son partenaire et on le sait. Les amants entrent dans un jeu sexuel où celui qui reçoit accepte de recevoir et ne subit plus. L’humiliation est consentie et là se trouve le plaisir.

En quoi la fessée peut-elle réellement être une source de plaisir ?

Les fesses sont une zone érogène, il ne faut pas l’oublier! Ensuite, je dirais que la fessée est un acte transgressif. Et tout ce qui relève de l’interdit a le pouvoir de stimuler. Ensuite, dans la pratique elle-même, la fessée entraîne un son et il ne faut pas oublier que le bruit est un élément clé dans le rapport sexuel. Le plaisir auditif joue un rôle. Pour celui qui donne, on parle aussi du plaisir visuel : laisser une petite marque rouge sur une peau blanche excite. Pour celui qui reçoit, le plaisir connait deux sources : d’abord la position de soumission, les fesses offertes, la chaleur des claques reçues sur la peau et le fait de voir l’autre aimer ça. L’excitation de notre partenaire nous est transmise. Si on aime que l’autre aime, on entre dans un cercle vertueux. Bien sûr, pour que ce cercle vertueux tienne la route, il faut que le couple soit d’accord. L’excitation du couple naît dans le respect mutuel, dans le jeu autorisé.

Comment réclamer la fessée ?

Réclamer la fessée à l’avance demande une certaine maturité sexuelle. En plein acte, il sera d’autant plus facile de réclamer la fessée si on l’a réfléchie avant et si on la désire depuis quelque temps. Il faut jouer avec l’angle de la punition : et si j’étais vilain(e) ce soir ? Et si je méritais la fessée ? N’oublions pas qu’il faut définir un cadre et amener la fessée comme un jeu, un scénario. Pour une première fois, et afin de s’accorder avec son partenaire, on évitera l’alcool. Même s’il donne des ailes et permet "d’oser", si on a trop bu on peut le regretter. Parce que notre partenaire ne mesurera peut-être pas sa force. Ensuite, il est bien de définir un code pour dire stop. On choisit un mot, qui n’a rien à voir avec le sexe afin de bien l’entendre et le différencier, et on le prononce si on désire arrêter .

Je veux lui donner la fessée… Je m’y prends comment ?

Qu’on la reçoive ou la donne, l’idée est la même : être en accord avec son partenaire dans le respect mutuel. On évite la surprise qui tape, claque, sort de nulle part ! La position la plus courante est celle sur les genoux du fesseur avec la main comme seul accessoire ! On y va en douceur, on commence par positionner son partenaire sur ses genoux, "déculotter" l’autre peut amener une excitation supplémentaire, empoigner une de ses fesses et observer sa réaction. L’anticipation de la fessée est déjà un élément déclencheur du plaisir, de même que varier le rythme et le son du clac sur les fesses.

Merci à Nathalie Giraud Desforges, sexothérapeute et fondatrice du site marchand Piment Rose.
Pour en savoir plus : Osez la fessée, d'Italo Baccardi, éditions La Musardine

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